Euthanasie : la stratégie masquée des militants du droit à mourir

Pour les pro-euthanasie, « une fois qu'on aura mis le pied dans la porte, il faudra revenir tous les ans et étendre ça »
Capture d'écran X
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« Nous devons être astucieux et ne pas paraître excessifs », recommande, dans un courriel adressé aux militants, un certain Jonathan Denis, président de la très active ADMD (Association pour le droit à mourir dans la dignité) qui, depuis des années en France, milite pour la légalisation de l'euthanasie. « On n'obtiendra pas tout, tout de suite, dans la première loi, parce que vous avez vu la frilosité que notre pays véhicule sur ces questions-là ? Il faut obtenir le plus possible. Et surtout, une fois qu'on aura mis le pied dans la porte, il faudra revenir tous les ans et étendre ça. Parce que [...] dans la première loi, il n'y aura pas les mineurs, il n'y aura pas les maladies psychiatriques, il n'y aura même pas les maladies d'Alzheimer, tout ça ne viendra pas tout de suite », expliquait, de son côté, en novembre 2024, aux membres de l'association « Le Choix », l'ancien député macroniste du Rhône Jean-Louis Touraine. Une vidéo opportunément republiée sur les réseaux sociaux alors que, ce lundi 12 mai, s'ouvre à l'Assemblée nationale le débat sur la fin de vie.

 

De quoi fragiliser toutes les thèses « rassuristes » sur l'élargissement à craindre du droit à mourir, à commencer par la déclaration d'intention du ministre de la Santé Catherine Vautrin qui, ce dimanche, dans les colonnes du Parisien, jure la main sur le cœur que la loi fin de vie sera strictement encadrée et qu'il n'est d'ailleurs nullement question de légaliser l'euthanasie.

Face au clan des « rassuristes » de la loi fin de vie...

Le ministre de la Santé aurait du mal à « trouver le sommeil », ces derniers jours, à en croire nos confrères. À sa décharge, la Catherine Vautrin des grands reniements , celle dont les promesses ne valent pas cher, devra composer avec une opposition de taille des opposants à l'euthanasie. Parmi eux, le ministre Retailleau pour qui le texte examiné, « extrêmement permissif », « va dans le très mauvais sens » ; le président du RN Jordan Bardella, la députée européenne Marion Maréchal qui, sur le plateau de CNews, ce lundi, exprimait ses craintes mille fois partagées de faire sauter le verrou avec « ce texte terrifiant », exemples belges et canadiens à l'appui, et le groupe de députés autour de Philippe Juvin, pour qui l'euthanasie est « une loi qui est faite par des gens riches et inquiets et qui va s'appliquer à des gens pauvres et seuls ».

D'autres personnalités peu ou pas marquées à droite tentent également de se faire entendre, tels Emmanuel Hirsch, professeur émérite d'éthique médicale et membre de l'Académie nationale de médecine, Jean Leonetti, auteur de la loi de 2005 sur la fin de vie, ou encore l'ancien ministre de la Santé François Braun, dénonçant « ce droit à une mort provoquée » qui interviendrait au terme d'une « procédure anormalement expéditive » basée sur des critères « flous et subjectifs ».

Il faudra également compter sur la fronde des collectifs de personnel soignants et sur la mobilisation des associations Alliance VITA qui appellent à des happenings dans une cinquantaine de villes, ce lundi 12 mai, ou sur celle de la fondation Jérôme-Lejeune. Et s'arranger des doutes de la Haute Autorité de santé quant aux critères pour départager les bénéficiaires de l'aide à mourir. Sans compter le manque d'appétence du Premier ministre Bayrou pour l'euthanasie légalisée.

... et la tranquille assurance des militants

C'est donc dans ces conditions que, cherchant à dégonfler la baudruche, Catherine Vautrin annonce déposer un amendement gouvernemental « pour encadrer strictement la loi ». Pensant esquiver la gronde des nombreux professionnels de santé réfractaires à l'idée de donner la mort, elle propose que ce soit « le patient atteint d’une maladie grave et incurable dont le pronostic vital est engagé qui pourrait s’administrer une substance létale ».

Piètre calcul de boutiquière qui ne saurait stopper la machine militante bien huilée, sûre de dérouler sa feuille de route, une fois le pied dans la porte posé, tel qu'exposé par Jean-Louis Touraine : « Après [le vote de la loi] on pourra étendre les choses, il faudra étendre cette légalité. » Faisant le parallèle avec la légalisation de l'IVG, il prévient : « Le combat devra continuer au moment de l'application de la loi, car vous allez voir qu'il y a des endroits qui vont dire : ici, il est interdit de faire des euthanasies ou des suicides assistés ; comme il en est des avortements. » Étape décisive où les professionnels de santé pourront dire adieu à leur clause de conscience, relégués au rang des pharmaciens qui, dans le texte débattu ces jours-ci, n'ont aucune liberté de refuser de vendre le produit létal.

Une référence à la mécanique de l'IVG partagée par le président de l'ADMD qui, dévoilant sa stratégie, exhorte ses militants à « se montrer collectivement prudents » face aux « médecins en soins palliatifs très remontés, très actifs [...] qui n'accepteront pas que nous triomphions avant l'heure ». Et invite à la patience : « Comme la loi légalisant l'interruption volontaire de grossesse, telle que votée en 1975, était très incomplète, nous devons craindre que la loi votée [...] ne réponde pas à l'ensemble de nos revendications [...], nous devons accepter des concessions qui ne seront que temporaires, transitoires. » Pour ces acharnés de la cause euthanasique, la suite est entendue : « Dès lors que le principe même de l'aide active aura été voté, le front des anti-choix aura été brisé [...], nous pourrons enfin avancer rapidement et faire évoluer la loi vers ce que nous souhaitons tous, une loi du libre choix. »

Le risque : que ces quelques jours nous mènent, comme pour l'IVG, des années plus tard, à la constitutionnalisation de l'euthanasie...

