[TRIBUNE] Le binôme Retailleau-Darmanin, esbroufe ou sursaut ?

Darmanin et Retailleau auront-ils les soutiens et les moyens nécessaires à leurs actions ? Rien n’est moins sûr.
Capture écran France Télévisions
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Sur le papier, policiers et gendarmes ont de quoi se réjouir. En effet, les nominations de Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur et de Gérald Darmanin à celui de la Justice sont, au moins en apparence, des signes forts envoyés par un exécutif qui, semble-t-il, a enfin compris que rien n’est possible en matière de sécurité sans que les deux principaux acteurs que sont le locataire de la Place Beauvau et celui de la Place Vendôme ne marchent main dans la main. Pourtant, il ne faut pas être naïf. Tout comme une hirondelle ne fait pas le printemps, deux ministres, aussi emblématiques soient-ils, ne feront pas le big bang sécuritaire. Pour cela, il faudra qu’au plus haut sommet de l’État, nonobstant les entraves politiques et institutionnelles nationales et internationales qui existent toujours, le président de la République et le Premier ministre nouvellement nommé fixent d’un commun accord la voie qu’il conviendra de suivre afin de mettre en place les réformes structurelles et politiques qui s’imposent aujourd’hui.

Réformer le Code de procédure pénale

La priorité du nouveau garde des Sceaux devra être de s’attaquer à une profonde réforme du Code de procédure pénale. Rendu totalement inefficace, et devenu avant tout un outil au service des criminels à cause des multiples réformes apportées au cours des dernières décennies, il est désormais grand temps d’inverser la vapeur et de redonner à nos forces de l’ordre les moyens juridiques d’effectuer efficacement leur travail. En effet, confrontés quotidiennement à sa complexité, policiers et gendarmes sont le plus souvent réduits à l’impuissance par des normes contraignantes qui ne s’appliquent qu’à eux et finissent par les réduire à l’impuissance. Ainsi, simplification et pragmatisme opérationnel doivent devenir les fils conducteurs d’un vaste bouleversement juridique, seul à même de leur redonner de véritables moyens d’agir contre le crime.

À cet égard, les premières déclarations de Gérald Darmanin relèvent de la fanfaronnade pour certaines, notamment lorsqu’il déclare de façon péremptoire qu’il sera « le ministre qui réconciliera les Français avec leur Justice ». Ou bien comme de vieilles rengaines déjà entendues, lorsqu’il annonce qu’il donnera « des instructions aux parquets pour qu’aucun crime ne demeure impuni », ont de quoi inquiéter. Pour faire face aux défis sécuritaires auxquels est confronté notre pays, il en faudra en effet beaucoup plus. Mais soyons patients et voyons si le promoteur des « places nettes » saura convaincre les juges du bien-fondé de son approche.

Les Français attendent des actes

Pour ce qui concerne Bruno Retailleau, son alter ego de l’Intérieur, la tâche n’est pas moindre. Passé le temps des annonces et des postures, les Français attendent maintenant des actes. Le premier de ces actes devra être de redorer l’image de nos forces de l’ordre. Les professions de policier et de gendarme n’attirent plus. Bien plus : jamais il n’y a eu autant de départs anticipés, au sein de ces deux institutions qui, hier encore, étaient de nature à susciter des vocations. Le ministre de l’Intérieur devra donc veiller au relèvement des niveaux de recrutement, aujourd’hui descendus bien bas, et à la  fidélisation des femmes et des hommes qui, confrontés à la dureté du métier, n’hésitent plus aujourd’hui à tirer leur révérence à la première occasion. Le second défi du ministre, et non des moindres, sera de redonner à nos forces de l’ordre les moyens de travailler dans des conditions dignes et sûres, et là encore, il aura beaucoup à faire.

Nous le voyons, les chantiers qui attendent ces deux poids lourds du nouveau gouvernement Bayrou sont énormes. Il faudra que les deux ministres utilisent toute la force de leurs convictions pour que la France retrouve un climat de sécurité satisfaisant et puisse enfin s’apaiser. Pourtant, auront-ils les soutiens et les moyens nécessaires à leurs actions ? Rien n’est moins sûr.

