Salon de l’agriculture : la présence du Maroc entre concurrence et diplomatie

Symbole d'une concurrence inégale, la tomate cerise marocaine a envahi les grandes surfaces françaises.
Capture d'écran SNRTnews
Capture d'écran SNRTnews

À Paris, alors que le Salon de l’agriculture bat son plein, depuis le 22 février, au Parc des expositions, une ombre vient ternir ce tableau festif. Si, chaque année, des partenaires commerciaux étrangers sont invités aux côtés des agriculteurs français, l’édition 2025 innove en mettant pour la première fois un pays à l’honneur. L’heureux élu ? Le Maroc, voisin extra-européen de la France. Une décision qui passe mal auprès de nombreux agriculteurs, certains dénonçant une « nouvelle provocation », comme l’a fait, ce samedi, Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination rurale.

La tomate marocaine écrase la France

Mais pourquoi une telle amertume vis-à-vis de nos voisins marocains qui demeurent pourtant des partenaires commerciaux importants pour l’agriculture française ? C’est tout d’abord la tomate qui a provoqué cette indignation chez nos paysans. Et en particulier la tomate-cerise marocaine, dont les maraîchers dénoncent la surreprésentation dans les grandes surfaces françaises. Ces dernières années, ce marché s’est vu pris d’assaut par la concurrence de ce partenaire méditerranéen qui est devenu, de loin, le vendeur le plus important de tomates en France, avec 69 % d’importations depuis le Maroc, et une augmentation de plus de 139 % depuis 2003.

Si ces exportations s’inscrivent dans le cadre des accords d’association signés dans les années 2000 entre le royaume chérifien et l’Union européenne, de nombreux agriculteurs français dénoncent un déséquilibre. Ils accusent l’autre partie de ne pas respecter ses engagements, à savoir les méthodes de production des tomates pour lesquelles les Marocains utiliseraient des produits phytosanitaires interdits au sein de l’Union européenne. À cela s’ajoute un autre facteur clé : le coût de la main-d’œuvre. Nettement inférieur à celui pratiqué en France, il permet aux producteurs marocains de proposer des prix défiant toute concurrence, d’autant plus que les normes sanitaires y sont moins strictes. Résultat : la tomate-cerise marocaine envahit les étals des grandes surfaces françaises à un tarif imbattable, parfois aussi bas que 0,99 euro la barquette. Un coup dur, pour les maraîchers français, dont la production se retrouve dévalorisée, accusant un recul de 13 % en 2023.

Ces accusations de concurrence déloyale ne sont d’ailleurs pas nouvelles. En juin dernier, des militants de la Coordination rurale avaient déjà mené des opérations coup de poing visant spécifiquement la tomate marocaine, symbole, selon eux, de la mise en difficulté des producteurs français par des accords commerciaux inéquitables.

Colère paysanne contre considérations diplomatiques

Dans ce contexte, voir le Maroc mis à l’honneur au Salon de l’agriculture en a exaspéré plus d’un. Certains y voient un signal particulièrement malvenu, alors que les agriculteurs français luttent déjà contre les effets de la concurrence étrangère. Mais d’autres préfèrent nuancer la question et portent un regard plus diplomatique sur l’invitation du Maroc à la 61e édition du Salon de l’agriculture. Jean Lefèvre, agriculteur de l’Oise et membre de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), soulève la question épineuse des relations diplomatiques. Pour lui, il est impératif « d’essayer de renouer le dialogue » avec le Maroc, explique-t-il à BV, tout en reconnaissant que cette mise à l’honneur, comme elle a été présentée, est difficile à accepter pour de nombreux producteurs. Et d’ajouter, avec une pointe d’ironie : « Un peu trop d’honneur, peut-être. »

La question reste de savoir si la France saura s’affirmer face au Maroc pour défendre ses agriculteurs ou si, comme avec l’Algérie, elle continuera à ménager un partenaire commercial qui détourne le regard, quitte à sacrifier une partie de sa souveraineté agricole. Pour les maraîchers français, la pilule reste dure à avaler.

Vos commentaires

27 commentaires

  1. Macron trahit les Français et surtout les Agriculteurs , les tomates marocaines sont infectes , dure et les pépins germés à l’intérieur ( cerise ou grandes elles sont bourrées de produits chimiques ) ! les poulets ukrainiens sont gonflés et élevés on ne sait où dans le pays et avec quel genre de nourriture ??? , les avocats venus d’Afrique du sud , du Pérou ou autre pays exotiques comportent des « piqures » de produits chimiques dis conservateurs ,,, arrêtons d’acheter des produits OGM importés pour nous empoisonner !
    Il faut mieux en manger moins mais du produits en France !

