[ÉDITO] « La droite est de retour » : entre illusions perdues et illusions d’optique

Encore faudrait-il s’accorder sur la définition de la droite. Vaste sujet.
Capture d'écran Public Sénat
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L’élection nette et sans bavures de Bruno Retailleau à la tête des Républicains agite désormais toutes les spéculations à moins de deux ans (au plus tard…) de l’élection présidentielle, sur l’air d’une ritournelle déjà bien connue que l’on entend souvent depuis au moins vingt ans : « La droite est de retour. »

« Souviens-toi qu’elle t’a déchiré »

Une rengaine qui nous fait furieusement penser à l’inoubliable chanson de Jacques Brel, Mathilde. Comme aurait dit le regretté Herbert Léonard, pour le plaisir, voici un petit extrait de cette merveille : « Mon cœur, arrête de répéter qu’elle est plus belle qu’avant l’été, la Mathilde qui est revenue. Mon cœur, arrête de bringuebaler. Souviens-toi qu’elle t’a déchiré… » En 2012, les Français avaient renvoyé la Mathilde comme un palefrenier indélicat. L'avait-elle mérité ? Ce n'est pas le sujet. Pourtant, lors de son entretien d’embauche, en 2007, la Mathilde, elle avait promis, juré (« Marie-Thérèse, ne jurez pas, je vous en prie ! »), qu’elle ferait tout bien le ménage de partout dans la maison, y compris dans les coins où on n’allait plus, qu’elle emploierait les grands moyens, qu’elle irait même à coups de Kärcher™ nettoyer tout ça. Finalement, la Mathilde, paresseusement, s’était plutôt appliquée à faire le lit de la gauche, qui n’en demandait pas tant d’ailleurs. On se souvient du mot d’esprit du tout aussi regretté Patrick Devedjian, authentique homme de droite, lorsque Nicolas Sarkozy nomma des ministres de gauche, dont Kouchner (au moins, ça rimait avec Kärcher™) : « Je suis pour aller très loin dans l’ouverture, y compris jusqu’aux sarkozystes, c’est dire ! » Vous me direz que tout ça, c’est de l’histoire ancienne, que c’est « payé, balayé, oublié », qu’on se fout du passé, que les illusions perdues de naguère ne doivent pas nous empêcher de s’en fabriquer de nouvelles pour demain. Voire...

Les Français préféraient la Marine à la Mathilde...

Cependant, depuis le renvoi de la Mathilde, la maison a continué de tourner. Fallait bien. Tant bien que mal. Plutôt mal, du reste. Pendant cinq ans, la France s’offrit un bon gros majordome qui préféra de lui-même rendre son tablier à la fin de son premier contrat, voyant que le rengagement était mal barré. Vint ensuite qui vous savez. Il allait dépoussiérer la France, tout moderniser, comme on ne l’avait pas fait depuis Napoléon. Tout bousculer du sol au plafond. Une sorte de Monsieur Plus 2.0 qui allait installer les commodités à tous les étages. Pendant ce temps, les héritiers de Mathilde, inlassablement, continuaient à frapper à la porte des Français. Certains avaient retourné leur livrée pour se faire embaucher par le nouveau maître d'hôtel qui se prenait pour le roi. D'autres rongeaient leur frein. D’entretien d’embauche en entretien d’embauche, c’est-à-dire d’élection en élection, la concurrence était de plus en plus rude, notamment à leur droite. Plus ça allait, plus les Français préféraient la Marine à la Mathilde à travers ses rejetons. En 2022, ce fut l’affront suprême : même pas 5 % à l’élection présidentielle pour la Valérie, laissée sur le pas de la porte de service comme une souillon. Éric Zemmour les voyait terminer comme le Parti radical-socialiste des IIIe et IVe Républiques, c’est-à-dire en supplétifs, en employés des tâches subalternes dans les sous-sols de la vaste maisonnée. Et puis, après une dissolution foutraque, une majorité introuvable, fruit d'accords électoraux contre-nature mais finalement bien pratiques, voici qu'on les rappelle au service.

Cinquième groupe de l’Assemblée nationale, avec 5,41 % des suffrages exprimés au second tour des élections législatives (on comprend qu'ils soient contre la proportionnelle), ne voilà-t-il pas qu’ils se retrouvent à occuper les postes les plus prestigieux de la domesticité gouvernementale ! « Divine surprise », comme disait Maurras, qui était bien de droite, lui. Le miracle des illusions d’optique. De là à conclure que « la droite est de retour », c’est peut-être aller un peu vite en besogne. Mais pourquoi pas. Encore faudrait-il s’accorder sur la définition de la droite. Vaste sujet.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

91 commentaires

  1. La définition de la droite c’est celle du Général, Nation, Souveraineté, Sociale, mais surtout un Président dont le seul objectif c’est de faire gagner la France pas de penser à lui.

