Josep Borrell, vice-président de la Commission européenne, reconnaît ses torts dans le conflit russo-ukrainien

Josep Borrell ne fait que confirmer ce que certains affirment depuis le début de ce conflit fratricide : la culpabilité de Vladimir Poutine ne saurait excuser les responsabilités des institutions européennes et de leur maître américain.
josep borell

De Ségolène Royal à Marine Le Pen, tout en passant par Jean-Luc Mélenchon et Éric Zemmour, nombreuses sont les voix à s’élever contre le manichéisme politico-médiatique dans la guerre qui oppose Moscou à Kiev. Mais le 10 mars, sur le plateau de LCI, c’est une autre voix, d’un autre genre et d’un tout autre profil, qui se fait entendre : celle de l’Espagnol Josep Borrell, ancien ministre socialiste et Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité. Elle n’en a paradoxalement que plus de poids, puisque allant à l’encontre de la doxa dominante de l’organisme dont il est l’éminent représentant ; qu’on en juge.

À la question consistant à savoir si les autorités européennes ont eu raison de tant céder à des USA n’en finissant plus de pousser les pays de l’Est à rejoindre l’OTAN, trompant ainsi les Russes et revenant sur le pacte tacite décidé à la chute de l’URSS, Josep Borrell répond sans ambages : « Je suis prêt à reconnaître qu'on a fait des erreurs et qu'on a perdu des opportunités. Il aurait fallu se rapprocher de la Russie après la fin de l’empire soviétique. »

Soit cette fameuse « Maison commune » qu’appelaient de leurs vœux François Mitterrand et son homologue d’alors, Mikhaïl Gorbatchev, projet dont Roland Dumas, ministre des Affaires étrangères, entendait être le maître d’œuvre. En vain. L’Histoire est malheureusement faite de ces occasions manquées. Et Josep Borrell de reconnaître : « Les Russes ont beaucoup souffert ; il faut comprendre ça. […] Il y a une certaine rancune que Poutine exploite. » Certes, mais on ne saurait non plus lui reprocher d’avoir rendu à la Russie son lustre perdu et sa place dans le concert des nations. Bref, poursuit cet eurocrate en proie à un étonnant accès de lucidité : « On aurait peut-être pu faire mieux, on a promis des choses qui n'ont pas été mises en pratique, comme celle voulant que la Géorgie et l’Ukraine ne fassent pas partie de l’OTAN, même si cela ne s’est pas réalisé. »

Et de résumer : « C’est une erreur de faire des promesses qu’on ne peut pas tenir. » Mais il y a une autre erreur qu’il passe en pertes et profits ; celle consistant à faire croire aux peuples européens que les instances de Bruxelles sont souveraines, alors qu’elles ne font globalement que relayer la politique de la Maison-Blanche, ce, depuis les débuts de la construction européenne, voulue par les Américains, puis les Anglais, comme un simple espace de libre-échange n’ayant pas vocation à devenir une puissance politique.

Le général de Gaulle l’a appris à ses dépens et même Jacques Chirac, sous influence de Marie-France Garaud et Pierre Juillet, avait fini par s’en rendre compte à l’occasion de son fameux « appel de Cochin », le 6 décembre 1978. Morceaux choisis : « Il est des heures graves dans l’histoire d’un peuple où sa sauvegarde tient toute dans sa capacité de discerner les menaces qu’on lui cache. L’Europe que nous attendions et désirions, dans laquelle pourrait s’épanouir une France digne et forte, cette Europe, nous savons depuis hier qu’on ne veut pas la faire. Tout nous conduit à penser que, derrière le masque des mots et le jargon des technocrates, on prépare l’inféodation de la France, on consent à l’idée de son abaissement. […] Comme toujours quand il s’agit de l’abaissement de la France, le parti de l’étranger est à l’œuvre avec sa voix paisible et rassurante. Français, ne l’écoutez pas. C’est l’engourdissement qui précède la paix de la mort. »

Voilà qui aurait pu être signé aujourd’hui. Mais pas forcément par Valérie Pécresse, même si excipant de son héritage gaulliste et de sa filiation chiraquienne.

