Mobilisation générale des députés RN autour de Marine Le Pen

Boulevard Voltaire a suivi ce mardi historique à l’Assemblée nationale.
Capture écran Assemblée nationale
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Il est des journées où, par grande actualité politique, l’Assemblée nationale reprend sa parure de vieille et noble dame. Indubitablement, le mardi 1er avril 2025, au lendemain de la condamnation judiciaire de Marine Le Pen, était un grand jour, pour ce temple du parlementarisme français. Alors que sont entravées les espérances présidentielles de Marine Le Pen, plus que jamais, le RN sonne la mobilisation autour de son chef.

« Si j’avance, suivez-moi »

Comme tous les mardis matin, les députés RN participent à leur réunion de groupe. Autour de Marine Le Pen, ils font bloc. Exceptionnellement, le début des échanges se déroule en présence de la presse. Marine Le Pen est chaleureusement applaudie à son arrivée par les 123 députés du groupe. En ces circonstances exceptionnelles, ne manque à l’appel qu'une poignée d'élus. À la gauche de Marine Le Pen s’assied Jordan Bardella et, à sa droite, Renaud Labaye, son fidèle bras droit, secrétaire général du groupe des députés. S’exprimant en premier, le président du Rassemblement national mobilise solennellement les troupes, « rien ne nous empêchera de nous battre pour que nous arrivions au pouvoir », lance -t-il. Marine Le Pen, pour sa part, remercie ses collègues députés pour les « marques de soutien et d’affection » reçues. En pareilles circonstances, la famille politique n’a jamais mieux porté son nom. « Le système a sorti la bombe nucléaire », dénonce Marine Le Pen, avant d’encourager ses députés : « Ne vous laissez pas intimider, ne vous laissez pas démoraliser ! » Une fois la presse sortie, le discours se muscle et la stratégie s’affine. Un participant a confié à BV la combativité et la détermination contagieuses de Marine Le Pen.

« Une tyrannie des juges »

La séance des questions au gouvernement qui se déroule l’après-midi, comme chaque semaine, est le premier rendez-vous décisif pour la formation nationaliste. Elle est le temps fort de la vie politique française et, en ce jour, tout ce que la France compte d’observateurs politiques, de micros et de caméras se trouve au palais Bourbon. Trois députés parmi les plus fidèles ont été choisis pour prendre la parole et sonner la charge. Jean-Philippe Tanguy, député de la Somme, Laure Lavalette, députée du var, Sébastien Chenu, député du Nord, doivent porter l’estocade. Dans la salle des Quatre Colonnes, l’ambiance est électrique. Aux journalistes, le député socialiste de Seine-et-Marne Olivier Faure annonce « vouloir être à la hauteur d’un moment populiste ». Auprès de BV, le député RN des Vosges, Gaëtan Dussausaye, dénonce un « déni de démocratie » et « une tyrannie des juges ». Soudain résonnent les tambours de la Garde républicaine. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, remonte l’allée formée par les militaires et entre dans l’Hémicycle, transformé en arène. Le député Tanguy ouvre le bal et fustige « un quarteron de procureurs et de juges » qui « prétendent sortir du droit pour exercer la vendetta du système ». Laure Lavalette s'exclame « Marine Le Pen est condamnée car elle est Marine Le Pen », tout en fustigeant un « État de droit bafoué », avant d’affirmer énergiquement : « Cette attaque est un moteur supplémentaire dans notre combat. » Sébastien Chenu explique, quant à lui, que « la France s’abîme à l’international, en laissant s’abîmer notre État de droit ».

Marine Le Pen reste digne

Dans une ambiance surchauffée, chacune de ces prises de parole est conspuée, invectivée. Au milieu de ce pugilat, Marine Le Pen reste assise, stoïque, et, de temps en temps, dodeline de la tête pour montrer une désapprobation ou un satisfecit. Sur les bancs du gouvernement, Bruno Retailleau, le très droitier ministre de l’Intérieur, est assis à côté de François Rebsamen, ministre de l’Aménagement du territoire, figure historique du Parti socialiste. À quelques mètres derrière, Laurent Wauquiez, qui a posté, sur X, quelques heures auparavant, un message plein de fiel à l’égard de son concurrent à la présidence LR. La comédie humaine. Le bal des ambitions. À gauche, on s’insurge. Le socialiste Vallaud vante les « juges impartiaux dont notre pays a besoin », l’insoumis Tavel dénonce l’homme d’affaires « Bolloré, homme qui transforme ses médias en avocats de madame Le Pen ».

