Droits de douane : c’est la guerre !

Parce que - on est bien d’accord - jusqu’à ce jour, une paix commerciale éternelle régnait de par ce vaste monde !
trump

« La guerre commerciale est déclarée », peut-on lire, ici et là, après que Donald Trump a lâché sa bombe des droits de douane. Parce que - on est bien d’accord - jusqu’à ce jour, une paix commerciale éternelle régnait de par ce vaste monde ! Cela ouvrira-t-il un nouvel « âge d’or » économique, pour les États-Unis, comme le prétend l’hôte de la Maison-Blanche ? Cela reste à démontrer mais, comme le faisait remarquer Marc Baudriller, « le président américain met les doux rêveurs d’un monde sans frontières au pied du mur ».

On a déjà oublié le Mercosur

On semble l’avoir déjà oublié, mais il y a quelques mois, la quasi-totalité de la classe politique française était vent debout, avec plus ou moins de conviction chez beaucoup et une certaine hypocrisie chez d’autres - notamment dans la Macronie -, contre la signature du traité de libre-échange avec le Marché commun du Sud (Mercosur). Un traité qui porte en substance la quasi-suppression des droits de douane pour les produits agricoles en provenance de cinq pays d’Amérique du Sud et, par conséquent, une menace pour plusieurs de nos filières agricoles, comme l’élevage. Verrouillé « administrativement » et idéologiquement par la grosse machine bruxelloise qui ne s’arrête jamais, la France n'y peut mais. Le 6 décembre 2024, Ursula von der Leyen signait pour l’Union européenne, à Montevideo en Uruguay, le traité avec quatre des cinq chefs d’État sud-américains du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay). La photo où l’on voit Leyen triomphante au milieu des représentants de ces quatre nations souveraines symbolise tout, résume tout. Certes, il reste l’étape de la ratification mais on trouvera bien un biais pour expliquer que l’on ne peut pas faire autrement.

Le pari national de Trump

Tout cela pour dire qu’il faudrait peut-être avoir la mémoire moins courte en matière de droits de douane et admettre que si leur suppression peut avoir des effets catastrophiques, c’est peut-être qu’en creux, leur maintien, voire leur augmentation, peut avoir des effets bénéfiques. C’est comme tout : tout dépend de quel point de vue l’on se place. Visiblement, Trump se place dans la perspective exclusive des intérêts économiques américains. À raison – c’est le pari de Trump - ou à tort, car cette augmentation des droits de douane sera supportée aux États-Unis par les consommateurs et les entreprises ayant besoin de produits importés, soit en renonçant à certains produits (mais on ne peut pas renoncer à tout !), soit en allant voir ailleurs (le pétillant argentin évoqué par Marc Baudriller !), soit en payant le prix et en alimentant la machine inflationniste. La Bourse de New York annonçait d’ailleurs, ce jeudi 3 avril, un recul, notamment pour les valeurs à forte technologie, tributaires de leur chaîne d’approvisionnement (-9 % pour Apple). Mais, quoi qu’il en soit, le président américain se place exclusivement dans cette optique nationale. Ce qui nous est désormais interdit en Union européenne, la compétence économique ayant été déléguée, pour ne pas dire abandonnée, à Bruxelles : la photo de Montevideo !

Une redoutable bombe à fragmentation

Et c’est là, d’ailleurs, que l’on voit que la décision de Trump est une redoutable bombe à fragmentation. En effet, l’ensemble des pays de l’Union européenne devraient se voir appliquer des droits de douane à 20 %, contre seulement 10 % pour le Royaume-Uni. La presse française a beau jeu de souligner que les Britanniques espéraient mieux, que leurs appels du pied aux Américains ont été vains, que malgré leurs efforts de négociation, ils ne devraient pas être épargnés par Trump. Oui, mais 10 % et non 20 %. 10 %, c’est-à-dire le taux dit de base. Certes, le gouvernement travailliste ne minimise pas l’impact de la décision unilatérale de Trump sur l’économie britannique, mais que dit Starmer ? « Nous continuerons de négocier un accord dans notre intérêt. Les décisions ne seront guidées que par nos intérêts nationaux et par ce qui est le mieux pour la sécurité des travailleurs. » « Intérêts nationaux » : tout est dit. De son côté, ce jeudi, Emmanuel Macron a qualifié la décision de Trump de « brutale et infondée », affirmant qu’« avec les décisions de cette nuit, l’économie américaine et les Américains, qu’il s’agisse des entreprises ou des citoyens, sortiront plus faibles qu’hier, et plus pauvres ». Il a par ailleurs appelé les Européens à « rester unis » et mis en garde contre la tentation de « jouer solo ». Aurait-il des doutes, de la part de ses chers partenaires européens ?

