Lola, Philippine : Bruno Retailleau s’attaque aux laissez-passer consulaires

Le ministre exige la réciprocité entre visas et laissez-passer consulaires. Mais cette mesure est-elle suffisante ?
Capture d'écran LCP
Capture d'écran LCP

Deux ans après le meurtre de Lola, jeune fille de 12 ans, et un mois après celui de Philippine, âgée de 19 ans, par deux individus sous OQTF, la question de la gestion de la crise migratoire et de la violence qu'elle engendre fait (enfin) débat. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, entend réagir fermement.

Conditionner la délivrance de visas à l’obtention de laissez-passer consulaires

Le ministre propose enfin de jouer sur les tarifs douaniers à l’échelle européenne pour les pays refusant d’accueillir leurs ressortissants forcés, par les lois de la République, à quitter le territoire français pour rentrer chez eux. Cette mesure est accompagnée d’une volonté d’accroître les accords bilatéraux avec les pays d’émigration. Pour l’ancien sénateur Les Républicains, « la butée dans notre maîtrise de l’immigration, notamment pour l’éloignement, ce sont les laissez-passer consulaires ».

Premiers concernés, du coup : les pays d'origine. En droit international, la notion de base repose sur la réciprocité, rappelait Bruno Retailleau, en commission parlementaire. La réciprocité devrait donc s'opérer entre les visas délivrés par la France et les laissez-passer consulaires accordés par les pays d'origine des délinquants étrangers. Ce levier de pression en faveur de la France - la délivrance des visas - doit être actionné si le dialogue avec les nations concernées ne suffit pas. Avec cette mesure, le ministre compte instaurer un nouveau rapport de force avec les pays qui refusent de reprendre leurs ressortissants. La volonté politique, qui a longtemps manqué, est indispensable à la réussite de cette démarche. Suffira-t-elle ? L'ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, interrogé par nos soins, estime que la réciprocité ne sera pas suffisante pour renverser le rapport de force. « Il faut que la liberté de circulation prévue dans les accords de Schengen au profit des étrangers disparaisse. Car aujourd'hui, si la France réduit les visas, les étrangers iront dans les consulats espagnols ou italiens : ils seront assurés d'obtenir un visa Schengen qui sera valable pour la France », explique-t-il.

Réciprocité ? Devant les députés de la commission des lois, Bruno Retailleau s’appuie sur l’exemple de l’Algérie. Selon lui, quelque 200.000 visas sont délivrés, en échange de moins de 2.000 laissez-passer consulaires, seulement, en retour. En 2023, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, 241.571 visas ont été accordés au Maroc, ce qui représente 69 % de plus que pour l’année 2022. Et 97.858 à la Tunisie (+13 %). Cette hausse n’a pas été accompagnée d’une hausse d’exécution des OQTF, qui stagne en dessous de la barre des 7 % depuis 2020.

Le Maroc et l'Algérie sont respectivement sur les deux premières marches du podium des nationalités les plus concernées par les obligations de quitter le territoire français. Xavier Driencourt évoque le statut particulier de l'Algérie : « Les accords d’Évian, en effet, prévoyaient la libre circulation, notamment pour les pieds-noirs dont on pensait qu’ils resteraient en Algérie. Or, ceux-ci ayant quitté l’Algérie, la libre circulation n’a concerné que les Algériens ». Il poursuit : « L'accord de 1968 ne rétablit pas la libre circulation mais il accorde aux Algériens des privilèges que n’ont aucun des autres pays, ni le Maroc ni la Tunisie. Privilèges en matière de regroupement familial, de titres de séjour, de régularisations, de visas étudiant, de visas de commerçant, etc., que les ressortissants algériens sont seuls à posséder ».

Il y a deux facteurs bloquants, dans ce dossier de l'immigration irrégulière ou clandestine, poursuit Xavier Driencourt : « Une OQTF n'est qu'une invitation et non une obligation de quitter le territoire, précise-t-il. Si vous êtes en situation irrégulière et que vous faites l'objet d'une OQTF, vous disposez de 30 jours pour faire vos valises. Évidemment, pendant ce délai, ces personnes disparaissent dans la nature ». Par ailleurs, impossible pour la France de décider unilatéralement du sort des étrangers qui ont violé nos lois et nos frontières : « Pour reconduire un étranger dans son pays, il faut l'accord du pays en question. Par définition, cet étranger a détruit ses papiers afin de cacher sa nationalité ».

Bruno Retailleau évoque des mesures précises pour encadrer l’immigration

Le locataire de la Place Beauvau a indiqué plusieurs axes d’amélioration pour limiter l’immigration clandestine. Entre autres, Retailleau évoque le rétablissement du délit de séjour irrégulier, aboli sous François Hollande en 2012. La loi Immigration de 2024 a réintroduit cette notion, avant que le Conseil constitutionnel ne la retoque. Bruno Retailleau entend aussi mettre en place une prolongation de la durée de rétention en centre de rétention administrative (CRA) jusqu'à 210 jours, contre 90 jours aujourd'hui. De plus, les préfets seraient tenus de faire systématiquement appel lorsqu’un migrant est libéré d’un CRA. De quoi serrer la vis. Suffisamment ?

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Raphaelle Claisse
Journaliste stagiaire à BV. Etudiante école de journalisme.