Éric Ciotti prend, lui aussi, la parole et s’indigne : « La France est-elle encore en démocratie ? » En dénonçant une « peine de mort politique », le député maralpin annonce, sous les applaudissements nourris des députés RN qui se lèvent comme un seul homme, déposer « une proposition de loi pour supprimer l'exécution provisoire pour les peines d'inéligibilité ». Interpellé, le ministre de la Justice Gérald Darmanin reste imperturbable et souhaite un procès en appel « dans un délai le plus raisonnable possible » et vient au soutien des « magistrats menacés ». Le Premier ministre, pour sa part, a ouvert la porte à une « réflexion » parlementaire à propos de l’exécution provisoire. À la sortie, interrogé par BV, le député UDR des Bouches-du-Rhône Gérault Verny se dit « révolté », tout en ayant bon espoir que face à une « manœuvre grossière » de « juges massivement politisés », la proposition de loi d’Éric Ciotti soit adoptée. Rendez-vous le 27 juin, lors de son examen. À l’Assemblée, jour I d’un paysage politique bouleversé.

Picture of Yves-Marie Sévillia
Yves-Marie Sévillia
Journaliste chez Boulevard Voltaire

Vos commentaires

86 commentaires

  1. Cet événement est peut-être, finalement, un mal pour un bien au RN. Les petits accommodements et autres renoncements commandés par une recherche permanente de respectabilité voire, de dédiabolisation, ont manifestement fait long feu. On va maintenant, et enfin, peut-être comprendre qu’il ne sert à rien d’édulcorer ses positions pour se plier à un jeu politique dont on croit devoir respecter les règles définies par ceux qui ont le pouvoir de vous abattre. L’inéligibilité de MLP devrait avoir ça de bon qu’elle ne peut que renforcer la combativité du RN et drainer vers lui une masse toujours plus importante de Français indignés et inquiets de ce que devient la démocratie dans notre pays. Selon que vous serez Bayrou ou MLP, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir…

  2. 2 coups d’état en 8 ans! Les petits pois pastèques font très fort. Après Fillon et Le Pen , à qui le tour? je les remercie de ne plus rendre la justice en mon nom. Je n’attends plus qu’un Bonaparte pour nettoyer toute cette fange.

  3. ce que les juges ont faits est indignes d’hommes de loi sensés être apolitique, ce qui dans le cas de Madame Le Pen est au contraire hautement politique.

  4. Des juges impartiaux qui ont condamné vite fait à la veille du scrutin national M.Fillon, candidat de droite annoncé en tête et ont blanchi les responsables du »sang contaminé »qui a tué tant d’innocents ?

  5. Enfin ça recule, mais restons vigilant cette justice vicelarde est capable de tout , malgré que je pense qu’elle est bien pilotée par le Roi !

    • Problème, cette reculade n’est due que par l’indignation populaire sans çà, combien de petits, de sans grade, de gens qui ne représentent rien se verraient laminés, jetés aux lions. La justice est devenus un rouleau compresseur et depuis trop longtemps.

  6. Ce qui est choquant ce sont les jugements à la tête du parti politique.En 2017, Macron fait une fausse déclaration de patrimoine caricaturale qui relève du code pénal et la HATVP et le parquet financier dûment informés ont refusé de le voir alors que parallèlement ils poursuivent dans des délais ultras rapides des poursuites contre Fillon pour avoir embauché son épouse comme attachée parlementaire, ce qui n’était pas illégale et pratiqué par plus de 100 parlementaires. Par ailleurs pour des pratiques similaires Bayrou n’a pas été inquiété et probablement tous les partis politiques ont fait la même chose. Cette situation confirme que nos « démocraties » prétendument garantie par un état de droit est dans les faits une ploutocratie en self service protégée par la magistrature. Comme les juges décident au nom du Peuple, le Peuple doit pouvoir les contrôler avec des jurys populaires comme en cours d’assise.

