Panne d’électricité géante : le grand vertige
« Notre monde n’est pas solide du tout », disait Barjavel, qui voyait l'écroulement de la civilisation, faute d'énergie.
Le mot est de Barjavel. « Contrairement à ce que l’on pense, [notre monde] n’est pas solide du tout, il est extrêmement vulnérable, d’autant plus vulnérable qu’il est plus compliqué, plus parfait, plus technique. » La grande panne d’électricité qui a touché, ce 28 avril, l'Espagne et le Portugal ainsi que le sud de la France ramène à l’écrivain, auteur de Ravage, paru en 1943. « C’était l’histoire d’une civilisation qui s’écroule parce qu’elle manque d’énergie », expliquait-il à la télévision, vingt ans plus tard.
Ce 28 avril, le réseau électrique portugais REN a confirmé l’ampleur de la secousse : « REN confirme une coupure massive de l’approvisionnement électrique dans toute la péninsule Ibérique, qui affecte aussi une partie du territoire français et dont l’impact a atteint le Portugal à partir de 11h33. » Le gouvernement espagnol a convoqué une réunion de crise, l’EDF local a lancé un plan d’urgence pour rétablir l’alimentation électrique progressivement. Aéroports, métros, chemins de fer sont paralysés, les systèmes de paiement sont en carafe... Si cette panne devait durer, les batteries électriques seraient à plat, les téléphones mobiles des objets inertes, les ordinateurs, les réseaux informatiques et les voitures électriques aussi utiles qu’une machine à vapeur conservée dans le formol. C’est le retour au monde d’avant, où on se déplaçait peu ou pas. Où la fée électricité, comme on l’appela, est partie sans laisser d'adresse.
« Le courant flanchait partout »
En fin d’après-midi, le courant est revenu dans le nord, le sud et l’ouest de l’Espagne. Reste la cause, inconnue à l’heure où nous écrivons. Pas rassurant. Et un constat : cette impression de gambader sur un château de cartes, un échafaudage instable. La panne espagnole jette à la figure de nos contemporains la dépendance des sociétés modernes, comparable à celle d’une fin de vie : l’autonomie n’existe plus.
« - Vous ne savez pas ce qui est arrivé ?, racontait Barjavel, dans Ravage. Tous les moteurs d'avions se sont arrêtés hier à la même heure, juste au moment où le courant flanchait partout. Tous ceux qui s'étaient mis en descente pour atterrir sur la terrasse sont tombés comme une grêle. Vous n'avez rien entendu, là-dessous ? Moi, dans mon petit appartement près du garage, c'est bien un miracle si je n'ai pas été aplati. Quand le bus de la ligne 2 est tombé, j'ai sauté au plafond comme une crêpe... Allez donc jeter un coup d'œil dehors, vous verrez le beau travail ! »
En 1943, ce scénario de science-fiction donnait déjà le vertige. Depuis, l’électricité et la technique portent toute une civilisation. La grande panne, régulièrement évoquée, fait trembler, et pas seulement les amateurs de sensations fortes au cinéma. Souvenez-vous : la menace de l’arrêt des ordinateurs, le 31 décembre 1999, a généré des milliers de contrats aux sociétés de service informatiques. Une pluie d'or. L’an 2000, c’est l’âge de pierre. On a encore, depuis, accéléré nos dépendances dans tous les domaines de la vie quotidienne.
Sur ces entrefaites, la guerre de l’énergie, animée par les États-Unis et la Russie, a brouillé les cartes et fait exploser les prix. La guerre en Ukraine et les délires écologistes ont fait le reste. L’homme des années 2020 découvre la précarité énergétique.
Écroulement
Barjavel ajoutait : « Je crois que notre civilisation approche d’une crise qui sera peut-être une fin de civilisation. Mais ce ne sera pas la première, il y en a bien eu d'autres », relativisait-il. Le fruit, selon lui, d’un faux « progrès ». « Un progrès accéléré vers la mort », disait-il. Les hommes « emploient pendant quelque temps [leurs] forces pour construire, puis un beau jour, parce que les hommes sont des hommes, c'est-à-dire des êtres chez qui le mal domine le bien, parce que le progrès moral de ces hommes est loin d'avoir été aussi rapide que le progrès de leurs sciences, ils tournent celle-ci vers la destruction. »
Vingt ans plus tard, en 1976, Barjavel ajoutait, à la télévision : « Imaginez ce qu’il se passe si tout à coup l’énergie s’arrête : c’est l'écroulement, c’est le commencement de la décomposition, c'est comme un corps où le sang ne circule plus. » On ne saurait mieux décrire notre temps. Et Bernanos ajoutait, dans le prophétique La France contre les robots : « Un homme gagné pour la technique est perdu pour la liberté. »
Il y a, derrière le mystérieux effondrement électrique espagnol, quelque chose du commandement du mercredi des Cendres : « Souviens-toi que tu es poussière. » La dépendance à l'énergie et à la technique court aussi vite que le ras-le bol qu'elle engendre. Une vis sans fin ?
