Retour au bled : nouvelle tendance des jeunes issus de l’immigration algérienne

Finalement, cette volonté de rentrer au pays se résume en une phrase : « Je ne me suis jamais senti français, jamais. »
Capture d'écran TikTok
Capture d'écran TikTok

« One, two, three, viva l’Algérie » devient « One, two, three, je retourne en Algérie ». Sur les réseaux, cette tendance prend de l’ampleur. Sur TikTok, par exemple la vidéo de Adel-dz30 a été vue près de 587.000 fois. Il y raconte son déclic, sa volonté ferme de quitter la France pour regagner son pays d’origine : « J’ai pris la décision de quitter la France pour aller vivre en Algérie. » Et il donne les raisons de ce déclenchement soudain : « J’aime plus ce pays, ce qu’il est en train de devenir [depuis l’attentat du 7 octobre], j’ai l’impression d’avoir vu le vrai visage de la France. »

 

https://www.tiktok.com/@adel_dz30/video/7375402525446425888?is_from_webapp=1&sender_device=pc

 

Pour lui, l’Algérie miroite comme une Terre promise : « L’Algérie, c’est la bienveillance, c’est le partage, c’est l’honnêteté, c’est l’entraide. » Finalement, cette volonté de rentrer au pays se résume en une phrase : « Je ne me suis jamais senti français, jamais. » Il n'est pas le seul à plébisciter ce retour au bercail. Le retour aux sources d’une jeunesse née en France et n’ayant jamais vécu en Algérie est une réelle tendance, sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok, réseau social préféré des jeunes. Naila, jeune femme de 23 ans d’origine algérienne, poste un contenu semblable, sur son compte : « Mes parents sont arrivés en France en 1995, 2024 : je quitte ce pays de merde et je retourne au bled. » La vidéo suivante n’est pas moins explicite : « 99 problème : [émoji du drapeau français] ; 1 solution : [émoji du drapeau algérien]. » De nombreux comptes s’inscrivent dans cette même veine. Certains donnent des conseils pour « réaliser ce rêve » de s’établir dans son pays d’origine.

 

Ces jeunes nés en France qui ne se sont jamais sentis français

 

En dehors de la bulle microcosmique que représentent les tendances issues des réseaux sociaux, ce phénomène est bien réel. Maher Mezahi témoigne, pour la BBC, de ce phénomène qu’il appelle l’immigration inversée. Il raconte le mépris que son père porte envers son pays d’origine et le doute qu’il avait face au retour de son fils en Algérie. Maher Mezahi avait quelques craintes : « Une bureaucratie implacable, le système judiciaire précaire et les difficultés à trouver des soins de santé spécialisés en cas de besoin. » Pourtant, « la liste des inconvénients s’estompe lorsque je réalise que je rentre chez moi, pour faire ce que j’aime le plus dans l’endroit que j’aime le plus. » Dans ce cas encore, alors qu’il y habitait, cet enfant de l’immigration ne se considérait pas en France comme « chez lui », il ne se sentait pas français.

Cette « immigration inversée », Nabil Mati, diplômé de l’École des hautes études en sciences sociales de Paris, l’analyse dans un article publié dans El Moudjahid. Il y évoque l'état d'esprit des jeunes d’origine algérienne qui se sentent rejetés par la société française. « Certains ont envisagé de quitter le pays en raison de l’atmosphère parfois malsaine créée par la classe politique française », qu’il estime « droitisée ». Une fois de plus, selon lui, ceux qui retournent en Algérie ne se sentaient pas à l’aise avec la culture française, ils ne se sentaient pas français : « Certains enfants d’immigrés choisissent de s’installer et d’investir en Algérie pour préserver leur dignité, leur culture et leur identité. »

 

Un retour motivé par la religion ou les occasions professionnelles

 

Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie, contacté par BV, donne deux raisons principales à ce phénomène : « Ce sont des jeunes de la deuxième, troisième, voire quatrième génération, qui sont français et disent que la France est un pays raciste, islamophobe, etc. Ils veulent rentrer en Algérie afin de pouvoir vivre librement leur religion. » Pour le diplomate, ils n’aiment pas la France, ne se sont jamais sentis français pour la plupart d’entre eux, mais le fait d’avoir la nationalité française reste un filet de secours : ils savent que si la vie est trop difficile outre-Méditerranée, il leur sera facile de rentrer en France.

