Nous sommes tous consommateurs de halal (sans toujours le savoir)

62 % des abattoirs abattent des animaux sans étourdissement !
Capture écran My Mooc
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Interrogée mardi 4 février, sur CNews lors de l’émission Face à l’info, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blacker lance un pavé dans la mare : « L’abattage rituel en mode halal produit une quantité plus large de viande que celle qui est consommée sur le territoire. Le restant est distribué dans les supermarchés et les boucheries. Donc, nous mangeons de la viande halal qui n’est pas étiquetée comme telle. »

L’histoire de la certification halal remonte à 1964, lorsqu’un décret dit « d’abattage humanitaire » rend obligatoire l’étourdissement des animaux de charcuterie et de boucherie. Une exception est prévue pour l’abattage rituel halal et cacher. Le terme « halal » désigne, dans l’islam, tout ce qui est licite. Pour que la viande soit halal, l’animal doit être égorgé sans avoir été préalablement étourdi. Sa tête doit être tournée vers La Mecque et des paroles sacrées doivent être prononcées au moment de tuer la bête.

Mais ce qui n’était qu’une dérogation en 1964 se généralise. Dans des proportions insoupçonnées. Au point que nous serions tous des consommateurs de halal sans le savoir, soutiens involontaires d’un « djihad économique », comme vient de le décrire Mme Bergeaud-Blackler dans Le Figaro.

Une traçabilité inexistante

Contactée par BV, la chercheuse certifie ses propos : « Les viandes issues de l’abattage rituel peuvent parfaitement se retrouver dans le circuit de distribution conventionnel, grande distribution et boucheries. Rien ne l’empêche. Il est plus simple, pour des raisons économiques, de ne pas faire de distinction dans l’abattage. » Ainsi, à défaut de traçabilité, impossible de savoir ce qui se trouve dans votre assiette. « Le mode d’abattage n’est pas traçabilisé, confirme l’anthropologue. Cela dépend de la Commission européenne, qui a toujours refusé de mettre en place un étiquetage du mode d’abattage. » La raison de ce refus ? Elle est « en partie liée à l’industrie de l’abattage elle-même qui ne veut pas se compliquer les choses. Si vous mettez en place une traçabilité, vous devez anticiper les commandes halal au risque de ne pas satisfaire la demande. » Emballé, c’est pesé ! Pourquoi se contraindre, perdre du temps et de l’argent à distinguer les viandes selon l’abattage et informer le consommateur. Il ne manquerait plus qu’il donne son avis, maintenant !

Des abattoirs 100 % halal

Aujourd’hui, 240 abattoirs de boucherie sont agréés par les services du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. « En 2021, 62 % des abattoirs abattent des animaux sans étourdissement ! Et dans certains abattoirs visités récemment par nos auditeurs, la proportion de rituel atteint 80 % pour les ovins et 60 % pour les bovins », lit-on sur le site de l’OABA (Organisation pour l’amélioration du bien-être animal).

« En 2012, lorsque je travaillais plus spécifiquement le sujet, j’avais découvert que tous les abattoirs d’Île-de-France produisaient uniquement en mode halal », indique Florence Bergeaud-Blackler.

En 2015, dans son livre Bon appétit ! Quand l'industrie de la viande nous mène en barquette (Presses de la Cité), la journaliste Anne de Loisy insiste : « C’est même la conviction d’un grand nombre des professionnels de la filière qui, sous couvert d’anonymat, s’accordent à dire que l’abattage rituel concernerait en fait 8 à 9 ovins sur 10 et au moins 5 bovins sur 10. »

Et lorsque les parlementaires interpellent le gouvernement français sur la traçabilité de la viande, celui-ci répond : « Les obligations en termes d'étiquetage des viandes ressortent du domaine harmonisé des règles d'information fixées par l'Union européenne. »

Quand, au Parlement européen, la Commission est interrogée, celle-ci renvoie la balle aux États membres qui « peuvent déterminer la nécessité de prendre des mesures d'étiquetage et de contrôle appropriées afin de garantir que la viande concernée n'entre pas sur le marché général ». Quant aux courageuses associations de consommateurs, silence radio.

Pendant ce temps-là, le Français, décidé à soutenir ses éleveurs en péril, contemple, hagard, la vitrine de son boucher. Avec une légère impression d’être le dindon de la farce.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 20/03/2025 à 14:26.
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Yves-Marie Sévillia
Journaliste chez Boulevard Voltaire

Vos commentaires

175 commentaires

  1. Scandaleux ! et que fait le Gouvernement ? et les Ecolos ? qu’ont-ils à dire sur le sujet ? eux qui dernièrement protestaient contre les boules des lampadaires publics qui piègent mortellement les insectes ??? Qu’ils aient au moins le courage de leurs convictions !

  2. Belgique
    Wallonie et Flandre : étourdissement obligatoire
    Bruxelles : non-étourdissement autorisé. Normal dans le 1er califat d’Europe.

