François Bayrou : le discours très général d’un Premier ministre en sursis

Bayrou s’accroche aux tabous vieux de 50 ans, comme l’AME.
bayrou

Cela ne plaira pas à tout le monde, mais c’est peut-être Mathilde Panot qui a le mieux résumé la situation de François Bayrou qui, ce mardi 14 janvier, jouait son va-tout à la tribune de l’Assemblée nationale : « Vous animez la dernière ligne de défense de la Macronie. » Un discours de politique générale du Palois d’une heure et demie, suivi des interventions de chaque groupe parlementaire : ce fut long, bien long, très long. Un fleuve de mots d’un côté comme de l’autre mais, au fond, la seule chose que les députés, comme tout Français s’intéressant encore un tant soit peu à la politique, avaient à l’esprit : François Bayrou passera-t-il, non pas l’hiver, mais le 16 janvier, jour où il devra affronter la censure déposée par les Insoumis.

Le diagnostic du docteur Bayrou

Quoi qu’il en soit, François Bayrou nous a délivré un discours de politique générale comme s’il avait à sa disposition une majorité solide lui permettant de dérouler un programme dans la durée en l’enrobant dans un joli ruban baptisé « Une promesse française ». Comme on sait que les promesses, même françaises, n’engagent que ceux qui y croient… La réalité est plus cruelle et c’est le député MoDem du Finistère Erwan Balanant qui a le mieux résumé la situation, au micro de LCP, cinq minutes avant l’intervention du Premier ministre : l’enjeu, en fait, c’est de faire « tourner la boutique ». Ce qui n’est déjà pas mal, par les temps qui courent. Sinon, Bayrou a fait du Bayrou. Un Bayrou qui a bien compris qu’il s’agit de gagner du temps. Un Bayrou qui a dressé un diagnostic clinique de la France, notamment sur la question de la dette. S’il est normal, estime-t-il, de s’endetter pour investir au profit des générations futures (écoles, hôpitaux, etc.), en revanche, la dette est injuste si elle fait peser sur nos enfants et petits-enfants le fonctionnement d’aujourd’hui. Comment ne pas être d’accord sur ce constat de bon père de famille ? Bayrou parle d’or, même si c’est parfois un peu poussif sur la forme, pour dresser le diagnostic.

Pour les remèdes, on repassera

Bayrou parle encore d’or lorsqu’il évoque la question de l’immigration, faisant ainsi pousser des cris d'orfraie à la gauche. L’immigration est une question de « proportion », dit-il, en imageant son propos : une famille d’immigrés qui arrive dans un village, ça passe. Maintenant, si c'est trente familles, ce n’est plus pareil. C’est ce qui se passe à Mayotte, ajoute-t-il. La gauche s’étrangle. Remèdes ? Là, le docteur Bayrou est un peu plus flou : « Notre cap, c’est l’intégration par le travail, par la langue, façons de vivre de notre pays. » Très bien. C’est tout. Comme le soulignera plus tard le député RN Jean-Philippe Tanguy, évoquant les pistes d’économies budgétaires; Bayrou s’accroche aux tabous vieux de 50 ans, comme l’AME.

Toujours sur la question de l’immigration, le Premier ministre évoque le sujet des OQTF : 93 % ne sont pas exécutées, constate-t-il. Remède ? Réactiver le comité interministériel de l’immigration. Impressionnant ! Dénonciation des accords de 68 avec l’Algérie ? Nada. Du reste, Jean-Philippe Tanguy, lors de son intervention, sera sans pitié en évoquant le dépôt de gerbe au monument du FLN par Gérald Darmanin en 2020, et en qualifiant le macronisme de « trou noir » pour la France... Éric Ciotti, de son côté, craint fort que Bayrou n’aborde du mauvais côté l’Everest au pied duquel se trouve Bayrou, c’est-à-dire par son flanc gauche !

Sinon, Bayrou a fait un petit clin d’œil au Rassemblement national en évoquant la proportionnelle et la création d’une banque de la démocratie pour permettre le financement des partis pour les élections, mais en se gardant bien d’évoquer un quelconque calendrier. Gagner du temps.

La réforme des retraites : centrale

Bien évidemment, la question centrale était celle de la réforme des retraites. Là encore, Bayrou a fait du Bayrou. Réouverture de négociations avec les partenaires sociaux qui s’enfermeraient en « conclave ». Et, en cas d’absence d’accord, c’est la loi actuelle qui s’appliquerait. Pas de quoi rassurer la gauche. Mais gagner du temps.

Au final, évitera-t-il la censure ? Oui, probablement. Les écologistes voteront la censure déposée par La France insoumise. Jean-Philippe Tanguy, à la tribune, a parlé de ses « espoirs rachitiques » quant à la volonté de Bayrou de rompre avec le macronisme. « Le pouvez-vous, le voulez-vous, je ne le crois pas. » Cependant, Sébastien Chenu, sur France Info, a déclaré que le RN ne voterait pas cette censure. Restent les socialistes, qui font leur mijaurée. « Le compte n’y est pas », a déclaré Boris Vallaud, ajoutant, en s’adressant à François Bayrou : « Nous avons pris nos responsabilités, prenez les vôtres. » En clair, ils jouent le suspense jusqu’à jeudi, faisant croire qu'ils peuvent encore peser dans le débat pour, bien évidemment, « le seul intérêt des Français ». Un suspense qu'Olivier Faure, ce mardi soir, a prolongé sur le plateau de TF1. Mais, de toute façon, même si les socialistes votent la censure, si les députés RN et ciottistes ne la votent pas, Bayrou ne chutera pas. Du moins, pas ce coup-là…

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

63 commentaires

  1. Un discours à l’eau de rose , une tisane à déguster tiède , l’immigration : on évoque mais on reste superficiel , on parle de Mayotte mais on oublie de signaler que le cyclone a balayé les maigres moyens mis en place pour essayer le la limiter , l’islam : connais pas , la réforme des retraites : continuons à ignorer l’arithmétique , l’Algérie et les accords à supprimer d’urgence : zut j’ai mélangé mes feuilles celle de l’Algérie a du tomber par terre .

  2. Désolé, mon colonel, mais pourquoi faire un article aussi long pour terminer par ce que tout le monde sait depuis juillet. Si le RN et les ciottistes ne votent pas la censure le gouvernement tiendra. Une censure ne servirait à rien sauf à obliger Macron à trouver un nouveau premier ministre et à rejouer les scènes déjà vu avec Barnier et Bayrou. Par contre en juillet, quand sera revenue la possibilité de dissoudre à nouveau, Macron va avoir très chaud… Car là, une censure obligeant à de nouvelles élections aurait un sens.

  3. Être premier ministre en France, ça me rappelle cet ancien jeu sous windows, le démineur, où il fallait cliquer sur des cases dont certaines dissimulaient une charge explosive. Le but consistait à déminer les cases piégées sans les faire sauter. Ici, on a un peu corsé le jeu : toutes les cases sont minées.

  4. Pierre Dac l’a dit;  » Parler pour ne rien dire ou rien dire pour parler sont les deux principes majeurs et rigoureux de tous ceux qui feraient mieux de la fermer avant de l’ouvrir !  » Le discours de politique générale de Bayrou a été à son image, sans envergure, le reflet du macronnisme, …

  5. Égal à se qu il a toujours été le bègue de Pau , raconte l actualité sans jamais rien proposer sauf le vide sidéral de son programme, il n a aucune solution il tourne en rond bégaie se prend les pieds dans le tapis, il est perdu complètement dépassé par les événements, lui l homme qui a toute sa vie trahit est acculé dans un cul de sac dont il ne trouve pas la sortie, il est voué à l échec et il le sait sa seul ambition était de toucher à vie la retraite de ministre c est la seule chose qu il a réussi

  6. Bayrou fait du Macron en rajoutant une sucrette à destination du RN, qui détient le bouton de la trappe aux oubliettes.

  7. Pour le PS et le RN qui ne censureront pas
    Si tous les cocus, avaient des clochettes, des clochettes au-dessus, au-dessus de la tête, ça ferait tant de chahut qu’on ne s’entendrait plus…

  8. Arrêtons-nous sur les quatres premières phrases égrenées par Bayrou…
    À peine le dernier mot envoyé, notre Maire des Pyrénées s’est mis à dos l’ensemble de l’Assemblée Nationale…
    Sauf évidemment le très minoritaire parti présidentiel.
    Puis, observez bien le visage du même Bayrou lors des discours de Jean-Philippe Tanguy*, puis de Éric Ciotti**, c’est comme assisté à la décomposition du maquillage d’un courtisant de la Cour de Louis XIV, notre Roi tançant le dit courtisant.
    Un vrai spectacle qui laisse rêveur quand au futur de ce Premier Ministre bien malgré lui !
    C’était un uppercut envoyé après l’autre !
    * excellentissime Tanguy !
    ** brilliant Ciotti !

      • Notre pays a besoin de stabilité politique , changer de gouvernement tous les quatre matins n’est pas bon pour l’économie , et notre dette abyssale détenue en grande partie par l’étranger .
        Alors les politiciens feraient bien pour une fois , d’oublier leurs petites ambitions personnelles , et de penser à l’intérêt supérieur du pays et donc des Français .

