Crise migratoire : le gouvernement italien veut réguler l’action des ONG et de leurs bateaux

Le gouvernement italien, malgré la pression internationale et surtout bruxelloise, entend mettre sur pied une politique de régulation stricte de l’immigration clandestine...
migrants Italie

Dans la nuit de dimanche à lundi, un bateau à la dérive avec à son bord 161 migrants originaires de Syrie, du Pakistan, d’Éthiopie, du Bangladesh et d’Égypte a été secouru par les gardes-côtes au large de Lampedusa. L’embarcation était partie vendredi de Zwara, en Libye - à 60 km de la frontière tunisienne -, les migrants candidats à l’eldorado (supposé !) européen avaient payé jusqu’à 3.000 euros leur passage. Toujours selon l’agence de presse italienne ANSA, la veille, une autre embarcation était arrivée avec 41 personnes, dont une fillette ivoirienne de deux ans, morte peu après l’arrivée. Le 19 décembre, le navire Rise Above de l’ONG allemande Mission Life Line a débarqué, sur le port de Gioia Tauro (Calabre), 27 clandestins syriens dont 9 femmes. C’est l’un des cinq navires qui ont repris la mer à la recherche des migrants, généralement au large de la Libye. À Livourne, en Toscane, deux navires affrétés par des ONG sont en approche, le Life Support de l’ONG Emergency et le Sea-Eye 4. Ils sont allés chercher au large des côtes africaines les migrants, qui avaient grassement payé les passeurs-trafiquants d’êtres humains, embarqués sur des navires de fortune.

Les premières mesures prises par le gouvernement obligent les ONG à contacter les autorités portuaires pour se voir attribuer un port sûr de débarquement à l’instant même où ils ont recueilli à leur bord les migrants. Ceci pour éviter les ronds dans l’eau inutiles de ces navires devant les ports italiens pour les obliger, sous la pression notamment politique et médiatique européenne, à accueillir inconsidérément tous ceux qui se présentent. La règle est donc, pour les ONG, de se signaler immédiatement, une mesure provisoire et indispensable, ne serait-ce que sur le plan de l’organisation à terre de l’accueil des migrants. Mais une règle, pourtant encore bien accommodante, que les ONG ne prennent même pas la peine de respecter : ces dernières heures, une ONG s’étant signalée aux autorités avec un certain nombre de clandestins à son bord et s’étant vue attribuer un port de débarquement est retournée chercher d’autres migrants et se dirige maintenant vers le port de Livourne avec le double de migrants prévus : une fois de plus, les autorités sont mises devant le fait accompli.

La réaction de l’élu de Toscane Marco Landi (Ligue) ne s’est pas fait attendre : « Indiquer un port sûr aux navires transportant un nombre réduit de migrants afin de faciliter l’accueil et d’éviter des voyages inhumains : ceci est la ligne du gouvernement, que viennent de bafouer les bateaux attendus à Livourne dans les jours prochains, parce qu’une fois reçue l’indication du port sûr sur la base du nombre de personnes à bord, ceux-ci ont d’abord fait route sur la Toscane, mais sont repartis chercher d’autres migrants sans se soucier de la gestion à terre des 250 migrants (recueillis) à bord, le double de ceux annoncés et dont nous ne connaissons pas, pour une partie substantielle, les détails utiles à leur accueil. Un épisode qui est l’héritage des désastres du gouvernement M5S-PD coupable d’avoir laissé le gouvernement à mains nues pour faire face à l’activité systématique de l’immigration illégale. »

On pourrait à l’infini évoquer ces centaines de clandestins qui débarquent chaque jour sur les côtes du sud de l’Europe (Italie, Grèce, Espagne). Selon l’agence Frontex, les entrées irrégulières sur le sol européen ont augmenté en 2022 de 73 % par rapport à 2021.

Le gouvernement italien, malgré la pression internationale et surtout bruxelloise, entend mettre sur pied une politique de régulation stricte de l’immigration clandestine : ils veulent tout d’abord s’attaquer aux ONG et, par extension, aux pays dont les navires affrétés par ces ONG battent pavillon.

Dans un décret à paraître prochainement, un code de conduite devra être adopté par les ONG spécialisées dans les secours de migrants en mer : c’est à bord que les migrants devront expressément faire une demande de protection internationale, et dans ce cadre, ce seront les pays dont les navires battent pavillon qui devront prendre en charge les migrants, mais seulement après leur débarquement en terre européenne, c’est-à-dire, dans ce cas, en Italie. Le point faible semble être celui-là : qui ne dit que les pays en question (France, Allemagne, Norvège, Pays-Bas, etc.) prendront effectivement en charge ces clandestins ? Pourquoi ne refuseraient-ils pas, comme ils en ont l’habitude ?