  3. Hélas ce n’est pas un scoop.
    De même , des animaux nés et élevés à l’étranger puis importés vivants en France, auront l’appellation « viande française «  car abattus en France

  4. J’ai mangé pour la première fois de ma vie une viande halal chez un « couscous sympa » dans une gargotte du 93 proche de Paris ou du 19ième/20ième – me souviens plus trop – lors d’un stage dans les entrepôts des Galeries Lafayette en 1973 (les collègues m’ont informé après, faute de m’avoir avertie, notamment un collègue juif séfarade): j’avais trouvé que la viande avait un goût bizarre, et plutôt dégueulassse (depuis, je ne mange que la semoule sèche, les pois chiches, éventuellement carottes, et les raisins secs). J’ignorais la torture infligée aux animaux pour obtenir cet aliment peu ragoûtant, et encore plus les risques sanitaires dont je m’étais toutefois doutée dans la gargote. Déja pas friande de viande dans mon enfance ( sauf poulet et cochon), je freine depuis de + en + sur la protéine « viande » dont la vue et l’odeur crue m’inspirent de la répulsion. Chapeau au passage aux chirurgiens pour leur courage (et leur insensibilité) !

  5. Contrairement à ce que dit Doris, il y a de la viande bio et halal !
    Tapez « viande bio halal » dans votre moteur de recherche…

    • Le label bio prend en compte le « bien être «  animal. Un abattage sans étourdissement est incompatible avec le bien être animal. C’est une décision de justice. Infos sur le site de l’OABA

  6. Il faut déjà avoir l’honnêteté de dire que le mode de tuage ne change strictement rien sur la qualité de la viande. Pour avoir un copain qui travaille justement sur une chaîne de tuage dans un abattoir, il m’a toujours confirmé que le tuage était à majorité halal et qu’un imam était payé par l’abattoir spécialement pour cela. MAIS qu’en même temps ce rituel n’a rien de solennel puisque tout ce que l’imam fait c’était de mettre en route la machinerie, d’appuyer simplement sur un bouton, sans même prier. En gros puisque c’est le doigt d’un imam qui a mis en route l’automate c’est halal, lorsque c’est simple un opérateur c’est conventionnel. Et il ne faut pas se leurrer, si les abattoirs tuent à majorité sans étourdissements, c’est tout simplement parce que c’est moins cher et plus rapide.

    • Pas d’accord. Des études ont montré que l’abattage rituel peut parfois favoriser la propagation des bactéries E coli. Ce n’est plus un principe vis à vis de l’animal, c’est la qualité du produit dont on parle.

    • He bien, non, cher connaisseur! La viande hala des gros animaux est TRES souvent polluée par la régurgitation de l’estomac de l’animal en train d’agoniser de 15 à 20 minutes. Des quartiers entiers sont retirés car la bactérie qui permet la digestion helicori bacter provoque les célèbres steacks hachés de triste mémoire dans les cantines et autres pizzas.

  7. Quand on pense aux myriades « d’inspecteurs » qui vont faire ch*** nos agriculteurs (50 contrôles/an +/-!) Ils pourraient peut-être consacrer un peu de leur (précieux) temps – 35 H par semaine tout de même, 42 semaine /An – à inspecter les zabattoirs non ?

  8. il devrait y avoir une loi/décret obligeant les vendeurs/détaillants à apposer sur tous les produits (viandes crues ou transformées) un label « certifié non halal » lorsqu’ils en sont exempts.

  9. Voici encore une distorsion de la législation française L 214 ça commence insidieusement pour finir comment ? Les valeurs éthiques de notre Civilisation sont battues en brèche par le communautarisme politique . Il ne faut pas s’étonner de ces manœuvres dont nos élites ferment le yeux pour avoir une relative paix sociale ainsi que des remontées électorales.

  10. Il y a bien eu des tentatives pour plus de traçabilité, mais ce n’est pas passé. On nous parle de bien être animal mais personne pour dénoncer ce mode d’abattage cruel. On nous parle transparence et information du consommateur mais rien sur cette question. Quant aux écolos qui veulent arrêter la consommation de viande, ils sont aussi aux abonnés absents. Il est temps d’exiger d’avoir cette information sur les barquettes de supermarché et dans les boucheries. En plus, je refuse de contribuer à leur culte.

  11. En France, on a une Assemblée qui vote des lois, et derrière, on a des lobbistes qui, pour ne pas les appliquer, imposent des dérogations specifiquement pour les musulmans. Ainsi, au nom de la laïcité on a supprimé le poisson le vendredi dans les cantines mais, pour les musulmans, on impose du Halal. Au nom de l’hygiène, on a interdit les caleçons et autres vêtements longs dans les piscines, mais, pour les musulmans on autorise les Burkini. Tout le monde, hommes ou femmes pouvaient se baigner dans les piscines, mais pour les musulmans on impose des jours uniquement réservés aux femmes. Les procession sont strictement réglementées, mais les prières de rues ne gênentpas les « autorités ». Les signes religieux ostentatoires sont interdits dans l’espace public, mais les abbayas et autre qamis ne posent aucun problème… De même la loi prévoit qu’il est interdit d’abattre un animal sans l’endormir auparavant, mais, pour les musulmans, ils ont le droit de les égorger et des laisser souffrir de longues minutes. « Y EN A MARRE ! »

  12. En France, l’étourdissement devrait être imposé sans dérogation possible et ceux qui ne sont pas d’accord, devraient devenir vegan ou quitter la France.

  13. Il faut ajouter le problème financier. l’imam qui assiste à l’égorgement est payé ce qui se matérialise par une taxe qui est bien sur répercutée aux consommateurs qui ainsi financent le culte musulman, et éventuellement juif lors des abattage kascher. C’est à mon sens par cette approche qu’il faut s’opposer à cette pratique. Si les musulmans et les juifs veulent un abattage religieux il doit être financé par les cultes et doit être rigoureusement tracé comme le bio.

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