Les arguments tordus de Macron pour ne pas retirer la Légion d’honneur à Sarkozy

Emmanuel Macron a donc tranché : il n’exclura pas Nicolas Sarkozy de l’ordre de la Légion d’honneur (et donc, aussi, de l’ordre national du Mérite). L’ancien président de la République, après le rejet de son pourvoi en cassation, le 18 décembre 2024, a été condamné définitivement à trois ans de prison, dont un an ferme, sous bracelet électronique, pour corruption et trafic d’influence, dans l’affaire dite « Paul Bismuth ». Or, l’article R91 du Code de la Légion d’honneur, de la médaille militaire et de l’ordre national du Mérite est formel : « Sont exclues de l'ordre : 1° Les personnes condamnées pour crime ; 2° Celles condamnées à une peine d'emprisonnement sans sursis égale ou supérieure à un an. » Nicolas Sarkozy entre évidemment dans cette seconde catégorie. Début mars, lors d’une conférence de presse, le général d’armée François Lecointre, grand chancelier de la Légion d’honneur, avait déclaré que cette radiation de nos ordres nationaux était « de droit ». Le grand maître de l’ordre national de la Légion d’honneur qu’est le chef de l’État a donc décidé de passer outre le droit. Étonnant, de la part de celui qui brandit à tout bout de champ, comme un étendard, l'« État de droit » !
Certes, on peut considérer, comme Philippe de Villiers, qu’avec ce rejet du pourvoi en cassation dans cette affaire « Bismuth », c’est « le mur des cons qui a gagné ». On a pu parler d'un véritable harcèlement judiciaire à l'encontre de Nicolas Sarkozy, d’autant plus frappant qu’ont été pris en compte par la Justice des échanges téléphoniques qu’il avait eus avec son avocat. « Nicolas Sarkozy ne peut pas être pénalement condamné sur le fondement d’échanges qu’il a eus avec son avocat », avait déclaré l’un de ses défenseurs. Cela a pourtant été le cas. Mais, la condamnation définitivement prononcée, la loi ne doit-elle pas s’appliquer ? Or, c’est ce que refuse de faire Emmanuel Macron, pourtant garant des institutions.
Le respect dû aux anciens Présidents
Et l’on ne peut que s’étonner des arguments qu’il a avancés pour justifier le fait qu’il ne signera pas le décret d’exclusion. « Je pense que c’est très important que les anciens Présidents soient respectés », a déclaré le président de la République, en déplacement à Madagascar, considérant « que ce ne serait pas une bonne décision ». Un argument qui, sur le plan du droit, ne tient évidemment pas un instant : tous les membres de l’ordre, des plus prestigieux aux plus humbles, méritent qu'ils soient respectés, jusqu’au jour où ils sont réputés moins respectables... De même, sont tout aussi discutables les arguments des avocats de Nicolas Sarkozy qui avancent qu’il faut séparer l’homme de la fonction. En effet, le président de la République, une fois son élection validée par le Conseil constitutionnel, est de jure grand-croix de la Légion d’honneur et de l’ordre national du Mérite (article R8 : « La dignité de grand-croix est conférée de plein droit au grand maître »). Cette dignité n’est pas temporaire mais acquise, le mandat terminé, avec les droits et prérogatives mais aussi avec les devoirs attachés à la qualité de membre de l’ordre.
Deuxième argument avancé par Emmanuel Macron pour justifier sa non-décision : Nicolas Sarkozy « a été élu par le peuple souverain ». Un argument que l’on a peu entendu, chez les macronistes, lors de la condamnation de Marine Le Pen avec exécution provisoire. La loi, toute la loi, rien que la loi et, bien sûr, le fameux État de droit, nous avait-on rabâché !
Ah, l'Europe !
Troisième argument : Nicolas Sarkozy a certes « épuisé les voies de recours en France » mais il a saisi la Cour européenne des droits de l’homme. Ah, l'Europe ! Macron laisse ainsi entendre que la CDEH (instance émanant du Conseil de l'Europe et non de l'Union européenne) serait en quelque sorte une cour suprême supranationale pouvant casser la condamnation prononcée par la cour d’appel. Ce qui est faux. La CEDH peut, au mieux, si elle juge que les droits fondamentaux de Nicolas Sarkozy ont été violés, condamner l'État français à l’indemniser. C’est seulement à l’appui d’une telle décision que Nicolas Sarkozy pourrait alors demander un réexamen de son affaire. Quoi qu’il en soit, l’éventualité (relativement lointaine : plusieurs années) de ce réexamen ne remet pas en cause l’exécution définitive de la peine actuelle avec, que cela plaise ou pas, les conséquences prévues par le Code de la Légion d’honneur.