  2. Faut pas réver….Même si Retailleau a enfin montrer un chemin vers un possible retour de la droite on est loin du résultat final . En annonçant rapidement avec les anciens  »Eléphants » LR qui sont de retour, qu’il n’y aura aucun accord de partis …ce que son ami Louvrier appel les chapelles…il prépare le terrain au Centre mou et à E. Philippe….Ce qui est encore plus navrant, c’est que les médias ont présenté ce résultat d’élection interne comme une victoire à une Présidentielle !!

  3. Le poste de ministre de l’intérieur est incompatible avec celui de chef de parti. Le bruno n’a pas compris le piège tendu par macron, bayrou et leurs comparses, ce qui prouve qu’il n’est pas malin ! Il se fera exclure de la course à la présidentielle quand ses adversaires (amis ?) sortiront son bilan catastrophique, au profit d’Edouard philippe !

  4. MLP est montée à l’assaut de la présidence en Cheveau-Léger : elle s’est débarrassée des bagages de son père et n’a plus guère de différence avec ses concurrents, LFI comprise. Bien sûr ça l’a fait monter dans les urnes mais au dépens de toute idéologie de Droite. Quant à son second il est ado comme le fût Macron. Regardons ailleurs désormais.

  5. Excellent article ! Merci M.Michel.
    En effet, que signifie la droite aujourd’hui ? De quoi la  » droite » est elle ( encore) le nom dans ce marasme politicien et cet effondrement des valeurs sociétales et  » républicaines » ? Quand les partis politiques dits  » de droite  » ne parlent plus de la France, et encore moins de la patrie, se perdent, dans des compromissions indignes, et se renient pour des postes, que faut il en attendre ? Plus que jamais, au vu de l’état de ce pauvre pays,  » ni de droite, ni de gauche, mais pour la France » comme disait notre Grand De Gaulle.

  6. Un nouveau « décapeur à haute pression », ?………………
    (car le mot utilisé par le tout nouveau Français issu de Hongrie conseillé par un mentor douteux ,était comme le frigidaire une marque de pub. MAIS ,sans eau, ni électricité ni pression )
    Est instauré, à l’aide d’idées copiées au et du RN ,ce nouveau « zoo « rot » . cette nouvelle arche , de bric et broc, telles les « gachistes » de minorités minoritaires ,et tribus divergentes prêtes à touts pour continuer à bouffer du caviar au miel en toutes libertés et trahisons.

  7. Le sauvetage du pays ne peut venir que d’un OVNI genre Milei car nous ne pouvons rien attendre de ceux qui sont aux manettes depuis des lustres précipitant la France dans l’abyme , ils sont au pouvoir aujourd’hui et dans un semblant d’opposition pour nous faire croire , mais pour çà , les français ne sont pas prêts n’étant pas encore assez au fond du trou .

  8. La droite, son sens de l’héritage immatériel, de la Nation et donc des frontières, est le véritable ennemi de la finance….La gauche en est la fausse opposition sous contrôle. Tout le reste en découle. Les politiciens de droite qui ont feint de croire la litore d’un Macron « de droite » quand celui ci venait de chez Hollande et a nommé Belloubet gardes des Sceaux avec les conséquences que nous subissons pour notre survie même au quotidien, sont juste des opportunistes et leurs électeurs des imbéciles.

  9. Vous avez raison, qu’est-ce que la droite ? Ce qui est sûr est que les LR ne sont pas à droite, au mieux au centre, c’est à dire voguant au gré des intérêts individuels de politiciens en mal de mandat (postal)

  10. Tiens il y aurait une droite en FRANCE, une droite molle oui dont s’entoure Retailleau, ce n’est surement pas avec cet attelage de bras cassés que l’on va s’en sortir.

  11. Merci Mr Georges MICHEL pour votre lucidité : …et puis y a Mathilde belle comme un soleil et qui m’aime pareil (?ah bon,) que moi j’aime Mathilde !!!

  12. De retour, vous y croyez, moi pas. Ils ne sont même pas capables de se mettre d’accord entre eux, ce n’est pas pour former les rangs, défourailler leur rapière et partir bouter dehors tous ceux détruisent la Gaule et les Gaulois. Que va-t-il donc se passer, personne n’en sait rien, mais tout le monde a une petite idée ! Sauf miracle, bien sûr.

  13. Tout cela est bel et bon mais il y a urgence (Cf. l’édito précédent). Si les partis d’opposition (oui même à l’intérieur du gouvernement…) ne mettent pas au point un programme minimum commun, ils seront pires que ceux auxquels on reproche de s’être assis sur le référendum européen. Car cela urge comme en 1914 où se sont mis ensemble des politiques qui ne s’estimaient guère (litote). Et que l’on se rappelle le déclin de l’empire byzantin miné par des dissensions internes. Les Turcs l’ont grignoté puis englouti définitivement…

  14. Wauquier est bien décidé à torpiller Retailleau. Leurs querelles ne nous intéressent pas.

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