En attendant, Josep Borrell ne fait que confirmer ce que certains affirment depuis le début de ce conflit fratricide : la culpabilité de Vladimir Poutine ne saurait excuser les responsabilités des institutions européennes et de leur maître américain. Il n’est pas anodin qu’un tel homme en prenne enfin acte.

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

90 commentaires

  1. M Borell à des états d’âme et après son mea- culpa, ça y est, ils peuvent continuer, comme ci de rien n’était. ils ne vont pas s’arrêter pour autant de nous asservir aux USA.

  2. Rien ne se perd rien ne se créer tout se transforme et dans le même temps Impossible n’est pas Français Refusons la soumission à Macron pour être libre

  3. Puisse des millions de français le comprendre.
    Il n’en est rien malheureusement.
    On les fait pleurnicher , ils ne savent que faire cela.

  4. Enfin il y en a un qui le dit mais il faudra convaincre les deux destructeurs de l’UE, Macron et la Présidente, une garce mais ne dit-on pas ceux qui se ressemblent s’assemblent ?
    Ce sont deux gros prétentieux irresponsables et incapables de gérer quoi que ce soit sauf à faire des dettes hors normes et ce qui en découle des taxes et des contraintes à la hauteur de leur sale prétention. Encore 5 ans avec ces deux « guignoles  » (c’est leur image internationale) il n’y aura plus de France ni d’UE

      • quels français,??? Il y en a des dizaines ; 6 sur 10 n’ont pas voix au chapitre .les autres sont : les français de papier ; les jeunes écolos woke pas encore structurés; les nantis profiteurs; et les pervers complices….

  5. ‘la culpabilité de Vladimir Poutine ne saurait excuser les responsabilités des institutions européennes’. Excellent, bien dit. Mais il n’est pas tard : la voie juste et durable serait : 1/ retour des zones russes à la Russie (Crimée et Donbass) sur referendum 2/ Souveraineté reconnue et garantie par la Russie de l’Ukraine 3/ Neutralité de l’Ukraine 4/ Accord de coopération Europe-Ukraine-Russie 5/ Dénucléarisation des pays limitrophes de la Russie et zone démilitarisée aux frontières russes.

    • Oui mais que fait-t- on des bases de l’OTAN déployées le long des frontières Russes. Elles aussi doivent être démilitarisée, les armes neutralisées, et les militaires en places renvoyés chez eux.

  6. Tous ces Unionistes creusent la tombe de notre France jour après jour, tous ces politicards et hauts fonctionnaires Européistes sont les serviteurs de la décadence et vivent aisément des impôts des français. Merci à vous monsieur Gauthier.

  7. Merci Nicolas Gauthier pour ce rappel nécessaire à tout journaliste honnête… et utile à tout citoyen désireux de mieux comprendre l’imbroglio Russo-Ukrainien.

  8. Le 19 février 2022, lors d’une conférence à Munich, Zelensky, l’homme de Washington, a annoncé son intention de mettre fin au mémorandum de Budapest (1994), qui interdit à l’Ukraine de développer, de proliférer et d’utiliser des armes atomiques. Cinq jours plus tard, les Russes attaquaient. Il faut se demander pourquoi les États-Unis veulent créer des tensions avec la Russie et impliquer ses partenaires européens dans le conflit, avec toutes les conséquences que nous pouvons imaginer.

    • Tout simplement selon cet adage « diviser pour régner » la Russie complétement cerclée par l’OTAN, les pays hôtes investis de bases militaires US, l’Europe qui n’est et ne sera jamais une UNION PÉRENNE ET RECONNUE, vassalisée par l’ONCLE SAM, et qui prendra les gnons à sa place

    • Et, ils n’ont pas encore eu l’idée de vendre des sous-marins. Plus, ils en vendent moins cela coûte cher !!

  9. Ce monsieur avoue ce que nous disons depuis longtemps .A force de se laisser manipuler par les USA nous en arrivons à de telles situations .L’UE est un piège pour nous affaiblir , nous asservir et nous ruiner .Merci monsieur pour cet article qui remet certaines pendules à l’heure.