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste
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91 commentaires
Et vive le tout électrique! Mais ce n’est qu’un galop d’essaie car demain, il peut en être de même pour tout le reste (internet, communications etc…) et ceci pour tester notre comportement comme ce fût le cas pour le COVID et préparer les…pandémies suivantes…Nous sommes à la merci de ceux qui ont les manettes pour déclencher tout ce cirque diabolique.
Il n’y a pas de manettes : cette panne est le résultat d’une trop grande proportion de génération électrique « fatale » (dépendante du vent et du soleil que l’on ne peut contrôler). Le réseau est tombé vers midi un jour de soleil, cela peut être dû à un excès de production photovoltaïque.
Ce qui est réellement inquiétant est quand l’opérateur du réseau affirme qu’il n’a pas identifié l’origine du problème…
Que ferons nous quand les chars (russes) à moteur thermique viendront alors que nos chars électrique seront à la recharge … pendant une panne générale d’EDF ???
Article magnifique et percutant !
J’aimerais pour ma part que les appareils électro- ménagers ne soient pas truffés d’électronique…L’expérience m’a appris à m’en méfier !
Eh oui, la conscience morale ne suit pas le progrès des découhvertes scientifiqjuues de l’Homme qui joue à l’apprenti- sorcier et il en résulte plus de catastrophes qyue de bien- être..
Désolée pour les lettres inopportunes qui se sont immiscées à mon insu…
Pas grave… votre ordi, craignant la coupure, a voulu mettre les bouchées doubles ! Vous êtes donc tout excusés — vous et votre ordi !
L’Europe des « lumières » serait-elle en train de s’éteindre comme une chandelle ?
Certains de mes cousins ont eu l’opportunité de faire construire, depuis moins de 10 ans. Grâce aux règlements (RT…) ils ont du équiper leurs maisons de chauffage électrique (même les poêles à pellets ont besoin d’électricité), production d’eau chaude électrique, plaques de cuisson électriques. Ma mère, qui avait connu la 2° GM et son cortège de misères, m’a toujours dit: tant que tu auras une cheminée, tu pourras y faire un feu, tant que tu auras une gazinière tu pourras préparer ton repas. J’ai conservé les 3 énergies.
Ce qui est le plus étonnant c’est qu’on ne connaît pas l’origine de la panne. Cette dernière a touché plusieurs pays avec des origines de production électriques différentes et le sud de la France a été touché alors que notre électricité vient en grande partie du nucléaire. Or il me semble bien qu’aucune de nos centrales nucléaires ne se soit arrêtée. Trouver l’origine de la panne me semble vital. Nous devons savoir si il faut faire provision de bougies. Et personne ne pense à la distribution d’eau du robinet si les centrales de recyclage des eaux usées n’ont plus de courant, nous risquons de n’avoir plus d’eau et pour ceux qui n’ont pas de puit cela risque de poser problème. Vive la modernité.
On ne nous dira pas l’origine de cette panne… Mais je crois avoir trouvé… C’est la faute à…Poutine!…Ben voyons!…
En continuant sur votre humour,je dirais Poutine, assisté d’Obi-one- Kenobi et Dark Vador.
Pour Boxer : et Voldemort (Harry Potter) !…
Un cadavre qui ne fumait pas de clopes ni ne roulait au diesel était donc « vert » (de verte jeunesse ?) et « propre »…en attendant les vers (oups ! ils avaient été flingués par ces salauds d’agriculteurs !)
Nos anciens (très anciens dans mon cas) préconisaient de ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier ! Comme nous avons perdu le bon sens depuis longtemps nous fonçons dans le mur. Sur les plateaux télé je n’ai entendu personne s’interroger sur ce qu’il y a lieu de faire pour éviter ce genre de catastrophe. Je parie que nous pas les vraies raisons de cet événement. Enfin il n’est pas nécessaire de disposer de beaucoup d’armes de guerre pour mettre un pays à genoux ! Avec nos gouvernants actuels il ne se passera rien !
Un réseau électrique décentralisé avec beaucoup d’alternateurs ayant des puissances voisines est très difficile à contrôler. Tous les spécialistes le savent et la stratégie de contrôle est un sujet de recherche scientifique actuel. (cf. les publications de Seddik Bacha le spécialiste à Grenoble) C’est peut être la cause de la panne.
Encore un coup des russes va nous dire notre Seine de la Pensée, nôtre messie cosmoplanétaire. Il ressort de cet incident une chose, la fragilité des systèmes mono énergétique d’autant plus que l’électricité est la plus vulnérable de part son mode de transport. Dans ma ruralité si décriée, un tel black out impacterait à la marge le gogos pourraient même continuer à regarder les chaines infos, ceux qui roulent au diesel et fument des clopes, boivent du gros rouge sont prévoyants …
Oui, bien vu, à la campagne on est prévoyant et méfiant. C’est ce que les pédants appelle la résilience.
