[Point de vue] 14 Juillet : pourquoi je hais la Révolution

L’amalgame réducteur si souvent fait entre la patrie française et la République est choquant.
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Le 14 juillet est la date retenue comme fête nationale par une loi de 1880. Contrairement à ce que pensent aujourd’hui une majorité de nos compatriotes, ce n’était donc pas du tout une date qui allait de soi, puisqu’il a fallu y « réfléchir » pendant 90 ans. Mais, par un saisissant raccourci de la pensée et de la mémoire, cela permet de gommer le fait que la première apparition de la république n’a été qu’une fausse couche douloureuse dont la France a eu bien du mal à se remettre.

Si on voulait bien regarder les faits et ne pas se contenter d’ânonner bêtement la doxa républicaine, on verrait que le premier fœtus républicain a été expulsé dans les horreurs de la Terreur, et le nouvel enfantement a dû attendre longtemps le passage de trois rois et deux empereurs. La liberté, l’égalité et la fraternité y ont-elles gagné quoi que ce soit qui vaille la peine et fasse pardonner les abominations révolutionnaires ? Les pays qui nous entourent sont nés récemment ou sont souvent des royautés parlementaires, pas moins démocratiques que notre République. Malgré les convulsions qui marquent l’Histoire de tous les peuples, ils ont évolué de manière plus apaisée que nous vers des systèmes démocratiques semblables sans les abominations que certains excusent en feignant de les considérer comme inévitables et justifiées par le fait même d'un aboutissement finalement heureux.

Crimes en série

Dans toutes les périodes troublées, quand les structures sociales et administratives craquent, des excès sont commis. Mais ce qui est déplorable, regrettable dans une situation de désordre, devient monstrueux, impardonnable, quand le crime de masse est organisé par ceux-là mêmes qui prétendaient apporter la liberté. Et ce fut le cas de tant de nos révolutionnaires que, trop souvent, on continue à honorer ! Encore aujourd’hui, nous nous recueillons au souvenir de cette période et plaçons sous le regard des autres la gloire d’avoir massacré tant d’innocents. En fait, nous avons inauguré à cette époque le premier pouvoir totalitaire des temps modernes qui a servi de modèle à toutes les tyrannies du XXe siècle, nazisme et communisme en tête.

Les citations accusatrices authentiques sont innombrables, incontestables, car inscrites dans les archives de la nation. On pourrait en mentionner jusqu’à la nausée. Robespierre, tyran emblématique, est un des plus grands responsables des crimes de cette époque, et cela, en un an seulement. Mais sur le podium des criminels en série, des massacreurs, on se bouscule. Marat, pousse-au-crime halluciné, Carrier, responsable à lui seul de 10.000 exécutions en moins de six mois, Collot d’Herbois se vantant de ne pas faire le détail (« Si l’on épargnait les innocents, trop de coupables échapperaient »), lui et son complice Fouché massacrant les suspects à coups de canon à Lyon car la guillotine avait un débit trop lent, le général Westermann écrivant à la Convention : « Citoyens républicains, il n’y a plus de Vendée ; elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants », et tant d’autres. Certes, beaucoup ont péri à leur tour sous le « rasoir national », terrifiante expression inventée par les révolutionnaires eux-mêmes ; mais pas en châtiment de leurs crimes, simplement parce que leurs exécuteurs du jour, complices de la veille, craignaient d’être à leur tour victimes de leur démence meurtrière. Deux notables exceptions, cependant, à ces fins tragiques : Fouché, qui a réussi à servir et trahir successivement tous ses maîtres et à survivre, et (champion toutes catégories) le général Turreau, massacreur en chef de la Vendée à la tête de ses colonnes infernales. Fait baron d’Empire, grand officier de la Légion d’honneur par Napoléon qui l’envoie, en outre, comme ambassadeur de France aux États-Unis, puis récompensé par le roi (un comble !) par l’attribution de la croix de Saint-Louis, enfin immortalisé par une inscription sur l’Arc de Triomphe avec les gloires de la République. Il est mort, fortuné, dans son lit.

Amalgame réducteur

Peut-on haïr la Révolution sans haïr la République actuelle ? Oui car, Dieu merci, celle que nous connaissons depuis longtemps n’a plus grand-chose à voir avec le monstre des origines. Les sacrifices consentis par le peuple français sous le drapeau tricolore depuis plus de deux siècles en ont sanctifié les plis. Mais il est pénible de constater que le pays autoproclamé des droits de l’homme revendique sa naissance au milieu des charniers, comme si la ci-devant France n’avait pas existé ou si son souvenir était honteux. Notre Histoire n’a pas commencé avec la Révolution. L’amalgame réducteur si souvent fait entre la patrie française et la République est choquant. Les citoyens des pays démocratiques qui nous entourent ne sont pas moins patriotes, même s’ils ne vivent pas en république. La république, c’est un système de gouvernance, rien de plus ; les « valeurs » dont on la croit chez nous exclusivement chargée sont partagées par bien d’autres, car elles sont pour la plupart inspirées du christianisme, et nous ne pouvons même pas en revendiquer la paternité qui échoit à la Constitution américaine de 1787.

