Européennes 2024 : la position bancale des évêques

Les pasteurs condamnent l'avortement et l'euthanasie mais encouragent « le projet européen » soutenu par Macron...
êvêques

À l'approche des élections européennes, rien n'est trop gros pour décourager les électeurs de se tourner vers les partis dits d'« extrême- roite ». En France, si Emmanuel Macron et ses soutiens s'y emploient avec les gros sabots qu'on leur connaît, les évêques représentant les Conférences épiscopales de l’Union européenne se sont aussi lancés dans l'aventure avec davantage de subtilité.

Dans une déclaration commune, notamment signée par le français Mgr Antoine Hérouard, premier vice-président de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), les évêques ont ainsi appelé à un « un vote responsable encourageant les valeurs chrétiennes et le projet européen ». Selon eux, beaucoup des premiers artisans de l'Union européenne étaient « des catholiques engagés », dont le projet était de « garantir la paix, la liberté et la prospérité ». Noble cause qu'il faut absolument poursuivre en ces temps difficiles, insistent les ecclésiastiques. Surtout, pas de rupture.

La suite est encore plus claire et cible directement les partis qui critiqueraient l'Union européenne. Difficile de ne pas comprendre qui est visé : « Nous savons que l’Union européenne n’est pas parfaite et que nombre de ses propositions politiques et juridiques ne sont pas conformes aux valeurs chrétiennes et aux attentes d’un grand nombre de ses citoyens, déclarent les évêques, mais nous croyons que nous sommes appelés à y contribuer et à l’améliorer avec les outils que nous offre la démocratie. » Et Mgr Hérouard de marteler dans les colonnes de La Croix : « Il est important que chaque citoyen, en votant, rappelle son soutien au projet européen et n’exprime pas seulement une mauvaise humeur ou des critiques. » Comprenez : on prend les mêmes et on recommence.

Deux questions se posent. D'abord sur la neutralité que l'on attend des hommes d'Église. Le nom des candidats n'est pas cité, mais on sait pour qui il ne faut pas voter. Une déclaration qui n'est pas sans rappeler un texte publié le 18 janvier 2022 par les évêques de France : à l'approche des élections présidentielles, il invitait les électeurs à ne pas tomber dans « des replis nationalistes ». Tout était dit sans que rien ne soit nommé. Cette ellipse ressert donc à l'approche des élections européennes. Pourquoi se priver, c'est si subtil !

La deuxième question porte sur la cohérence de cette déclaration : quel est donc ce candidat qui porte une vision combinant « les valeurs chrétiennes et le projet européen » ? Existe-t-il vraiment ? Il ne peut en tous cas s'agir de Renaissance, avec sa constitutionnalisation de l'avortement fustigée par les évêques de France, son intention de porter le combat à l'échelle européenne en inscrivant ce droit dans la Charte des droits fondamentaux de l'UE ou encore son projet de légaliser l'euthanasie. Jordan Bardella et Marion Maréchal sont éliminés d'avance puisque sans doute porteurs des « replis nationalistes ». Quant à La France insoumise, les valeurs chrétiennes du parti semblent plutôt anecdotiques. Qu'à cela ne tienne, les évêques ont pensé à tout : l'UE n'est pas parfaite et « nombre de ses propositions politiques et juridiques ne sont pas conformes aux valeurs chrétiennes », admettent-ils, comme indiqué plus haut, mais puisqu'on peut « l’améliorer »... Ainsi, il aurait fallu un candidat qui privilégie les valeurs chrétiennes, mais comme ce n'est pas possible, eh bien, on fera sans ! Un étrange et dramatique fatalisme pour des hommes d'espérance.

Picture of Marie-Camille Le Conte
Marie-Camille Le Conte
Journaliste à BV

Vos commentaires

39 commentaires

  1. Le clergé ferait mieux de s’occuper de ses ouailles et de ses églises au lieu de se mêler de politique. Il y a deux mille ans, ça c’est très mal fini…

  2. Comme si, dans le doute, un électeur allait chercher une réponse dans un texte publié par les évêques qui, comme on peut le voir, reconnaissent eux-mêmes que les valeurs chrétiennes ne sont pas la priorité de l’UE !

  3. Encourager à promulguer les valeurs chrétiennes, être contre l’avortement, contre l’euthanasie, ok c’est leur domaine, mais l’Europe est une question purement politique et ils n’ont pas à s’en mêler.

