France-Haïti : faut-il encore payer pour l’Histoire ?

En 2025, à l’occasion du bicentenaire de l’ordonnance du 17 avril 1825, la France se penche une nouvelle fois sur un chapitre sensible de son histoire coloniale : la « rançon de l’indépendance » imposée à Haïti. Cette indemnité, extorquée sous la menace militaire, a lourdement ralenti la construction de la première république noire moderne, amputant durablement ses moyens de développement. Alors que Paris commémore ce bicentenaire, les appels à une réparation financière résonnent de nouveau : le président de la République, Emmanuel Macron, n’a pour l’instant pas autorisé de remboursement (en a-t-il seulement le droit ? Cela relève sans doute du Parlement) mais a insisté sur la nécessité pour la France de « regarder cette histoire en face ».
De la révolution haïtienne au bicentenaire de 1825
En août 1791, l’insurrection des esclaves de Saint-Domingue, inspirée par les idéaux de la Révolution française, embrase la colonie. Au prix de nombreuses années de combats, les armées insurgées, sous l’égide de Toussaint Louverture, repoussent définitivement les troupes françaises en 1803. Le 1er janvier 1804, Jean-Jacques Dessalines proclame l’indépendance d’Haïti et en devient le premier empereur. Il ordonne aussi, au passage, le massacre des derniers Blancs restés sur l'île, soit au total 3.000 à 4.000 personnes. La France en demandera-t-elle réparation ?
La France, occupée par les guerres napoléoniennes puis par les défis de la Restauration, n’acceptera de reconnaître l’indépendance d’Haïti que le 17 avril 1825, sous le règne de Charles X, mais seulement sous certaines conditions. Parmi celles-ci, le versement de 150 millions de francs-or afin de dédommager la France et les anciens colons pour la perte de leur territoire et de leurs biens.
Refusant un tel sacrifice, Haïti est contrainte d’accepter, après un blocus maritime imposé par la France le 11 juillet 1825. En 1838, sous le règne de Louis-Philippe, roi des Français, le montant est ramené à 90 millions et est versé jusqu’en... 1947. Cette dette historique aurait alors entravé le développement économique de l’île, qui demande aujourd’hui que la France rembourse cette somme qui, à valeur actualisée, représente entre 21 et 115 milliards de dollars.
Déclaration d’Emmanuel Macron
À l’occasion du bicentenaire de l’ordonnance de 1825, le Président Emmanuel Macron a rappelé la portée de cet acte et a souligné le besoin d’un travail de mémoire lucide : « Reconnaître la vérité de l’Histoire, c’est refuser l’oubli et l’effacement. C’est aussi, pour la France, assumer sa part de vérité dans la construction de la mémoire, douloureuse pour Haïti, qui s’est initiée en 1825. » Il a également annoncé la création d’une commission mixte franco‑haïtienne « composée d’historiens, de nos deux États, qui aura pour mission d’explorer deux siècles d’Histoire, y compris l’impact de l’indemnité de 1825 sur Haïti, d’analyser les représentations et les mémoires croisées de cet épisode entre nos deux pays, et d’aborder les développements de la relation franco-haïtienne au XXe siècle. »
Elle sera co-présidée par Yves Saint-Geours, ancien ambassadeur de la France en Bulgarie et en Espagne, et Gusti-Klara Gaillard Pourchet, docteur en histoire spécialisée dans celle d’Haïti.
La France ne peut pas payer
Si cette commission venait à avoir un avis favorable au sujet d’un dédommagement financier de la France envers Haïti en réparation des clauses du traité passé, cette situation pourrait remettre en cause le droit international. En effet, le principe pacta sunt servanda, consacré à l’article 26 de la convention de Vienne de 1969, dispose que « tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi ». Cette règle, pilier du droit international, garantit la stabilité des relations entre États en interdisant la remise en cause rétroactive d’accords valides. Or, le traité de 1825, ratifié et mis en œuvre pendant plus d’un siècle, lie toujours moralement ses parties, et toute remise en question de son exécution heurterait la confiance juridique des États. Néanmoins, la question du consentement sous la menace des armes peut être bien sûr discutée. Cependant, une remise en cause du droit international pourrait créer un cas de jurisprudence aux conséquences fâcheuses.
Ainsi, à l’image des revendications haïtiennes, l’Allemagne pourrait elle aussi exiger le remboursement des indemnités fixées par le traité de Versailles, signé en 1919 dans un contexte de rapport de force après sa défaite. Elle pourrait le faire au motif que ces réparations, imposées en dédommagement des destructions causées durant la guerre, ont freiné son développement économique. La France serait également en droit de demander le remboursement des 700 millions de francs imposés par le traité de Paris en 1815 par les monarchies coalisées qui occupaient le pays, demande qu’elle n’a jamais faite car la France a su tourner la page et regarder vers l’avenir. Cette somme représentait, selon l’économiste américain Eugen White, la plus forte répartition qu’un pays vaincu ait jamais dû verser.