  10. Pour une fois qu ‘ une haute personnalité de la Comission européenne a le courage de reconnaitre son erreur d ‘ opinion , le fait mérite d ‘ être signalé !
    Article très instructif d ‘ ailleurs ; même Chirac, pas très finaud en général , avait vu juste . …

    • Monsieur Borell se moquait ouvertement de M POUTINE et se targuait de lui tenir tête en racontant l’inverse de ce qu’ils avaient convenu! Il est responsable des milliers de morts Russes et Ukrainiens et des destructions en UKRAINE. Responsable mais pas coupable bien sûr. Ce sont les mêmes qui rêvent de traduire POutine à la CPI. Et qui les jugera eux, qui ne sont même pas élus?

  11. La vérité sur l’origine de ce conflit est totalement occultée par nos médias sous influence, la désinformation quotidienne devient pesante et révoltante. L’interdiction des chaînes russes RT et Sputnik, destinée à cacher la vérité sur ce conflit, permet au gouvernement de ne pas montrer l’envers du décor peu glorieux, la négligence de la France et l’Allemagne est évidente. Josep Borrell reconnaît des erreurs et des promesses non tenues causes du conflit c’est déjà un début de mea culpa.

    • Malgré tous les efforts de neutralité de RT et spoutnik qui nous donnaient les informations au compte goutte par crainte avec juste raison de ne plus avoir droit d’émettre en Europe .

    • Cette interdiction décidée unilatéralement et illégalement par Ulla (diminutif d’Ursula) vdL qui est illégitime et qui n’en a selon les traités pas le pourvoir. Macron à genoux s’est exécuté devant les ordres de la douairière, là encore en toute illégalité ! Comme disait Orwell, tous sont égaux, certains plus que d’autres.

  12. Merci cher Nicolas pour ces rappels historiques, vous auriez simplement du rappeler que la « traitresse » qui rappelle son héritage gaulliste et chiraquien est également membre de la F.A.F. (french american foundation) , ce qui veut tout dire et surtout son surnom !

  13. Encore une voix à contre courant et pas n’importe laquelle, bravo à lui !
    Des journalistes de « spigel » auraient découvert une trace écrite de cet accord de non expansion de l’otan…

    • La lucidité n’excuse en rien la responsabilité. Marre de ces eurocrates qui nous ont fichu dans cette situation dramatique, et voyant venir les missiles sur Bruxelles et le reste de l’Europe, commencent à paniquer ! Trop facile ! Il est coupable comme les autres, et le repentir est bien tardif, après avoir mis le feu aux poudres ! Qu’il se souvienne du sort de Robespierre et de Danton !

      • Couper des têtes n’est pas le meilleurs moyens de s’éloigner de la barbarie. Les peuples et leur laisser faire ont également une part de responsabilité.

  14. Aveu : j’ai choisi le Silence et la prière comme pour nos propres élections ! Il y a un moment où Se taire porte ses fruits. La Conscience de ces dirigeants doive les tirailler.. Nous, nous sommes impuissants, petit peuple exsangue d’impôts monstrueux…

      • je suis orthodoxe depuis trente ans ! L’Occident s’est laissé happer par le matérialisme outrancier..Macron et ses compères repasseront tant que nous n’aurons pas osé donner une dimension élévatrice à nos vies. Nous ne méritons rien d’autre à l’heure actuelle. Les miracles existent sur des esprits sains et purs !!

  15. Merci Monsieur, pour votre analyse courageuse !
    La désinformation continue, toujours et encore !
    Ukraine : C’est un scandale de désinformation ; après avoir vu sur les plateaux des chaines d’info, les inquisiteurs en blouse blanche, désormais les généraux et experts en politique internationale : L’hystérie est permanente. C’est inaudible, sans rationalité !
    Merci à Alain BAUER, Vincent HERVOUËT, Pierre CONESA d’apporter une hauteur, distance, intelligence sur ce sujet international.

    • Tout espoir d’un retour à la raison et d’un arrêt d’une soumission à l’Amérique n’est peut être pas perdu. Nul n’est blanc ou noir, mais le retour à l’honnêteté, dont nous avons là une remarquable manifestation, ne peut être que salué.

    • Certainement pas merci à Alain Bauer, qui devrait rester dans son domaine et ne pas d’exprimer sur ce sujet très sérieux qu’est la guerre en Ukraine. Il a tout de même prétendu connaitre les intentions et les plans de guerre de Vladimir Poutine. Bravo Alain Bauer !

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