Selon Xavier Driencourt, il faut aussi relativiser le phénomène : « C’est ce qu’ils disent, mais combien le font vraiment ? » Il y a, chez ces jeunes qui n’ont jamais vécu en Algérie, ou bien seulement quelque temps pour des vacances, l’idée que l’herbe est plus verte ailleurs. Ils considèrent l’Algérie comme une sorte d’Eldorado. Mais il y a une deuxième raison à ces retours, ou plus exactement à ces départs vers l’Algérie : « Ce sont de jeunes Franco-Algériens très diplômés qui créent leurs boîtes en Algérie car la main-d’œuvre et les loyers sont moins chers. C’est une terre vierge pour les entreprises innovantes. Les deux raisons peuvent se cumuler, mais ce n’est pas toujours le cas », achève-t-il.

Boualem Sansal, écrivain algérien contacté par BV, abonde en ce sens : « Le gouvernement algérien offre à ces cadres la possibilité de venir en Algérie créer leurs propres entreprises et a mis en place toutes les incitations nécessaires (administratives, financières, fiscales...). Il semble que la chose fonctionne. »

Picture of Raphaelle Claisse
Raphaelle Claisse
Journaliste stagiaire à BV. Etudiante école de journalisme.

Vos commentaires

87 commentaires

  1. Tout ça c’est bidon, d’ailleurs on ne voit aucun chiffre sur le soi-disant retour.
    Du mensonge, forme de taqya, simplement.

  2. J’espère que cela va s’accélérer.
    Sachez bien que 150 000 français quittent la France chaque année, bien sûr 50 000 retraités, mais aussi 100 000 en ager de travailler, très diplômés ou moins !
    De toute façon, le solde des immigrés dépasse les 200 000 !

  3. Dans certains pays d’Afrique, face à l’incurie des gouvernements en place, une solidarité entre les habitants c’est installée. Et en Algérie, lorsque vous tombez en panne en voiture, des automobilistes s’arrêttent pour vous aider. Alors que lorsque la vie est plus rose dans des pays développés, c’est chacun pour soi. Mais lorsque les temps sont vraiment difficiles comme par endroits à Madagascar, en RDC ou au Nigeria, c’est de nouveau l’instinc de survie qui domine. A Kinshasa, une pléthore d’enfants sont abandonnés dans la rue par leurs parents et deviennent des shégués.

  4. Pour que l’étude soit complète, il reste à voir si c’est la même chose pour les malgaches, les chinois, les camerounais, les vietnamiens et les autres.

  5. Donc l’Algérie ne récupère que les compétences , les jeunes formés dans les bonnes écoles françaises . Pour 1 qui part 2000 qui viennent et de plus ces jeunes sont français donc au moindre problème ils reviendront . C’est vraiment trop facile .

  6. Enfin une bonne nouvelle! Ils devraient faire en sorte que leurs potes les accompagnent plus nombreux et surtout! surtout! qu’ils ne reviennent pas!

  7. Excellente idée , ils ont le privilège, que je n’ai pas , d’avoir une double nationalité , donc qu’ils partent vite participer au développement de leur pays .

  8. Les journalistes et les politiques oublient de dire , ils sont binationaux.
    Droit du sang au magreb .
    Ils repartent chaque été au bled en vacances.
    Et une fois décédés se font enterrer au « pays »

    • S’ils ne sont pas bien en France, c’est assez logique qu’ils veuillent partir.
      Chaque diplômé qui veut créer une entreprise pourrait partir avec quelques « frères » qu’il embaucherait une fois sur place.
      Quant à la personne qui déclare quitter « ce pays de merde », j’ai envie de lui dire que sans elle, l’air y sera déjà plus respirable.

  9. tout espoir n’est pas perdu … mais quand c’est un »souchien » qui préconise ce retour, pourquoi est-il traité de raciste ??? c’est beau l’amour de son pays, ses racines : encourageons-les

  10. ouf personne ne vous a demandés de rester en France Vous faite ce bon vous semble Mais il faut reconnaitre que cette France que vous détestée elle vous a nourrie et appris à lire et a écrire voilà comment vous la remercié en la traitant de raciste Pour moi je n’ai rien contre l’immigration comme ont dit ces gens qui arrivent et travail je n’est rien contre eux mais par contre vivre chez nous Français sans bosser et nous emmerder pas question dehors et je trouves que les jeunes ont bien raison de crées leurs entreprises je suis content pour eux

  11. Y a-t-il une cagnotte afin de venir en aide ?
    [Je précise, au cas où, c’est du 2nd degré !]
    Avec certains diplômé(e)s nécessaires à leur pays, telle l’Algérie, c’est encore ces pays-là qui tireront des bénéfices de ce la France aura donné à ces remigrants !

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