Un autre obstacle au potentiel remboursement de la dette d’Haïti est également notre propre situation économique. À l’heure où la dette publique française s’élève à 3.305 milliards d’euros et que l’on demande aux Français de faire des économies, est-il encore possible, raisonnable, sensé et décent de consentir ainsi à de telles choses ? Par ailleurs, depuis 1976, la France a déjà soutenu près de 110 projets en Haïti par l’Agence française de développement (AFD), pour un montant de 400 millions d’euros, témoignant de sa bonne volonté et de sa générosité.
Les limites de la culture de la repentance
Comment ne pas voir, dans la création de cette commission mixte franco-haïtienne et l’idée d’un possible remboursement, cette culture de la repentance permanente qui parcourt notre pays ? Avec l’échec, maintenant palpable, comme nous pouvons actuellement le voir avec l’Algérie. Ainsi, malgré les déclarations d’Emmanuel Macron disant que la colonisation française était « un crime contre l’humanité », les nombreux gestes symboliques et accords économiques avec l’Algérie, les relations franco-algériennes n’ont jamais été aussi houleuses. Cette expérience montre que cette rente mémorielle, qu'entretiennent certains pays contre nous, peut devenir une arme politique et économique contre la France où l'on trouve des bonnes âmes qui s’illusionnent en pensant pouvoir réparer toutes les injustices commises par l’humanité au cours de son Histoire.
Illustration : Jean-Jacques Dessalines (1758-1806), empereur d'Haïti

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42 commentaires
En effet, un acte passé, une transaction en bonne et due forme ne peut pas être invalidé. Je ne vais pas contester l’acte de vente d’un bien qui a été signé par les parties. Ou alors il faudrait revenir sur des histoires de facultés mentales, ce qui serait moche pour Haïti, des pressions d’une des parties, mais la France à signé pour l’indépendance et HaIti n’a pas contesté, Haïti qui a toujours des problèmes malgré les milliards qui arrivent à longueur d’années mais dont on se demande quel en est l’usage. A noter aussi, on l’oublie, le pays voisin dans l’ile, qui se porte très bien. Vous avez dit bizarre ?
D’un cote de l’ile la Republique Dominicaine, qui vit du tourisme et mange a sa faim, de l’autre Haiti…. cherchez l’erreur. On n’a pas a payer, ni a se repentir.
Hum, l’autre partie vit bien du tourisme et certains touristes y vont sans se douter qu’ils sont en Amérique, j’ai entendu cela, donc ils ont un joli savoir faire et pas que…ils exportent de délicieuses bananes, et je n’ai jamais vu un fruit en provenance d’Haïti !
Payar pour Haïti, pourquoi pas. On aide bien l’Algérie…Mais pas au nom d’une quelconque repentance. Ce pays est dirigé par lui-même depuis plus de 2 siècles.
A l’heure où le gouvernement est en train de concocter des mesures pour récupérer 60 milliards d’Euros dans les poches des Francais, le président continue à jeter l’argent par les fenêtres. Aides au développement à la Chine et à l’Algérie qui s’essuie les pied sur nous, encore 2 milliards donnés à l’Ukraine pour entretenir une guerre qui fait des centaines de milliers de morts et qui est perdue d’avance, créations de comités Theodule pour recaser les copains, subventions diverses et variées, et maintenant, négociations pour « rembourser » Haiti. Va-t-il aussi rembourser l’Italie pour lui avoir pris Nice, ou l’Allemagne pour avoir récupéré l’Alsace en 14 ? Sans compter les migrants qu’on fait venir par bateaux entiers, qu’il faut loger, nourrir, habiller et soigner gratuitement, et les 25 milliards d’Euros versés chaque année à l’Europe qui ne nous en rend que 11… Bayrou a raison : les Francaisne travaillent pas assez pour payer tout ça. Si ça continue, la France va se retrouver au niveau de la Grèce il y a 20 ans, l’Allemagne va proposer de la racheter pour le montant de sa dette et Macron aura réussi ce qu’Hitler à raté : Nous serons tous en « Germanie »… (comme dit Sardou)…
Assez de nous fatiguer avec cette fausse culpabilité.