    • On notera toutefois que si les juges ont rendu un jugement politique visant à abattre MLP, ils ne l’ont pas fait avec toute la malice qu’ils auraient pu y mettre. En effet, sans application immédiate de la peine, MLP pouvait continuer à croire que les juges n’oseraient pas la rendre inéligible à la veille des présidentielles. Dans le cas présent, le RN sachant désormais à quoi s’en tenir, c’est donc de 2 ans dont il dispose pour organiser le remplacement de MLP. Et ça, c’est beaucoup plus efficace et mobilisateur que de le gérer comme une hypothèse à laquelle on ne veut pas vraiment croire.

    • Totalement de votre avis. Votre commentaire explique très bien ce qui se passe depuis un certain temps et permet de constater cette 1 justice dépravée à la botte d’un petit roi qui se prend pour un dieu.

  7. Faut pas oublier que les juges ont suivi les réquisitions du parquet, qui sont aux ordres de Macron…C’est l’allemand scholz (?) qui est à l’origine de la plainte, ils s’attaqueront systématiquement à tous les « populistes »…Cette Europe est une dictature qui ruine toutes les nations, économiquement et culturellement…

  8. Tous les opposants au RN peuvent vociférer leur haine reste que ce verdict est politique, les paroles des magistrats à l’égard de Marine le Pen le prouvent incontestablement. Que se passerait-il dans la rue si c’était Melenchon condamné de la sorte ?
    Les 11 millions d’électeurs vont devenir à coup sûr au moins 15. L’effet escompté va sûrement faire le coup d’un boomerang monumental. Divers députés de la gauche imbecile se sont réjouis à l’assemblée nationale en donnant des leçons de morale confirmant la sentence appliquée. Ils ont oubliés que la loi est pour tous même si elle semble à deux vitesses.

  9. Voilà le résultat de la politique de de diabolisation de MLP, après des années de soumission à la doxa ambiante : l’Europe, l’Ikraine, sa politique de gauche, son refus d’une alliance des droites, l’abstention qui fait élire Ferrand au Conseil Constitutionnelle… Fini les convictions, il n’y a plus que calcul politique… La conquête du pouvoir a un coût. Si cela semble fonctionner en nombre d’électeurs, la France n’y gagnera rien…a quand la prochaine Motion de censure.??

  10. Nous connaissions des putschs sanglants, la révolution islamique en Iran, la Révolution Orange en Ukraine, la Révolution des Œillets au Portugal, la Révolution de Velours en Tchécoslovaquie, voici la Révolution en Hermine ! Nos juges, ne sont certes pas devenus des faiseurs de rois, mais des faiseurs de présidents. « Et la démocratie dans tout ça ? » Me demanderez- vous. Eh bien quoi, la démocratie ? Quand le peuple stupide vote mal, il faut bien que quelqu’un rétablisse l’ordre, n’est-ce pas ? Et si cela ressemble à la définition de la dictature, il ne s’agit là bien sûr que d’un sentiment de dictature, tout comme le sentiment d’insécurité. Que voulez-vous, le peuple Français est un peuple très sentimental, c’est bien connu. Inutile de chouiner pour si peu, le bon côté des choses, c’est qu’en 2027, le choix sera vite, pas d’hésitation dans l’isoloir … pour ceux qui s’y rendront encore. De fait, la prochaine élection sera celle des législatives, juste après la présidentielle … si d’ici là nos juges bien intentionnés ne désignent pas d’autorité une assemblée nationale pour épargner aux Français le tracas d’une élection supplémentaire. L’ingratitude des Français est vraiment incompréhensible devant tant de bienveillance.

