Fin de vie : où s’arrêtera le mensonge sémantique ?

Mercredi 30 avril, la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale se réunissait pour débattre de l’adoption d’éventuels amendements à la proposition de loi sur la fin de vie, qui devrait être examinée en séance plénière, d’ici deux semaines. Au terme de débats parfois très vifs, huit amendements ont été adoptés. L’un d’entre eux, en particulier, résume bien toutes les problématiques associées à cette loi : l’amendement AS895, porté par la députée LFI Danielle Simonnet, qui a « travaillé » ce texte en liaison avec l’Association pour le droit à mourir dans la dignité. Cet amendement est d’ailleurs le même que le n°586, de la députée Ensemble pour la République Nicole Dubré-Chirat… qui a, également, rédigé ce texte avec l’aide de l’ADMD. Vous êtes prêts pour le verbatim ? On est partis.
L'euthanasie (Ah non, pardon, "l'aide à mourir") est une "mort naturelle" (Non,non, je vous assure, l'injection létale n'y est pour rien). C'est un amendement adopté aujourd'hui en commission sur la proposition de loi "fin de vie".
Nos députés ont bien du mal à nommer les choses pic.twitter.com/vH87E3yPtV— Claire Fourcade (@clairefourcade3) April 30, 2025
« Mort naturelle »
Le texte réclame qu’une mort administrée à quelqu’un soit qualifiée de « mort naturelle ». Tollé dans l’assistance, notamment de la part du député RN de Vaucluse Hervé de Lépinau, que BV a pu joindre dans le cadre de la rédaction de cet article. Pour lui, la question est évidemment sémantique et philosophique et, en quelque sorte, complémentaire de la rationalité d’un député comme le médecin Philippe Juvin (LR), qui s’en tient strictement à la position délicate du médecin. Hervé de Lépinau remonte à la racine de cet amendement tout à fait orwellien : dès la rédaction du projet de loi initial, c’est-à-dire avant la dissolution du mois de juin, le rapporteur général Falorni (macroniste) avait déjà été très attentif à l’emploi de mots qui ne puissent pas choquer : il n’était pas question de parler de « suicide assisté » (trop anxiogène) ni d’euthanasie (rappelant trop, selon lui - et à juste titre ! -, les heures sombres du régime nazi). Les germanistes et les historiens se souviendront que l’assassinat des handicapés et des malades mentaux portait le nom délicat de Gnadentod, ou « mort miséricordieuse ». On n’est pas très loin, en effet.
Étouffée avec un oreiller
Hervé de Lépinau est un fin connaisseur des arcanes du droit. Avocat de formation, envoyé en renfort au sein de la commission des Affaires sociales au sein de laquelle il ne siège pas d’ordinaire, il a tout de suite vu l’effet « cliquet » de cette loi : le législateur français vient, en adoptant ces amendements, de prendre une position initiale aussi délétère que celle à laquelle nos camarades belges ou hollandais sont parvenus après dix à quinze ans d’élargissements successifs. La suite ne pourrait donc être que pire. Si l’on fait un peu de politique-fiction, d’ici à quelques décennies, il n’est pas absurde d’envisager que les plus de 80 ans qui refuseraient de s’engager dans un « processus d’aide à mourir » reçoivent des malus fiscaux, par exemple. Le culot de vivre, tout de même !
Allons plus loin, en examinant les effets de bord de cette loi devenue folle : que va-t-il se passer si l’injection létale ne marche pas ? Les risques sont infimes, mais réels. Les abolitionnistes américains parlent, dans ce genre de cas, d’agonies qui durent des heures, voire des jours. La Belgique a résolu le problème : une patiente dont l’injection n’avait pas fonctionné a été « finie » à l’ancienne, étouffée avec un oreiller. Alors, c’est donc ça, le droit de mourir dans la dignité.
À la manière de 1984, la mort provoquée, c’est donc une mort naturelle. Cette loi scélérate passera bientôt devant la représentation nationale. Il se dit que certains députés n’ont pas encore pris position sur le sujet, soit par incompétence, soit par défaut de connaissance, soit par paresse. Espérons que les quinze prochains jours leur ouvrent les yeux.

Pour ne rien rater
Les plus lus du jour
Popular Posts

79 commentaires
C’est à la fois effrayant et pathétique mais comment s’étonner dans une societe dans laquelle le mensonge est roi. Dans laquelle le mensonge est partout, dans le plus anodin comme le cuir en plastique ou le steak de légume jusqu’au plus horrible comme la négation de la vie dans les bébés en gestation.
Réponse à Brigantin: dans le Decalogue, un des articles dit: tu ne tueras pas.
Ça semble on ne peut plus clair. On ne doit tuer personne, pas même soi-même.
Une vérité toute simple et toute nue commence à sortir du puits : abréger les aleas de fin de vie du « vulgum pecus » va constituer une économie considérable pour le budget de l’oligarchie triomphante !
Il reste maintenant à savoir jusqu’où le « vulgum pecus » va tolérer les atteintes de toutes sortes de la post-modernité mondialiste contre l’humanisme séculaire, véritable et éprouvé.