Vos commentaires

58 commentaires

  1. Il faut que ce soit un ambassadeur qui explique le marché de dupe des visas consulaires et la nocivité de l’UE ! Comme quoi, les « gesticulations » de retailleau ne sont que de la posture !

  2. C’est curieux de poser la question de savoir si les mesures voulues par Brunaud Retailleau seront suffisantes, peut-être pas, mais elles ont l’avantage d’exister, ce qui n’était pas le cas avant, alors ne soyons pas négatifs à priori.

  3. tout les bateaux (tunisie,algerie et maroc) qui accostent en France devraient etre oblige de recuperer les oqtf
    sinon le bateau reste bloque dans le port

  4. Rien ne pourra se faire tant que la gauche anti France sera aux postes clés du pouvoir (Conseil Constitutionnel, d’État, Justice, etc) avec complicité plus ou moins tacite du parti présidentiel

    • C’est une évidence. Fabius au conseil constit., Moscovici à la cour des comptes, Migaud à la justice. Retailleau peut essayer de se démener, la vieille Mitterrandie socialo continue de tenir bien serré les rènes de cette république voulue ptogressiste, avec les compliments du socialiste-caméléon Macron. Quand la Gôche s’empare du pouvoir, elle ne le lâche plus ! Et on commence à entendre le bruit d’une prochaine succession (pour 9 ans) de Fabius par… Dupont-Moretti… ou à défaut par… Migaud !!! On ne change pas une équipe qui conduit le pays à sa perte !

  5. JDNEWS 2 au 8 octobre Pascale Piera juge des libertés et de la détention pendant cinq ans devenue eurodéputéE RN
    La France doit négocier des accords bilatéraux fondés sur des principes de réciprocité , visas et aides au développement doivent clairement être conditionnés aux retours des OQTF
    A l’échelle européenne on doit refondre le code des frontières Schengen afin de permettre à la France de contrôler ses frontières intérieures sans condition , pour nous permettre d’interdire l’accés à notre territoire de tous les ressortissants illégaux .
    Il faut modifier la « directive retour «  qui impose aux autorités nationales d’accorder une période de « départ volontaire » aux clandestins .
    Ne pas accepter que l’UE nous impose dés le 15 octobre 2025 des quotas de délocalisation des demandeurs d’asile sous peine d’une amende de 20 000 euros par migrants refusés .
    Sur le plan national l’augmentation des temps de rétention doit être considéré afin d’avoir le temps d’obtenir les LPC . En France délai de 90 jours en Allemagne 18 mois .

    • 1 visa pour 10 laissez passer consulaires jusqu’à épuisement du stock…suppression totale des aides au développement,puisque ces pays sont  » developpes ».. suppression de tous les avantages pour l’algerie..

  6. Il faut aussi : supprimer les subventions aux pays refusant de récupérer leurs racailles sous OQTF. Et faire une prison aux iles Kerguelen comme centre de rétention, (le climat y est vivifiant), ….. et à mon avis, ils vont vite demander à leurs pays d’origine de les rapatrier !

  7. Si les autorités des pays d’origine des délinquants traînent les pieds en matière de laisser-passer consulaires, on imagine que l’administration française pourrait en retour traîner des pieds pour certaines démarches administratives, visas ou autres. Je suis certain que nos zélés fonctionnaires seraient capables de ralentir le mouvement si on leur en donnait l’ordre. On a aussi évoqué de limiter les transferts d’argent via Western Union (ou autres) de la France vers les pays en question. Supprimer ou réduire drastiquement les aides au développement vers ces pays est une autre possibilité. Les moyens de pression ne manquent sûrement pas si on creusait un peu la tête. Mais la volonté y est-elle ?

  8. Les avantages dont bénéficie l’Algérie doivent être revus , intolérable que ce pays qui a voulu le départ des français ose aujourd’hui profiter de nos largesses . Nous ne leur devons rien , nos impôts ont suffissamment permis de bâtir ce pays et qu’ont ils fait de tout celà , même pas capable de l’entretenir . Il faut arrêter toutes ces allocations , ces subventions à ce pays et à bien d’autres encore . Combien de pays ont vu leur dette effacée par la France qui n’a pourtant plus les moyens de dilapider ainsi l’argent du contribuable . Fini les mesurettes mais de vrais actes dans tous les domaines . Le peuple ne peut plus continuer à travailler pour les autres .

    • effectivement nous ne devons rien, à l Algérie Et surtout comme le veut le pouvoir nous ne devons pas les indemniser pour le passé, nous devrions donc demander aux britanniques d avoir brulé Jeanne d Arc

    • A 600-700€ la journée, ça fait un beau budget : 126.000 – 147.000€ par tête. Ça en fait des hôpitaux, enseignants, ….

  9. Déjà supprimer la loi de 1968.
    La politique de fermeté sur les visas fonctionne bien avec l’algerie .
    En 1017 , 4000 algériens avaient « oublié  » de repartir de la Mecque..disparus dans la nature .
    Les saoudiens ont menacés le gouvernement algérien de supprimer tout Visa pour le pèlerinage pour l’année suivante.
    En 2 semaines tout les algériens clandestins étaient retrouvés et reparti vers Alger

  10. La solution est pourtant facile au sujet de l’application des OQTF ! …
    En CRA sans durée limite ! … Point barre
    Un charter réquisitionné sur les compagnies des pays de provenance ! … Pas d’accord = Blocus total avec les pays « réfractaires » …

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