Après le terrible tremblement de terre, et précédemment les ouragans, Haïti a reçu des milliards du monde entier. Qu’est devenu cet argent’? Les habitants vivent toujours sous des tentes…
Jojo la dépouille va encore trouver des solutions pour nous piquer de l’argent …ce faire valoir ne lui servira à rien …de toutes façons la vie de château va se terminer n’étant plus crédible du tout ..par contre la risée du monde c’est oui .
» la France se penche une nouvelle fois sur un chapitre sensible de son histoire coloniale » !!
Pas « la France », non, mais un certain président de pacotille. Après l’Algérie, Haïti ! Il lui reste deux ans pour s’occuper de « notre repentance envers les pays d’Afrique « envahis par ces salauds de colons ».
Il est insupportable de confondre le macron avec la France, il ne représente pas le Pays, c’est factuel en plus, résultat électoral pour preuve. La France, c’est un territoire, un peuple, un parlement, et le chef de l’Etat se doit de représenter cette Nation. Il n’y est pas, il n’est pas « la France » et il n’est pas non plus « Paris » !!!
E. Macron adore dépouiller les français. On devrait aussi indemniser le Danemark, pour les exactions commises à l’époque par Charlemagne, il y a 1200 ans…
Voila une bonne idée…..mort de rire.
La plus grande erreur fut celle du général de pacotille qu’était dessalines; le génocide des blancs d’Haïti fut contre-productif puisque ce sont eux qui faisaient tourner l’économie.
Deuxième chose à souligner, le montant des indemnités demandé par la France ne représentait qu’une année du PIB d’haïti de l’époque.
Dernière chose mais non des moindres. Pourquoi ne pas donner tout de suite un montant de 100 milliards aux haïtiens? De toutes façons, cette somme ira directement dans les poches des pseudo-politicards corrompus et des gangs de rues. Et pour nous, bien, 100 milliards, c’est une goutte d’eau dans l’océan de notre d’être publique…. Bref, rien de nouveau sous le soleil d’haïti!!!!!
Il faudra bien qu’un jours IL nous rembourse le caissier de chez Rothschild.
« cette culture de la repentance permanente qui parcourt notre pays » non , c’est surtout l’obsession de Macron et l’extrême gauche ! Qu’il s’occupe plutôt de la Frznce et du présent ! Mes ancêtres n’ont mis le pied ni en Algérie, ni à Haïti, ni ailleurs alors tout cela ne me concerne en rien !
Mes ancêtres ont été défricher les marécages algériens! Ils auraient mieux fait d’émigrer en Argentine.
Le massacre dans des conditions atroces des 4.000 blancs par les déjà tontons macoutes de louverture n’est-il pas un « crime contre l’humanité » ? Haïti n’a pas fini de payer sa dette, ça suffit cette repentance mal placée ! Pourquoi St Domingue est prospère et qu’haïti vit dans la misère ?
Toussaint-l’Ouverture n’a rien à voir avec ce génocide. Il a été déporté en 1802. L’unique responsable s’appelle Jean-Jacques dessalines. Le génocide a eu lieu en 1804! Revoyez votre chronologie!
Sans oublier le massacre des soldats français prisonniers dont les haitiens ne savaient plus quoi faire! Je pense que tout cela vaut bien une bonne amende!
Exactement, d’autant que si les Français ont payé rubis sur ongle aux Allemands les dommages causés par la guerre, les Allemands n’ont jamais remboursé la totalité des dommages de la seconde guerre nous serions en droit de les réclamer , donc à ce compte là on n’en a pas fini, et on peut remonter jusqu’au temps des cavernes ! Mais vu que la France passe son temps à s’excuser de tout, pourquoi certains pays n’en profiterait pas pour réclamer toujours plus ! Il serait temps de virer ce fossoyeur , qui, actuellement passe son temps à l’extérieur de la France aux frais du contribuable et qui nous coûte un pognon de dingue
Pour que les prochains dictateurs haitiens s’en mettent plein les poches?
Indemnisation ?, il n’en n’est pas question
En êtes-vous si sûr ?
M. Macron adore distribuer l’argent que nous n’avons pas.
J’en profite pour mentionner la pétition de Place d’Armes qui a pour but de rappeler à notre président qu’il ne peut pas tout décider tout seul. Le parlement est là pour être consulté (bien qu’il soit bien mal fréquenté ces temps-ci).
Il est bien copain avec l’usurpateur ukrainien!
aprés la terre entiére …….maintenant c est haiti qui nous demande des sous…..??? demain ce sera qui…??? encore….!!! macron va bien nous trouver des pleurnicheurs…….!!!!
Nous avons mis le doigt dans l’engrenage. Alors forcément… cela attise les convoitises.
Tout à fait
Pourquoi pas indemniser les pingouins?