  11. Jean-Philippe Tanguy est un naturel orateur né, j’ai rarement vu et entendu un jeune homme politique posséder un tel talent, en général, il fait tellement mouche, que les « bancs-de-la-gauche », et hier le premier ministre soi-même, n’ont droit à la parole, tant les flèches sont affûtées, et surtout avisées.
    Laure Lavalette et Sébastien Chenu ne sont pas en reste, tous deux savent aussi viser là où ça fait très mal, et où la contradiction n’a pas sa place.
    Quand à Jordan Bardella, le discours est toujours posé, réfléchi, et l’art tranchant de retourner les arguments vers son interlocuteur, laissant très souvent ce dernier sans arguments, un délice.
    La condamnation à mort politique de Marine Le Pen est si manifeste, si grossièrement apparente, que même les tribuns de l’opposition parés de rose pâle, de rouge vif ou de vert-de-gris, ont un mal fou à cacher leur embarras, leur perplexité emballée dans des emphases emberlificotées, tressées de mots et phrases de circonstance.
    Ce n’est que le début, Bénédicte du Perthuis n’a pas fini d’avoir les oreilles qui sifflent, les retours sur son passé font déjà les unes, et sa surveillance embarrassante.
    Second acte, Paris le 6 avril à 15 heure Place Vauban, on ne peut mieux trouver en matière de défense !

    • Je ne suis pas sûre que ce second acte soit souhaitable. Appel accepté au cours de l’été, ce qui est déjà une victoire.

  12. On peut aussi dire que les juges n’ont fait qu’appliquer la loi faite par les députés, qui on peu le dire n’ont manifestement pas une grande capacité de réflexion, il faut toujours penser aux effets annexes d’une loi.

    • Parce qu’on légifère sur un fait divers ou sur une affaire, alors que les lois existent déjà … mais ne sont pas appliquées. C’est bien la première fois qu’une loi est appliquée avec autant de vigueur et de rigueur … pour ne pas parler d’aveuglement. Si tous nos juges étaient aussi sévères avec nos délinquants et l’exécution des OQTF, quel paradis serait notre pays !

    • Non, ils l’ont « interprétée », nuance ! Suivre bêtement un mini paragraphe dans un recoin d’une loi : Des lois, ça se casse, quand elles sont mauvaises ; mais avec notre ramassis de guignols plus ou moins mal élus, on est dans un beau foutoir dans le panorama actuel d’un semblant de  » demo-cratie »…

  13. Mr Bardella ,il reste vous deux ans pour faire ce qu’on tenté de faire Mr Philippot et Mr Dupont Aignan, l’union des droites, des vrais ,celle des patriotes, des freixiteurs: Mrs Asselineau, Zemmour, Philippot, Dupont Aignan, et a vous tous « ils » pourront faire toutes les magouilles qu’ils voudront, ça marchera pas. Le tout est de prouver aux sceptiques que nous avons raisons. Soyez le Trump de la France, le Trump dont la France a urgemment besoin.

  14. Le RN n’est pas le parti de l’ordre qu’il prétend être mais le parti du désordre. Le soutien de Mélenchon, alias « la république c’est moi », est révélateur. Souvenez vous que, lorsqu’elle a été perquisitionnée en 2016, Marine a filmé les policiers avec son portable et que, lorsque ceux ci lui ont demandé d’arrêter et de remettre son téléphone, elle l’avait mis dans son soutif et leur disant de venir le chercher. Sa condamnation est une opportunité pour voter en 2027 pour un candidat qui rassemble plutôt que pour le repoussoir Le Pen.

    • Si c’est pour choisir entre Xavier Bertrand et François Hollande, je préfère rester chez moi et me réserver pour les législatives. Parce qu’en matière de repoussoir, il y a pire que la fille Le Pen !

  15. Cette mobilisation des députés et la colère des sympathisants semblent avoir portées ses fruits puisque le procès d’appel se fera en 2026 bien avant les élections, et je suis convaincu qu’après le tollé qu’a suscité les sanctions notamment l’inéligibilité de MLP de part le monde, l’issue du procès sera différente et que MLP pourra se présenter.

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