Quatrième argument d’Emmanuel Macron, et c’est le pompon : Nicolas Sarkozy a d’autres procès en cours. C’est quoi, le rapport ?
Au final, on aura compris que l'argument suprême d'Emmanuel Macron se résume à la célèbre formule : « Car tel est notre bon plaisir. » Mais il fallait aller jusqu'au bout de la logique régalienne : user de la grâce présidentielle que lui confère la Constitution. Au moins, les choses auraient été plus claires et cela aurait eu de la gueule.
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90 commentaires
Mon cher colonel, même si vous avez raison sur le fond, cette décision de ne rien faire du président actuel montre 2 choses:
– tout d’abord que lui-même ne croit pas vraiment en la culpabilité de monsieur Sarkozy, ou du moins aurait tendance à l’excuser,
– ensuite, que son mandat se terminant bientôt, il sait pertinemment que des temps houleux l’attendent vu ce qu’il n’a cessé de faire et qu’il espère qu’ un prêté lui sera rendu…..peut-être.
Vu ce que j’ai vu… Ce serait presque un honneur de ne pas avoir la Légion d’honneur et je ne parle pas de Sarko…
Pour une fois, je suis d’accord avec M. Macron : Nicolas Sarkozy fait l’objet d’un véritable harcèlement judiciaire ;je pourrais même dire vengeance.
Rien ne justifie de retirer la LH à l’ancien président de la République. Le droit? Oui, mais quand son application est douteuse, le doute doit profiter à l’accusé… Si je puis dire.
De là à la remettre à Beaune, l’un de ses petits protégés !
Le président aurait du gracier Nicolas Sarkozy de la peine de prison prononcée par la justice, il en avait constitutionnellement le pouvoir, par contre son bavardage pour ne pas appliquer le code de la légion d’honneur est inaudible et infamant. Emmanuel Macron est donc soit mal conseillé soit se considère au dessus des lois. Je penche pour la seconde hypothèse.
Voilà qui prouve la corruption d’attribution d’un « hochet » créer par l’Empereur!
A moins que Macron n’anticipe sa propre situation lorsqu’il ne sera plus président de la république
CQFD !
Ce n’est pas faux !
Le locataire actuel de l’Elysée n’est pas là pour faire respecter la Constitution et il est bien triste de constater que même en 2022 certains ne l’avaient toujours pas compris.
La justice française est tellement immonde (y compris celle des tribunaux administratifs, (dans l’affaire de l’autoroute A69 ou dans celle du lycée Averroès) que toutes les occasions de la contrarier sont bonnes en attendant d=sa dissolution complète, et l’incarcération, fauter de mieux, de la caste répugnante du syndicat de la magistrature.
C’est donc pourquoi la propension à se voir retirer « ses décorations » acquises est inversement proportionnelle à celle de s’en voir attribuer une, un jour. D’autant que président un jour, ne signifie pas président pour toujours, n’est-ce pas Messieurs les présidents ?
Il a gagné, le Mur, en faisant accroire que N.Sarkosy était de Droite. Il ne peut être de Gauche puisqu’il est condamné. Tous les cocus de France (dont moi), qui ont voté pour lui trompés par un discours de Karcher et un beau comportement en ses débuts, cesseront de croire aux attitudes !
He oui! Il a le pouvoir du bonimenteur de foire!
Rassurez-vous, vous n’êtes pas autant cocufié que vous le croyez, puisque dans ce cas vous seriez le dernier à l’apprendre. CQFD.
Les marchands du temple et les judas tous copains et frères .
Tous en Tablier!
Napoléon l’inventeur de la Légion d’Honneur dit à l’un de ses Généraux: » cher Ami c’est avec ce genre de breloque que l’on mène des hommes « !
L’Empereur était expert!
Pas mal, pas mal .
On verra ce qu’il fera pour MLP.
Là, pas de problème!
Peut-être que Macron ne veut pas insulter l’avenir, on ne sait jamais…
Il a bien raison il ne faut préjudicier de rien!