Un solo qui semble, pour l’instant, ne pas si mal réussir aux Britanniques « brexités ». Certes, le principal partenaire économique du Royaume-Uni reste l’Union européenne, avec 52 % de ses exportations, mais si l’on raisonne plus finement par pays, on voit que les États-Unis représentent 13,8 % de ses exportations quand la France, elle, ne pèse que 5,6 %. On devrait se souvenir alors du mot de Churchill : entre le continent et le grand large, les Britanniques choisiront toujours le grand large…

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

64 commentaires

  1. Ce qui me fait doucement marrer ce n’est pas tant les décisions prises par Donald Trump, qui d’ailleurs ne nous a pas pris au dépourvu, vu qu’il annoncé son programme il y a bien longtemps, non, ce qui me fait rigoler c’est le culot effronté d’un Macron qui veut donner des leçons « d’économie » à l’Europe et … au monde alors qu’il a mis son propre pays et ses concitoyens en faillite réglée !! Plus hypocrite que ça, tu meurs …

  2. Les USA taxent les produits venus de l’étranger, c’est leur droit. L’UE importe gratis et inflige à ses propres produits surtout agricoles des normes et taxes. Et la France championne du monde en rajoute. Et ils veulent nous faire croire que çà peut marcher! Fabriquons construisons cultivons élevons français ! Ça réduira déjà de beaucoup les importations. Une fois de plus du bon sens svp!

    • Ce qui m’amuse beaucoup, c’est le language guerrier utilisé par les dirigeants de l’UE dont Macron pour contrer les mesures douanières de Trump, dont je salue le courage et la détermination. Mais ces foudres européennes, on va les mettre en œuvre si on ne réussit pas à négocier, mais quelles sont-elles ces mesures, personne n’en sait trop rien, l’Europe n’ayant pas eu le temps d’y penser vraiment depuis janvier et les élections américaines. Sans doute, nos bravaches étaient déjà trop occupés à détruire l’économie russe pour soutenir le délire ukrainien.

  3. Question: Quand un droit de douane de 20% est augmenté de 20%, ça fait combien? selon moi 24% et non 40% Ou bien il faut dire qu’on ajoute un droit supplémentaire de 20%

  4. Nous devons absolument réagir à la guerre déclarée par Trump @ Cie . Dès aujourd’hui , nous devons cesser d’importer le gaz de schiste américain ! non mais , on verra bien qui est le plus fort …..

  5. Après la Russie qui devait être ruinée par Monsieur le Maire, maintenant le tour des USA par Macron  »himself  ». Je pense que l’Europe et la France le seront avant. Décision brutale dixit le freluquet, décision déjà annoncée depuis des mois et toute tournée vers la guerre en Ukraine l’Europe n’a rien fait pour trouver des solutions.

  6. Hier un certain Bruno voyait l’économie russe à genoux, aujourd’hui Manu présage celle des USA affaiblie et appauvrie… Pourquoi ai-je le mauvais esprit de penser que l’économie libre-échangiste, mondialiste et sans-frontiériste de mon pauvre pays aimerait bien être aussi mal en point ?