Par ailleurs, les navires des ONG auront obligation de se diriger immédiatement vers le port assigné une fois qu’ils se sont déclarés, sans chercher à charger d’autres migrants entre-temps. Enfin, Nicola Molteni, secrétaire d’État au ministère de l’Intérieur, entend bien séparer l’action de navires privés - ceux des ONG - et ceux des gardes-côtes, et encadrer légalement ces actions : ainsi, il explique qu’« il faut distinguer définitivement entre les missions de sauvetage et les activités de recherche systématique. Il s’agit d’un ensemble de règles comportementales qui découlent de conventions internationales et qui prévoient l’obligation de coordonner des sauvetages non autonomes et systématiques : les migrants ne peuvent être maintenus en mer pendant des semaines. Celui qui enfreint les règles encourt d’abord des amendes administratives, puis, s’il récidive, des immobilisations administratives, jusqu’à la confiscation des navires par les préfets. » Une première tentative de régulation de l’action de ces ONG et de ces navires par lesquels, il faut le rappeler, arrivent en Europe seulement 16 % des migrants.

L’objectif est, comme l’a rappelé Giorgia Meloni au sommet européen, d’affronter la question migratoire « de façon structurelle ». En d’autres termes, ce décret est une façon de reverser sur les pays européens la pression migratoire que subissent les pays du Sud, de forcer les États membres à la prise de conscience de l’impossibilité de maintenir ce rythme et cette proportion de flux migratoires sur le continent européen. Un premier pas, donc, mais la route est longue...

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Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

27 commentaires

  1. Quand j’étais un jeune Officier de Marine, dans les années 1960, mes instructions étaient que toute personne recueillie en mer devait être ramenée à son port de départ ou dans son pays d’origine !

  2. Décevante Meloni qui cède déjà à la pression .Comment ces migrants font ils pour payer les passeurs , être si bien équipé en téléphones alors qu’on nous bassine qu’ils n’ont rien et bien sur toujours sans papiers . Les froits de l’homme bafoué dans tous ces pays que l’on oblige à accueillir des populations dangereuses pour les européens et qui vident les caisses de l’état donc qui pillent l’impôt du contribuable . Qui financent ces bateaux …..

  3. Bizarre, sur cette photo comme sur les images des infos je ne vois pratiquement jamais femmes et enfants mais que des hommes dans la force de l’âge . Cette racaille va sous peu nous conduire à -une guerre civile ou nous aurons pas le dessus. ( A MEDITER )

  4. Pourquoi la France subventionne des ONG qui ont pour objectif de ne pas respecter le droit du peuple aborigène français à rester maître de son destin ? 750 000 000 € du gouvernement certainement à multiplier par deux en tenant compte des autres dons impossible à dénombrer (enfin si l’on veut le faire on peut)

  5. … « reguler » ?
    Mais c’est de la traite d’esclaves moderne !
    C’est les interdire qu’il faut faire !

  6. Toute cette agitation autour de l’élection de Mme Meloni n’était que du vent, les italiens ont de l’eau tiède et des coups médiatiques. L’expérience italienne devrait faire réfléchir les français sur ces partis en quête de respectabilité. Selon les médias l’élection de 80 RN à l’assemblée annonçait un cataclysme, in fine ces gens ne brillent pas beaucoup par leur rébellion et cherchent avant tout à préserver leur rente de situation. C’est une grande désespérance, je n’arrive même plus à finir les articles.

    • Vous vous attendiez à quoi ? le seul qui avait le courage, convictions et culture pour mettre fin à tout cela ainsi qu’à l’OTAN était Zemmour. Pourquoi l’ont-ils détruit comme un malpropre d’extrême droite ?
      Macron est un vendu aux USA et une bonne partie de l’UE avec. Les Leyen ne sont pas mieux que les Biden et les autres de pauvres petit ados incapables de réagir comme il se devrait.

  7. Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour voir Giorgia Meloni se coucher.
    C’était malheureusement à craindre …

  8. Pour notre part nous devrions envoyer ces bateaux dans les iles des mers australes . Tous ces gens pourraient devenir français dans la peine .

  9. Le Droit des peuples à disposer d’eux mêmes, de leur culture et de leur avenir est un droit de l’Homme collectif reconnu par l’ONU et donc plus fort que tout le reste et notamment que les droits de l’Homme individuel de la CEDH.

  10. Giorgia Meloni est très en retrait par rapport à ses promesses de campagne sur l’immigration (blocus naval…), d’un autre côté l’Italie a besoin du fric de l’UE. Difficile à résoudre !

  11. Meloni a déclaré vouloir rester dans l’UE (et accessoirement dans l’OTAN). Elle est donc tenue d’appliquer les traités en vigueur qui rendent les expulsions de clandestins quasi impossibles.

    Conclusion: toute cette agitation, c’est du flanc. L’Italie se pliera au bon vouloir de Bruxelles et de la CEDH en la matière. Il n’y a rien à espérer de ce côté-là.

  12. Tiens l’Italie fait dans la mollesse. Collecter des migrants qui paient leur traversée constitue un viol des traités. Des ONG violent, à l’évidence, les traités internationaux et, par exemple, FRONTEX en a la preuve. N’importe quel étudiant en droit trouverait la base légale, après recherches d’accord, pour frapper au porte feuille, voire incarcérer les « présidents », si possible riches, de ces organisations pratiquant une forme de terrorisme.

  13. Une belle usine à gaz en perspective pour faire croire qu’on agit tout en ne faisant rien. Les décisions simples et radicales existent. Fin des subventions aux ONG. Impossibilité de régularisation pour quiconque entre illégalement sur le territoire. Toute personne qui ne peut justifier de son age ou qui refuse les tests osseux sera considérée comme majeure.

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