Les Russes oui, avec aussi le Croque-mitaine, on l’avait oublié celui-là,
L’entreprise France (l’état français) n’a pas de notion de l’investissement en de rentabilité de celui ci il s’ingénie à prélever et a vendre le patrimoine sans aucune notion de rentabilité et surtout d’épargne pour faire face aux aléas. Pire il inflige aux entreprises des réglementations qui les tuent c’est ce qui est arrivé avec les centrales nucléaires et cerise sur le le gâteau il recycle les les personnes qui ont généré le chaos.elle est pas belle la France qui fait et défait pour ne pas avouer ses dérives idéologiques .
Tous ces « scientifiques » et « ingénieurs » fans de progrès techniques…..ça s’appelle en réalité des apprentis sorciers .
Voir l’affaire du covid et maintenant l’IA !!
Nous avons connu, dans le sud de la France, une panne électrique qui a durée environ 15 mn et qui donc était la conséquence du black-out ibérique. Mais, nous avions connu, ici, surplusieurs jours un problème similaire lorsqu’un engin de travaux public avait, par mégarde, sectonné un cable majeur. durant deux ou trois jours, plus d’électricité, mais plus aucun moyen de paiement électronique ou papier car il était impossible de tirer des espèces à la banque ! Dans les magasins et les grandes surfaces, tout devait être fait à la main ! Noter ce qui sortait faire une facture au client et impossiblilité de lire les codes tarifs… Plus d’internet, sauf sur batteries qui ne sont pas éternelles loin de là. Pareil pour les téléphones portables car les filaires, terminé. Alors le jour où, Dieu nous en garde, les voitures seront toutes électriquesn il sera même impossible d’aller au travail car 25 / 30 km avec un vélo dont la batterie est morte, il faut une sacré santé ! Surtout dans les pays montagneux et contre le vent ! A mettre tous les oeufs dans le même panier on se met litéralement la tête sur le billot ! Imaginez des ciber-attaques en série… Et faite le scénario…
Vous avez encore la tête sur les épaules…
Encore un mensonge d’Etat (des Etats ici) ! Ils savent très bien pourquoi ce black-out. L’explication est très simple grâce aux énergies renouvelables, ces « fameuses » énergies qui en plus de n’être pas écologiques du tout ont surtout le défaut de ne pas être pilotables. Une chute brutale de l’ensoleillement ou du vent et moins de production. Le réseau électrique est compliqué à conduire car il faut en permanence équilibrer la production et la consommation. Si vous n’avez pas assez de production, et que vous ne soulagez pas le réseau en coupant volontairement certaines zones, tout le réseau s’écroule. Cela est arrivé en France dans la fin des années 70 qui a conne un black-out suite à la panne de centrales électriques et suite à une « erreur » humaine.
Contrairement à ce qui était arrivé en France, le problème de ce black-out est précurseur de notre joli avenir dessiné par des incompétents bien aidés par nos chers escrologistes.
La chute n’est pas que civilisationnelle et morale, elle est aussi économique et technologique. Merci à tous ces escrocs et à ceux qui les ont élus
Je pense que vous êtes proche de la réalité. il suffit de se promener en Espagne pour être effaré du nombre de moulins à vents modernes polluant de splendides paysages, car toujours situés sur les points les plus élevés. Quand on connaît un peu les corvées d’équilibriste nécessaires pour injecter une électricité vertueuse mais aléatoire dans un réseau nécessairement stable, on a vite compris d’où vient et d’où viendront les pannes.
Si vous voulez savoir à quoi ressemble la vie sans électricité allez en Afrique où des régions entières ne sont pas alimentées et les coupures récurentes dans de nombreuses capitales. Et ce, sans sabotage ou intervention extérieure car l’incurie locale suffit. Nos gouvernants et autres écolos ont tout fait pour nous rapprocher de l’Afrique dans tous les sens du terme. Incurie endémique d’un côté et idéologie dévastatrice de l’autre.
Et en même temps, dans notre pays, il y a surproduction d’énergie dont on ne sait quoi faire et qui pose sérieusement problème. Surproduction qui au demeurant devrait entraîner une baisse des prix. Et en même temps, toujours selon l’expression consacrée, la fameuse PPE (pour une fois que nos gugusses planifient quelque chose !) continue à faire la part belle aux énergies alternatives, c’est à dire non pilotables ! Ce qui est arrivé au delà des Pyrénées peut très bien se produire chez nous, et à bien y réfléchir, je ne vois plus qu’une issue : que nos ténors parisiens et bruxellois, à l’instar de ce qui est prévu dans le cadre de la guerre en Ukraine, diffusent rapidement un nouveau kit de survie dont le titre serait » pour affronter les heures les plus sombres » !