  7. Merci Monsieur Baudriller pour remettre les pendules à l’heure, en quelques mots choisis !
    Pensez-vous vraiment qu’un pays tel le Japon n’appliquait pas ce genre de règles, et depuis longtemps, ou la Corée du Sud elle également ?
    Quand à « l’UE de la folie des grandeurs » perdues, et les pays qui la forme, les voilà remis à leur place, faire du business ça ne marche pas que dans un seul sens, la réciprocité également.
    De plus, on ne peux pas dire que Donald Trump n’avait pas prévenu… Ce serait faire preuve d’une sacrée mauvaise foi !
    Mais non, tous nos dirigeants européens, même un ex banquier ; suivez mon regard ; pensait que c’était « a joke »… C’était faire preuve au mieux ou d’arrogance, au pire ou d’une énorme stupidité !
    Donald Trump a promis de « Make America Great Again », c’est-à-dire bosser pour l’Amérique et les Américains, pas pour l’UE, le Canada, la Chine, etc., on ne va tout de même lui reprocher de tenir ses promesses, hein ?
    Ah oui mais non, « nous » sommes tellement habitués à élire des gens qui promettent l’eldorado, puis nous offrent le cloaque, que nous ne croyions plus en rien ni personne !
    Voyez les instituts de sondages aux USA, pas leurs collègues français qui travaillent pour la désinformation ambiante, non, entre 30 et 40% des « Democrats » sont très ou extrêmement satisfait de la politique de Donald Trump.
    On va me dire : « oui mais, tous les signaux boursiers sont à la baisse »… La bourse est un baromètre qui attend pour voir, et le jour où elle a vu, elle est contente.
    Les dizaines de milliards d’investissements pleuvent sur les USA, de partout, vous y voyez un hasard vous ? Moi pas !

  8. et en douce, Van der Leyen signe le Mercosur, Macron vend des industries de pointe aux Américains etc…
    Je n’arrive pas à plaindre les vignerons qui verront leurs millions fondre. Les petits vignerons que je connais ne souffriront pas de ces droits de douane, ils vendent en local.

  9. Rien n’interdit à l’Union européenne, il me semble, d’ augmenter ses droits de douane.
    Simplement les dirigeants de cette union pensent que ce serait néfaste, car comme souligné ici cela pénalise le consommateur et les entreprises ayant besoin de produits importés.
    L union européenne s’avère plus libérale que l Amérique. Ou du moins Trump est moins libéral que Mme von der Leyen.
    La bourse américaine a baissé mais ce n’est pas une victoire américaine ni européenne, les bourses européennes ont baissé également. C’est le commerce international qui baisse et donc la sainte « croissance » sur laquelle repose le système capitaliste libéral qui est en souffrance.

    • Vous parlez d’une Union Européenne qui n’existe pas. Il serait mieux de parler de nations européennes. Trump dit qu’il ne reconnaîtrait pas les structures supra nationales. C’est une très bonne chose mais qu’il n’oublie pas que la doctrine des US était de détruire les souveraineté par la mise en place des structures supra nationales non élues. Le temps passé, les choses évoluent c’est tant mieux en l’occurrence.

  10. Droit de douanes augmentés égal inflation égal baisse du pouvoir d’achat du peuple américain égal hausse du loyer de l’argent égal à terme récession ou au moins stagflation, ça c’est ce que dit la science économique, maintenant il y a la psychologie des foules et la négociation, quoi qu’il en soit, au moins Trump fait ce qu’il a dit.

  11. Notre musicastre de la finance prétend influencer Trump dans sa décision « brutale »comme il rêve depuis des années de faire plier la Russie.

  12. Avant Trump tout n’était que miel , le machin bruxellois nous enrichissant tout les jours , au fait oû sont nos industries textiles, siderurgiques,pharmaceutiques ,automobiles etc.. ?
    Ach, le patriotisme gross malheur comme dit Ursula .

  13. Sauf que la République de France taxait les produits bien plus que les autres, pays le plus taxé au monde et ce sont les premiers à ouvrir leur sale claque pour critiquer les autres alors que leur pays devient le plus misérable de l’UE et que la dictature s’y installe sans que personne ne s’en inquiète !!

  14. La libre circulation des marchandises aboutit à un nivellement par le bas des salaires et conditions de travail, puisque le produit fabriqué par des esclaves (ou presque) et qui arrive chez nous revient toujours moins cher qu’un produit local fabriqué par des ouvriers traités décemment. La mondialisation nous a ruiné, et a dévasté les océans avec les porte-containers et autres cargos. Il est temps de revenir à une certaine proportion d’autarcie et remettre les gens au travail, si on en trouve qui sont encore capables de travailler, car beaucoup de savoir-faire a été perdu.. Trump nous montre la voie.

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