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Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

Vos commentaires

87 commentaires

  1. J’ai peur que leur concurrence médiatique n’occupe l’essentiel de leur temps. Bayrou a commis une grave erreur en nommant au moins 3 ministres qui se verraient bien président, surtout que lui-même s’y verrait bien aussi…

  2. Pour le moment, moussa (de l’intéressé lui-même) veut prolonger la garde à vue des auteurs de violences faites aux femmes ! Quand à retailleau qui, à calais voulait « tordre le bras aux anglais » pour recevoir les immigrés, il n’a toujours pas compris, qu’il ne devrait pas avoir sur le sol national d’immigrés clandestins, si les frontières (et les aéroports) étaient bien tenus, mais peut-être ignore-t-il que la France fait partie de l’UE !

  3. Darmanin et les mensonges du stade de France.
    Où sont les vidéos des supporters anglais ?
    Menteur hier, menteur aujourd’hui, menteur demain.
    Moussa ou pas, qui le croira ?

  4. En fait de signs forts de cet attelage, en voici un qui le rendrait crédible : que les agresseurs de policiers soient immédiatement et très lourdement sanctionnés, en flagrant délit, sur la parole du fonctionnaire.

  5. La France étant gouvernée depuis Bruxelles, qui a toute latitude et moyens pour annuler toutes velléités de « politique forte » en France, il est à craindre que ce tandem ne soit que de la poudre aux yeux. S’ils veulent réformer vraiment, il faut un référendum sur la prééminence des lois régaliennes françaises sur l’UE. Comme en Allemagne, où la cour de Karlsruhe peut décider d’ignorer l’UE. Maintenant, voyons s’il y a une volonté politique. En outre, il faut compter, parmi les ministres « puissants », le nouveau ministre des Finances, Lombard, qui aurait pour « modèle » le célèbre T Piketty, l’économiste crypto communiste pour qui les Français ne paient jamais assez d’impôts, et ennemi des successions. Nous sommes mal partis.

      • En effet. Cependant, Retailleau avait parlé de « renverser la table », expression qui implique qu’il faille faire vite et fort. Or, Bayrou ne semble pas être pressé: son discours de politique générale ne se fera qu’à la mi-janvier. Pas de quoi être optimiste, ne trouvez-vous pas?

  6. Moi, je veux bien tout, mais il ne faut quand même pas oublier que Mr Darmanin est un homme profondément opportuniste. Il ne fera rien d’autre que du vent, comme il le prouve depuis si longtemps. Sa nomination et celle de Mme Borne, entre autres, sont des fautes lourdes, qui vont mener son gouvernement à un échec cuisant. Notre pays n’est pas près de s’en remettre.

    • C’est justement parce qu’il est opportuniste et qu’il a les dents longues qu’il peut faire des choses. Il a parfaitement compris ce que souhaitait la majorité des Francais en matière d’immigration, de justice et de sécurité, pour aller dans le bon sens. S’il ne le faisait pas il risquerait de se griller. Darmanin a vu comment Retailleau a gagné les faveurs du peuple en trois mois et quel souvenir va laisser un Migaud, ministre de la justice, dans l’esprit des gens… Il a de l’ambition et sait « qu’on attrape pas les mouches avec du vinaigre »…. Enfin, j’espère…

  7. Paroles et Paroles. Pourquoi ne l’ont -il pas fait quand ils étaient au pouvoir avant. De l’esbroufe évidemment.

  8. Ai-je tort en disant « qu’y travaille dans un gouvernement macroniste, travaille forcément pour macron et participe ainsi à la destruction de notre France ! « 

    • C’est une partie d’échecs. Bayrou a totdu les bras de Macron pour se faire nomer. Il sait qu’aujourd’hui son ministre le plus populaire c’est Retailleau. Je pense que si ce dernier est revenu, il a du poser ses décisions, tracer ses lignes rouges et demander des garanties. Que deviendrait son gouvernement si demain le ministre de l’Intérieur tapait du point sur la table et mettait sa démission en jeu si Bayou ne jouait pas le jeu ? Ce ne sont pas les Borne, Valls et Aurore Berger, qui ne sont que des gages donnés à la gauche, qui pourraient le sauver…

  9. Seule la population peut les aider à agir. Les freins de la machine étatique sont puissants, il faut souhaiter qu’ils réussissent car sinon la France silencieuse va finir par se faire entendre.

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