  4. Chaque fois qu’on est indécis sur une question, et qu’on aurait envie de se tourner vers la religion catholique pour y puiser un avis qui soit en phase avec notre culture et nos sentiments, les positions de sa hiérarchie sonnent étrangement faux. En général, une secte qui prend son essor et devient populaire se transforme peu à peu en religion et desserre son emprise sur ses ouailles, mais je pense que le parcours inverse est également valable, et que l’Eglise radicalise son discours et s’implique dans des débats dont elle devrait rester absente, dans un ultime effort pour rameuter ses ouailles.

  5. Ces évêques, qu’ils se contentent de répandre l’évangile et le message du Christ… Qu’ils se battent contre ce qui en vaut la peine : Les abomination de notre temps… Et qu’ils laissent la politique aux politiciens…

  6. L’Eglise s’est toujours passionnée pour la politique. Le hic c’est qu’un chrétien va à l’église pour chercher du réconfort et de l’espérance d’ordre métaphysique avec la promesse d’un au-delà. La politique c’est le monde matériel. Les deux plans, parfaitement respectables au demeurant, ne sont pas censés se croiser.
    Les délires gauchistes et tiers-mondistes du Pape François abaissent en réalité sa fonction. Visiblement ses sous-papes , je sais c’est nul mais j’ai pas pu résister ;) continuent dans la même veine.
    En revanche, lorsque l’Eglise affirme son désaccord sur l’avortement ou l’euthanasie, ce ne sont pas des sujets politiques qui l’intéresse, même si ces questions passent par la loi et le parlement, mais des sujets de philosophie et d’éthique. Et là, l’Eglise est dans son rôle.
    Mais dès qu’elle indique pour qui il faut, ou plutôt il ne faut pas, voter, là elle est clairement out !

  7. Depuis Vatican 2, l’Eglise comme ses seigneurs, sont de moins en moins catholiques et ressemblent de plus en plus à une grosse secte en voie de disparition. Alors que pour de vrais conquérants apostoliques, ce qu’ils devraient tous être, la période que nous vivons devrait être du pain béni pour retrouver leurs ouailles et les faire fructifier. Las, on en est loin !

  8. Je me demande de quoi se mêle les évêques ? qu’ils s’occupent de leurs problèmes ça serait déjà bien !

  9. Pour ma part, tous ces « Monsignores » sont complétement déconnectés d’avec leurs curés qui eux sont sur le terrains tout comme nos « élites politiques ». Ces gens là ne voient que leur position et avantages qu’ils en retirent et se foutent complétement du peuple. A ignorer !

  10. Marion Maréchal me paraît la plus en phase avec la déclaration des évêques : elle défend la civilisation chrétienne et les valeurs chrétiennes, notamment sur le plan sociétal. On ne peut pas la qualifier de nationaliste car elle tient à rester dans l’UE pour en corriger les imperfections ; défendre les intérêts de son pays n’est pas du nationalisme.

    • Défendre la France et ses valeurs, seule Marion le fera. Jordan était déjà député européen et qu’a-t-il fait. Il faut dire qu’il n’était pas souvent présent.

  11. Les évêques français, du moins la majorité de la CEF ne respectent pas leur propres règles temporelles, puisqu’ils font de la politique insidieusement, mais surtout ne respectent pas le Christ, en favorisant des candidats et des programmes contraires aux valeurs chrétiennes.

    C’est une trahison spirituelle.

  12. Pfff il est grand temps d’avoir une Apparition salutaire. Le faux pape et ses acolytes devraient être mis en présence du Fils de Dieu pour explications. Un retour vers la lumière et la lucidité s’impose.

    • Il y en a qui auront des comptes à rendre, un prof de mes enfants (ex-séminariste) leur avait dit : les évêques et cardinaux, ne croient pas en Dieu pour la plupart. Peut-être avait-il raison, sinon, beaucoup d’entre eux devraient se faire des cheveux..

  13. Ont-ils compris le message du Christ à ses disciples « Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas de ce monde » ? Se rappellent-ils que Chirac a exigé que soient enlevées de la constitution européenne la mention des « racines chrétiennes de l’Europe » ? C’est étrange cette habitude, comme chez Bergoglio, de supprimer toute allusion au Christ dans leurs discours…Napoléon avait bien raison de les appeler « des préfets en violet » !

    • Normal de supprimer tout allusion au Christ dans leur discours. Quand vous dirigez un business et que vous le conduisez à la banqueroute vous n’aimez pas qu’on vienne vous rappeler que le fondateur l’a développé sur la planète entière en partant de rien. :)

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Il faut faire des confettis avec le cordon sanitaire
Gabrielle Cluzel sur CNews

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois