Le Festival de Cannes forcé d’expliquer ce qu’est la « tenue correcte exigée »

Est-ce le retour du conservatisme et du contrôle du corps des femmes, ou un simple rappel de bon sens ?
@Georges Biard - Wikimedia Commons
@Georges Biard - Wikimedia Commons

Voici que s'ouvre le 78e Festival de Cannes. L’invitation qui auparavant ne mentionnait qu’un laconique « tenue correcte exigée » a, cette année, précisé ce que « correct » implique.

Dans la Charte du festivalier, on peut lire que « les tenues, en particulier les traînes longues dont le volume entrave la bonne circulation des invités et complique l’assise dans la salle, ne sont pas autorisées ». Davantage de sobriété, donc, et surtout un peu moins de cette extravagance qui gêne les voisins au prétexte de vouloir à tout prix se faire remarquer. Ce n’est pas la seule précision, et la deuxième a encore plus fait bondir : « Pour des raisons de décence, la nudité est interdite sur le tapis rouge, ainsi que dans toute autre zone du Festival. » La « décence », quel gros mot ! Le magazine Elle s’interroge : « Assiste-t-on à un retour à l’ordre moral, à une nouvelle ère de puritanisme sur la Croisette ? » Car des tenues provocantes peuvent être, continue le magazine, « un outil de réappropriation du corps, une forme de liberté et d’expression féminine. La naked dress [comprenez : une « robe nue » plus révélatrice que suggestive] n’est pas qu’un effet de mode : elle peut aussi être un geste militant, une manière de bousculer les codes et d’interroger les normes imposées aux corps féminins. »

Horreur ! Enfer et damnation ! Ne serait-ce pas le retour de l’infâme contrôle du corps des femmes par l’innommable patriarcat ? Elle parle d’un « tournant conservateur à confirmer » et explique que « ce qui se joue ici va bien au-delà d’une simple question de tissu ou de traîne : c’est une bataille symbolique entre image maîtrisée et liberté d’exister. Le tapis rouge de Cannes a toujours été une scène, un théâtre d’apparitions et de revendications. Reste à voir si, sous couvert de décence, on ne cherche pas à faire taire certaines formes d’expression. » Ou alors, on comprend simplement ce que « tenue correcte exigée » signifie… que la robe transparente est plus une tenue de plage qu’une tenue de gala, que la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres et qu’a priori, se promener à moitié nu dans n’importe quel autre endroit que sur le tapis rouge de Cannes vous exposerait à un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende.

« Trumpisation et conservatisme dans la mode » ?

Oui, mais voilà, les stars sont là pour se montrer, et certaines en montrer le plus possible puisque, comme l'écrit Le Parisien, « celles qui l’osent s’assurent une exposition médiatique ». On peut se demander où est la transgression ? Quels codes bouscule-t-on ? Puisque, manifestement, le phénomène est devenu une mode... Cette mise au point, comme le rapporte encore Le Parisien, citant l’AFP, ne fait qu’« explicite[r] des règles déjà appliquées de longue date ». « Il ne s’agit pas de réglementer les tenues vestimentaires mais d’interdire la nudité totale sur le tapis rouge. » Quelle outrecuidance ! D’ailleurs, « les équipes d’accueil du festival se verront contraintes d’interdire l’accès aux marches aux personnes qui ne respecteraient pas ces règles ».

Pour le journaliste de mode Matthieu Bobard Deliere, ces restrictions sont une nouvelle preuve de « trumpisation et de conservatisme dans la mode ». Ça faisait longtemps ! Le grand retour de l’ombre des heures sombres ! Et même quand il s’agit simplement de simplifier la circulation des invités, pour le journaliste, c’est un « pas de plus vers le bannissement de la créativité, de l'expression et de l'extravagance ». Ce n’est pas d’exiger une tenue correcte, qui est dingue, c’est que le Festival de Cannes ait été obligé d'expliquer ce que c'est !

La question n’est pas de nier le retour d’un certain classicisme dans la mode. D’ailleurs, BV parlait des tendances mode conservatrices qui cartonnent, ou le retour de nombreuses stars à plus de sobriété, à plus de naturel. Mais pourquoi en accuser Trump ? Pourquoi agiter l’épouvantail du conservatisme ? Le Festival de Cannes exige simplement une « tenue correcte » ; c’est notre époque qui ne sait plus ce que « correct » signifie.