  9. ces gens auront gâché une grande partie de ma vie
    à chaque fois j’ai voté avec l’espoir que tout s’arrangerait.
    mais au final , c’est toujours les mêmes menteurs et traîtres qui continuent.
    Aujourd’hui , je pense ne plus voter

    • Et comme aux dernières municipales on verra des partis minoritaires et extrémistes prendre le pouvoir .

  10. Pardon, mais moi je l’ai trouvé pathétique, une élocution hachée, cherchant ses pages, le béarniais c’est le néant en politique et il vient de le démontrer, bayrou, comme disait Simone Veil, « c’est pire que tout… » Cupide, aucun charisme, jaloux, revanchard, maladif, son unique projet n’a toujours été que lui-même, c’est un européiste convaincu et ça c’est vraiment pas bon pour nous, il a toujours trahi, mensonge, bassesse, opportuniste, c’est une girouette, mais une girouette qui fait du tort car avec peu d’électeurs et quelques élus, il fait perdre ou gagner des élections. Le bearniais est un homme de centre gauche, je ne comprends pas que retailleau ait accepté de faire parti de son gouvernement, est-il aussi naïf pour ne pas se rendre compte qu’il sert simplement de faire valoir à l’agriculteur, qu’il se sert de lui et de sa popularité pour durer. En ce qui concerne les retraites, Faure a baissé culotte, très ami avec lombard, il a avalé des couleuvres, les socialistes sont cocus. Faure, comme je le disais plus haut, étant un proche de lombard, ne mettra pas de bâton dans les roues du béarniais, un deal est passé, « on te lâche quelques miettes et tu ne nous censure pas » la censure que j’appelais de mes vœux semble s’éloigner et pourtant elle est nécessaire pour faire dégager macron et ses macronistes. Le Pen me déçoit car elle aussi ne censurera pas, donc macron, bayrou et tous les macronistes peuvent se réjouir, les gaulois réfractaires, les illettrés, les gens de rien vont encore subir le mépris. j’ai été aussi étonné de la bienveillance médiatique vis à vis de son discours car vraiment c’est le flou le plus complet, il se dit que c’est lui qui a écrit son discours et bien si c’est lui, il n’y a pas de quoi être ébloui tout était fait pour embrouiller et manipuler.

    • J’adhère, le seul parti vraiment de droite c’est Reconquête, c’est notre dernier espoir. Aux prochaines élections présidentielles, j’hésiterai entre RN ou Reconquête

    • A quoi servirait une censure aujourd’hui ? Macron se cramponne contre vents et marées à son fauteuil et on ne peut pas faire de nouvelles législatives avant 8 mois. Ce serait jouer une fois encore, et pour rien, les scènes déjà vues avec Barnier et Bayrou. Contrairement au NFP qui veut censurer par principe, juste pour le plaisir de « bordeliser » le pays et dont on essaie de comprendre la stratégie qui, pour l’instant, n’a pour resultat que de faire monter le RN, je pense que MLP, plutôt que de semer la pagaille pour rien, préfère attendre des jours meilleurs et notamment, en juillet la possibilité de nouvelles législatives.

      • désolé je reste convaincu que plus les gouvernements macronistes sauteront plus macron n’aura pas d’autres choix que de démissionner, il n’a pas 36 ministres de remplacement, quand à MLP elle n’a absolument rien à perdre et rien à gagner, elle est banni, que ce soit par la gauche ou la droite républicaine, si elle se soumet ses électeurs iront voir ailleurs, les gens veulent du vrai changement et surtout rien de ce que propose le béarnais.

  11. Parfaite continuation du macronisme . Toujours plus de bla bla , aucune action, tout se passe comme prévu. Seul objectif maintenir les 25 pour cent de bobos macronistes tête hors de l’eau. Que pouvait-on attendre de ces fromages ?

  12. Un seul exemple: « il veut éloigner les enfants des écrans » et cinq minutes plus tard : « il veut utiliser l’I.A pour l’apprentissage de la lecture » ! Cherchez l’erreur ! Il est perdu, il devrait consulter un neurologue, il est « lessivé ».
    Sa prestation est du niveau d’un chef de bureau d’une sous-préfecture

  13. Sur la politique fiscale, rien. Il y a donc de quoi craindre les mesures que le gauchiste proclamé Lombard va nous pondre. Ce discours était bien trop évasif, on ne s’est raccroché à rien de précis. Comme avec Barnier, le doute va s’installer très vite.

    • C’est un exploit: 1 h 30 de discours à ne rien dire. Me direz-vous, pour avoir des choses à dire, encore faut-il avoir la volonté ou le courage de vouloir engager les solutions. Tout cancérologue vous le dira : après le bon diagnostic, si vous n’avez pas la volonté et le courage d’affronter les effets secondaires du traitement, alors vos chances de guérison seront remises en question.

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