Vos commentaires

56 commentaires

  1. 14 juillet… La prise de La Bastille ne fût qu’une pantalonnade :il n’y avait quasiment personne ;raison de plus sans doute pour décapiter le gouverneur.

  2. Merci pour cet article. Le 14 juillet 1789 la Bastille ne contenait que 7 prisonniers : 4 faussaires, 2 fous et 1 noble emprisonné pour inceste. Avec la révolution nous avons perdu nos libertés pour la Liberté qui n’est qu’un mot,
    même l’historien Jules Michelet l’a reconnu il disait, qu’avant la république,  » la France était hérissée de libertés »
    « Liberté-Egalité-Fraternité » : quel bluff

  3. Tout à fait d’accord avec vous monsieur Dubois. Enfin une personne qui ose dire la vérité sur les abominations de la révolution française et qu’il n’était point besoin d’en passer par là, pour arriver à la démocratie, d’autres pays nous l’ont prouvé comme par exemple l’Angleterre, mais pas que. Chaque fois que j’entends utiliser le mot république ou républicain, pour tout et pour rien, ça me hérisse les poils!

  4. Il faut lire le grand ouvrage incontesté en 2 tomes de Jean-Christian Petitfils ( Louis XVI, Perrin/Tempus, 2010) pour bien mieux comprendre, au jour le jour, la période révolutionnaire, ses acquis juridiques, sociaux, démocratiques, fiscaux, constitutionnels, d’abord acceptés par Louis XVI et la majorité de la nation. Y compris par l’aristocratie, sauf par les grands féodaux qui massaient des troupes à Coblence en collusion avec des souverains étrangers. Les torts sont partagés entre d’une part Louis XVI (et surtout sa femme) irrésolu et la faute de sa fuite, et, d’autre part, les Jacobins et Montagnards gauchistes : Danton, Robespierre et quelque journalistes hystériques. Puis la Vendée , la Terreur dont Sartre et LFI se réclament encore. L’Histoire est infiniment plus complexe : c’est une science exacte et subtile.

  5. Ma demie part maternelle américaine depuis 72 ans, mon habitat britannique depuis 29 ans, me font toujours réagir épidermiquement lorsque j’entends les anglo-saxons dire (prononciation oblige) : « Bastil day » !
    J’ai beau leur dire que la République n’a rien à voir avec la boucherie, ils m’énervent !

  6. Rien à ajouter, tellement vrai ! Je ne pense pas que l’on puisse un jour choisir une autre date pour notre fête nationale, mais plutôt remplacer « révolution de 1789 » par «  fête de la fédération » même si cela revient à peu près au même puisque cette dernière commémorait la première, mais les mots ont un sens, les images aussi, remplacer un bain de sang par une unité nationale c’est tout de même plus glorieux !

  7. Certains de ces abominables criminels sont toujours honorés, comme à Rueil-Malmaison où un collège porte le nom de Robespierre. Quelle honte !

  8. Excellent article. Les valeurs dites « républicaines » invoquée « ad nauseam » par les politiciens d’aujourd’hui ne sont rien d’autre que les valeurs inspirées par le christianisme et que partagent nombre de démocraties dans le monde. Cette référence constante à la république n’a d’autre but que de faire disparaître la réalité charnelle FRANCE;

  9. Pour comprendre il faut du recul. La révolution française n’est que l’outil destructeur du monde ancien , révolution organisée par le capital pour mettre en place sa domination progressive sur les sociétés anciennes. Ensuite et bien plus tard vers 1919 on aura la domination formelle puis à compter de 1945 la domination totale du capital. Pour faire plus simple on peut dire : bourgeoisie industrielle décapitant l’ordre ancien, fermiers, paysans, artisans puis transfert des masses vers les usines et création de la domination totale par l’argent , l’état et le capital apatride.

  10. Merci pour cette excellente mise au point. D’ailleurs, si cette république était si vertueuse, on peut alors se demander à bon droit pourquoi toute cette frange de la population issue de l’immigration, ne l’a pas adoptée avec enthousiasme mais, au contraire, la rejette avec autant de haine…
    Existe t-il en Europe d’autres pays qui connaissent un tel déferlement de violences ? Je ne crois pas…

  11. Votre article m’a passionnée . Et aidé à comprendre pourquoi le 14 juillet m’a toujours terriblement gênée par ce côté festif, factice pour moi et déplacé. Je me suis même entendue dire que j’étais peut-être royaliste . Non, je suis seulement consciente de ce que la Révolution a eu d’inhumain et de cruel et je n’ai aucune envie de fêter ça . Quand à la République .. je voudrais qu’elle signifie autre chose que ce qu’elle représente aujourd’hui. Peut-être que si nous parlions plus souvent de France , la République serait moins galvaudée.

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