Vos commentaires

61 commentaires

  1. Je m’interroge, que diraient ces belles âmes éffarouchées par « une tenue correcte » si les acteurs masculins s’affichaient nus sur le tapis rouge ? Nus ou quasiment ? Siffredi en vedette américaine ? Quoique, peut-être se pâmeraient elles devant des attributs ainsi exposés et seraient-elles plus exités que les hommes devant les femmes dévêtues ce qui est tellement commun de nos jours…

  2. On se demande bien pourquoi ce revirement ? Pour plaire à une certaine communauté serait plausible …

  3. Comment ?
    J’apprends avec une immense tristesse que le capitaine Marleau ne pourra pas être présente en  » vedette américaine  » . Quel dommage nous aurions pu à nouveau admirer sa plastique dans le rôle de Mère Teresa des intermittents du spectacle .

    • Le spectacle de cette groupy nue est affligeant ! Le laid reste laid quelques soient les circonstances !

  4. De toute manières cela n’est que du wokisme actuellement, plus aucun film n’est intéressant. Ce soir je vais me repasser un film de Coluche (Tchao pantin) et je pense passer une bonne soirée.

  5. c’est devenu un ramassis de bobos écolos gauchos tout se qui touche a l’art regardez a l’ouverture des jeux et récompenser avec ça ils se complaisent dans la fange

  6. j aimerai savoir dans quel esprit tordu ça a germé cette idée, fallait faire plaisir à qui là? L’excentricité, y compris dans les tenues, faisait le charme de cannes, plus que d’obscurs films que personne ne regardera. c’est quoi la suite ?

  7. Ridicule. Dans un monde normal on ne devrait pas pour une soirée avoir à dire comment s’habiller. Cela prouve la décadence du milieu. Il est vrai que lorsqu’on a entendu les récits de Godrèche et que l’on a vu « cette victime » l’an passé venir avec sa fille moitié nue, ça interroge un peu.

  8. il ya quelques annees les starlettes en bikini sur la plage et aussi sophie marceau c est ca le festival si ca continu ca se passera a l academie francaise

  9. Dans ce monde à l’envers , » correct et respect  » n’existe plus , on le constate tous les jours , il est temps de donner un coup de pied dans cette société dépravée .

  10. Comment voulez-vous que les bien-pensants sachent ce que tenue correct et respect des autres signifie quand il n’y a plus de limite à afficher sa vie sexuelle dans les media ?

  11. Toujours cette débauche de personnalités cinématographiques qui en aparté prônent pour l’égalité entre les hommes et les femmes , les races, etc… et qui veulent montrer au monde leur différence de classe dans cet apparat ; et puis sur le devant de la scène on se congratule , on s’offre des prix , on se rend hommage, et dans le milieu intime on fait l’inverse; quelle hypocrisie !!! tout çà pour récompenser des films qui pour ces dernières décennies sont des navets à ne pas mettre dans n’importe quel potage.

  12. Les jolies filles savamment déshabillées étaient le seul intérêt restant de ce festival pour nantis où le cinéma n’est plus qu’un prétexte!

      • Je suis d’accord avec vous mais je vois autre chose la derrière en général cela commence avec de petites interdiction et dans 10 ans ce sera le hijab et ensuite la burka mais bon moi je ne regarde pas ce genre de manifestation, ni eurovision etc.

  13. A propos de l’Homme, la bien-pensance sait très bien agiter la formule « Un homme, ça se retient » . Étonnant que la formule ne soit pas appliquée à la femme. Deux poids deux mesures ?

    • C’est sûrement ce qu’il convient d’appeler « l’égalité des sexes ». Quoique, on ne sache plus trop ce qui est un homme ou une femme…

    • Exactement ! C’est la bonne réponse : La classe, le savoir-vivre, la retenue qui n’empêche pas un brin d’excentricité. Mais dans ce milieu d’artistes ou prétendus tels qui sont souvent des m’as-tu-vu, ce ne sont pas des qualités ou des vertus que l’on pratique, tant chez beaucoup d’actrices que d’acteurs masculins : entrer en scène avec une casquette ou un chapeau pour se donner la personnalité que l’on n’a pas spontanément par exemple. Ici, sur la photo du titre, il y en a un qui porte des lunettes tellement noires qu’on a du mal à l’identifier. Beaucoup de ses pareils, venant sur un plateau, portent aussi des lunettes noires. Sauf s’ils ont un handicap visuel, comme Ray Charles, se cacher derrière des lunettes, ce n’est exprimer une personnalité, c’est exprimer surtout sa goujaterie prétentieuse.

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