  2. Il n’y a pas que les tomates cerises…les haricots verts aussi , comme on en voit chez Intermarché, comme si la France n’en produisait pas on ne voit qu’eux…on n’a même pas le choix ! Perso j’en vient même à préférer payer plus cher mais acheter français…exemple les bananes du Ghana alors que nous avons celles des Antilles.
    Les français devraient boycotter ces produits, mais vu les prix…ce n’est pas demain la veille! Les français sont Patriotes quand ça ne leur coûte rien …même pas capables de se priver d’un produit s’ils n’ont pas les moyens!!

  3. Cette invitation du maroc, n’est qu’un moyen de plus pour macron de provoquer l’algérie, il n’en a rien à cirer des agriculteurs !

  4. Super ! Des tomates marocaines avec du poulet ukrainien, un repas délicieux et tellement sain qu’on doit servir ça tous les jours à l’Elysée … A moins que cette nourriture ne soit bonne que pour les gueux, ceux qui ne sont rien. J’ai envie de dire que le consommateur devrait boycotter cela; Mais je suis bien consciente que de plus en plus de Français qui travaillent n’ont pas le choix et sont obligés d’acheter les denrées les moins chères pour se nourrir et nourrir leurs enfants. Et notre très cher (et encore plus cher …) Etat n’en n’a rien à faire de la santé de ces bouseux ; quant à la prévention, n’en parlons pas.

  5. Les Français savent-ils que beaucoup de fruits et de légumes venant de l’autre côté du détroit de Gibraltar sont issus très souvent de producteurs espagnols et français installés au Maroc, en Tunisie, voire à l’est de l’Europe pour les céréales, pour les raisons que l’on devine ? Mais avaient -ils le choix vu notre politique agricole et le dictat des écologistes en Europe, tout particulièrement dans l’Hexagone ?

  6. Après avoir reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara (Boualem Sansal est en train de le payer de sa vie), macron, en récompense (?) autorise l’importation massive de tomates cerises (sur le gateau ?). Merveilleux accord gagnant-loser… mais à quoi joue-t-il donc ?

  7. L’agriculture française est tuée a petit feu par des produits dont la production n’est pas en accord avec les réglementations imposées à ‘os agriculteurs. Les contradictions de cette Europe débile sont déplorables car d’un côté elle nous demande de manger sain, impose des normes d’étiquetage non respectées par la concurrence et d’un autre nous empoisonne.

  8. Bientôt se seront les poulets et bien d’autres productions venant de l’extérieur Brésil, Ukraine etc.
    Les consommateurs sont appauvris et se tournent vers des prix plutôt que la qualité. C’est humain et de bon sens. Il faut avoir les moyens d’être patriotes.

  9. J’ai renoncé aux tomates-cerises à l’apéritif : ce ne sont que de l’eau et une peau indigeste qui colle aux gencives.

  10. Entre concurrence et diplomatie là où je vois de la provocation de la part de la macronie qui ne cesse de souffler sur les braises de la contestation des agriculteurs. Car convier le Maroc au salon de l’ agriculture alors que les importations notamment de tomates mettent à mal la production française est un message clair pour l’ avenir de notre agriculture, à savoir l’étouffer sous des importations massives des pays extra européens.

  11. Sur les étales le prix moyen, au kilo, desdites tomates est de 6€ ??? Si l’on sait le prix d’achat au Maroc, il est connu que la marge bénéficiaire est large. Sans compter que nos chères grandes surfaces appliquent leurs tarifs en fonction du niveau social du lieu. De grands malins…

    • La saison de la tomate, (légume que, par ailleurs, je n’aime pas) est du 21 juillet au 10 octobre; point-barre.

  12. Quand les tomates ne viennent pas du Maroc , elles viennent du sud de l’Espagne. ( Européennes peut être pour les dernières mais le problème est le même pour nos maraîchers francais .) Cultivées hors sol sous des milliers de km2 de serres , transformant les lieux de production en océan de plastique…. et permettant à toute une population de vivre . La tomate française , cerise ou non, de saison , a un atout essentiel que les autres ont rarement : le goût. Évidemment, le prix n’est pas le même . Le plaisir non plus ! On achète un prix ou une qualité suivant son palais et son portefeuille.

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