Var : les députés RN mis à l’écart lors d’un déplacement de Darmanin…

En déplacement officiel à la prison de La Farlède, dans le Var, pour réagir aux attentats dont les centres pénitentiaires ont été victimes, Gérald Darmanin n'a visiblement pas estimé utile de convier l'ensemble des députés du département. Étonnant, quand on sait que sur les huit parlementaires varois, sept appartiennent au Rassemblement national.

Des scènes de western. Depuis le 13 avril, les prisons et le personnel pénitentiaire sont l’objet d’une vague d’attaques sans précédent. En trois jours, ce sont environ six prisons ciblées, trente véhicules d’agents pénitentiaires détruits ou endommagés, des domiciles visés. Immédiatement s’ensuit le traditionnel déplacement ministériel pour affirmer l’impuissance de l’État et apporter soutien et compassion, devant beaucoup de micros et de caméras. Le ministre de la Justice décide de se rendre derechef dans le Var, où la prison de La Farlède a essuyé une quinzaine de tirs de kalachnikov, dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 avril.

Les RN indésirables

Un déplacement où tous les députés du département n’ont pas été conviés. Seule Laure Lavalette (RN) était présente en tant que députée de la circonscription de la ville de La Farlède. Les autres parlementaires contestent « une exclusion injustifiée ». Il faut dire que cela aurait fait une « drôle de photo de famille », glisse l’un d’entre eux. En effet, le Var est un département profondément marqué bleu Marine. Le Rassemblement national y a raté de peu le grand chelem aux dernières législatives de juin 2024. Sept des huit députés de cette terre provençale appartiennent au parti à la flamme.

Dans un courrier adressé au garde des Sceaux, ils sont cinq parlementaires à faire part de leur « étonnement » et de leur « incompréhension » de ne pas avoir été conviés et dénoncent une manière de faire qui « revêt un caractère profondément sectaire ». « Écarter les députés du Var d’un déplacement aussi symbolique, c’est envoyer un signal de division à nos concitoyens et faire preuve d’une irresponsabilité politique regrettable », s’indignent les députés, qui s’estiment « tenus à l’écart ».

Écarter six députés du Var d’un déplacement ministériel sur un sujet aussi grave, ce n’est pas une maladresse : c’est un choix politique assumé, et une faute démocratique majeure.

Dans un contexte de guerre contre la criminalité organisée, l’État devrait rassembler, pas… pic.twitter.com/advYmEwWDJ

— Julie Lechanteux (@JLechanteux) April 17, 2025

Contacté par BV, Franck Giletti, délégué départemental RN et député de la 6^e circonscription du Var, dénonce un comportement « curieux » et « a minima discourtois ». En effet, pourquoi les sénateur du département étaient-ils tous invités ? Pourquoi Yannick Chennevard, député macroniste de Toulon, était-il convié ? Parce que la prison s’appelle Toulon-La Farlède ? Le député s’étonne, car sa circonscription est « voisine » de la prison. Idem pour son collègue Stéphane Rambaud. Or, la prison de La Farlède accueille, avec Draguignan, l’autre centre pénitentiaire du Var, « des prisonniers de tout le département ». « Ça n’a aucun sens », déplore le député Giletti, « à un moment où le personnel des prisons a particulièrement besoin de notre soutien et de notre reconnaissance. » D’autant que les élus marinistes affirment, dans leur courrier, être « pleinement investis dans la lutte contre le narcotrafic ». La récente loi adoptée « pour sortir la France du piège du narcotrafic » a reçu « leur soutien unanime ». Contacté par le parlementaire, le cabinet du préfet s’est retranché derrière « le protocole » et « l’usage », qui ont été respectés. Alors, le député s’interroge, ironique : « Pourtant, lorsque Éric Dupond-Moretti est venu à La Farlède [en 2022, NDLR], nous étions tous invités. » Effectivement, si l’invitation de l’ensemble des parlementaires d’un département lors de la venue d’un ministre n’est pas systématique, elle est fréquente. Dans le Var, ce fut aussi le cas, par exemple, lorsque Marc Fesneau, l’ancien ministre de l’Agriculture, vint à Saint Maximin-la-Sainte-Baume, en septembre 2024, ou lors du départ de la mission Jeanne d’Arc de la marine nationale, en février 2025. Preuve en est qu’il y a une part d’appréciation et de sur-mesure dans ce fameux protocole. Gérald Darmanin s’est pourtant exprimé fermement, ce jour-là, à La Farlède : « La République ne reculera pas. » En termes de protocole, la tradition républicaine, elle, attendra.

Imprimer, enregistrer en PDF cet article