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Sabine de Villeroché
Journaliste à BV, ancienne avocate au barreau de Paris

Vos commentaires

80 commentaires

  1. Rappelez vous .. Le mariage pour tous, il n y aura de PMA, ensuite débat sur la PMA il n y aura pas de GPA et maintenant GPA.. et ensuite
    .

  2. Donc, si j’ai bien compris, Badinter a aboli la peine de mort pour les criminels, et les « soignants sauveurs » vont pouvoir tuer, qui que ce soit, en toute légalité ! Cherchez l’erreur !

  3. Je propose que tous les élus à l’AN et au Sénat qui voteraient pour cette loi assassine s’engagent officiellement et signent en séance publique un document comme quoi ils demandent définitivement à ce qu’on leur applique la loi si besoin était ; et bien entendu sans possibilité ultérieure de revenir en arrière.

    • Alors les élus ont du souci à se faire…parcequ’ils coûtent très cher..ne cotisent pas..ont des retraites dès 6 mois de travail…et ne servent à rien…

  4. J’ai vécu ce drame ma première épouse atteinte d’une leucémie qu’elle a combattue durant 12 ans l’avait menée à vivre sous une tente, sur un matelas à eau, pesant 45kg et souffrant d’atroces douleurs du fait de zonas et bien avec mon accord les infirmières ont fait le nécessaire et elle est partie tranquillement dans un sommeil profond. Merci encore encore à ces infirmières.

    • Merci à tous ceux qui écoutent les malades …et dans l’intimité les aident à partir.
      Mais pas DE LOI pernicieuse et trompeuse…nous le savons bien tous.

  5. Et que dit le Conseil Consultatif National d’éthique ?
    Aux abonnés absents, comme le Conseil National de l’Ordre ?
    Le sujet ne doit pas les concerner !

  6. Je ne comprends pas que des politicards donnent leur avis sur un problème relevant de la médecine et des croyances religieuses.

  7. « Le risque : que ces quelques jours nous mènent, comme pour l’IVG, des années plus tard, à la constitutionnalisation de l’euthanasie… »
    Ce n’est hélas pas un risque, mais une certitude. Le droit à l’avortement étant aujourd’hui étendu jusqu’à la veille de l’accouchement, il y aura, pour les ratés de l’IGV constitutionnelle, l’euthanasie du lendemain, pour les bébés d’un jour, non désirés.

  8. « Nous devons être astucieux et ne pas paraître excessifs »
    Quelle perversité ! j’imagine toute la machine de guerre, derrière ce projet infâme.
    Ils pourront habiller l’euthanasie comme ils le voudront, nous savons tous, qu’au bout du chemin, ce sera la dérive économique.

  9. On peut quand même s’étonner que dans un pays qui cumule tant de problèmes, la priorité soit donnée à voter une loi qui désacralise la vie car c’est bien de cela qu’il s’agit.
    La ruse de madame Vautrin est grossière et ce débat est bien trop grave pour être confié à des ministres aussi médiocres !

  10. Je pense qu’il faudrait nuancer…
    Il ne s’agit pas du suicide assisté, mais de l’aide à une personne en phase terminale et en souffrance.
    J’y suis favorable, et aimerais bien en bénéficier si je me trouvais dans une telle situation.
    À quoi bon prolonger les souffrances jusqu ‘au dernier souffle.

  11. Rien de mystérieux..les vieux coûtent cher surtout ceux qui sont pauvres il y a urgence à les zigouiller..c’est un programme économique.

  12. Vautrin voulait être PREMIER MINISTRE, elle était contre le MARIAGE POUR TOUS mais c’était mauvais sur sa carte de visite, elle veut avoir LA LOI EUTHANASIE désormais…

  13. C’est hallucinant le programme des euthanasistes concernant la liste des malades à  » liquider », car c’est ça qui semble être leur »projet », se débarrasser à terme des trop vieux, des malades, des jeunes dépressifs, voire tout simplement ceux qu’ils considèrent « inutiles à la société dont il faudrait réduire le nombre de ses composants. Tout ça au nom du « bien,de l’humanité et de la compassion » A ce rythme, pourquoi pas des camps de concentration comme pendant la deuxième guerre mondiale, mais ceux-ci transformées en centre d’euthanasie. Mais ces gens qui ont ces projets et qui avancent masqués sont des futurs criminels.

  14. Les 2 rêves, les 2 projets de ce président machiavélique : étendre l’avortement jusqu’à pratiquement la veille de l’accouchement (la grande Simone Weil a dû se retourner dans sa tombe) et propager l’euthanasie. Mais il ne faut surtout pas appeler « euthanasie » ces gestes confisquant la vie. Avec la loi Leonetti, nous avons les outils pour offrir une mort sereine à ceux qui sont en souffrance, en fin de vie. Mais peut-être que cela coûte trop cher ? Pas plus cher que les privilèges accordés à vie aux anciens présidents et autres politicards. A ceux qui parlent si bien de barbarisation de notre pays, je voudrais juste leur demander comment pensent-ils qualifier une civilisation qui tue ses humains les plus faibles ? Les plus faibles et les plus pauvres, car nos décideurs ont les moyens de bénéficier des soins les plus au top. Je dirais aussi soignons en priorité les Français, ceux qui ont cotisé pour. Et soignons d’abord les malades, avant de prendre en charge en ALD les changements de sexe, les interventions our motifs religieux ou esthétiques.

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