Bruno Retailleau et Némésis, la déception : c’était trop beau !

On avait dit ne pas subir et ne pas s’excuser. Le relèvement de la droite est à ce prix.
Capture d'écran ©Europe 1
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Avec l’investiture du président américain, un vent ébouriffant de témérité semblait souffler, cette semaine, à droite. Comme si on avait enfin compris, en France aussi, jusque chez LR, que le parler vrai sans ambages d’un Trump, d’un Milei ou d’une Meloni était la clé de la réussite. La preuve par deux événements :

Boualem Sansal

Le groupe LR au Parlement européen, tout d’abord, est à l’origine, ces jours-ci, de la « résolution Boualem Sansal ». C’est le général Gomard qui était à la manœuvre en tant que « négociateur » et il ne fallait pas moins qu’un grand chef de guerre pour exhorter certains groupes réticents à mêler leurs voix à celle du RN : « Vous n’allez quand même pas sacrifier un homme sur l’autel de l’idéologie ? », a-t-il tempêté. LFI, on l’a vu, s’est divisée. Le général Gomard a cependant emporté la mise. Et le groupe LR, de son côté, a même voté quelques amendements proposés par le groupe RN. Même si ceux-ci ne ne sont pas passés, le symbole est là : comme Soljenitsyne a ébranlé le premier le mur de Berlin, Boualem Sansal a ouvert une brèche dans le front républicain.

Au Centre de réflexion sur la sécurité intérieure (CRSI)

Invité, mardi, par Thibault de Montbrial à s’exprimer devant le CRSI, Bruno Retailleau, après un exposé très clair (et inquiétant) des menaces visant la France, a dit faire siennes les devises de deux personnalités célèbres de son « pays » : « C’est au caractère vendéen que je dois le meilleur de mes qualités » (Clemenceau), et « Ne pas subir » (maréchal de Lattre). Fort de cela, il a dit vouloir « parler vrai et agir vite », refuser désormais que « la droite au pouvoir abdique ses convictions ». Le ministre de l’Intérieur a affirmé que « les peuples avaient le droit à une continuité historique » et « que les sociétés occidentales étaient plus fragilisées par la censure que par la liberté d’expression ».

Mais le meilleur reste à venir : répondant à Alice Cordier, de Némésis, qui l’interroge sur la possible dissolution d’une officine antifa, Bruno Retailleau la félicite et déclare tout de go « être très proche de [leur] combat ». Alice Cordier elle-même n’en revient pas : « Après des années d’humiliations, de comptes bancaires qui sautent, de réseaux sociaux censurés, de violences par des militants d’extrême gauche, d’article à charge… après tout ça, j’ai été félicitée par notre ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Immense fierté. Bravo collectif Némésis. » Son émotion est palpable. Force est de le reconnaître : on a tort de considérer le binôme Darmanin-Retailleau comme Dupond et Dupont. L’un des deux semble nettement mieux doté, s’agissant de cet organe impossible à greffer faute de donneur, selon le bon mot de l'un de leurs mentors en politique.

Ce vendredi, Bruno Retailleau tacle encore, sur X, le maire écolo de Grenoble Éric Piolle qui appelle de ses vœux un « modus vivendi » (sic) avec les dealers de sa ville : « Le seul modus vivendi acceptable avec les narco-racailles, c’est la prison. » L’inspecteur Harry n’aurait pas mieux dit.

Las, Donald Trump n’a pas été complètement entendu. Lors d’une conversation téléphonique avec Éric Zemmour, celui qui était alors entre deux mandats avait fait cette recommandation au candidat de Reconquête, tirée de sa propre expérience : « Surtout, ne jamais s’excuser. »

Valérie Pécresse

Interrogé, ce matin, par Sonia Mabrouk sur son soutien à Némésis - accusée, sans surprise, d’être une association « violente et raciste » par la LFI Clémence Guetté, Bruno Retailleau a cru bon de donner des gages à la gauche en faisant le choix de prendre ses distances : « J’ai vu, après, que c’était une association qui avait des positions très radicales, qui avait très brutalement d’ailleurs, par exemple, attaqué Valérie Pécresse, et je ne me sens pas du tout proche de cette association en tant que telle. » Et le coq a chanté pour la troisième fois. Quelles sont donc les positions « très radicales » de Némésis que le ministre de l’Intérieur ne partage pas ? On n’en saura pas plus. Quant à l’attaque très brutale de Valérie Pécresse, on imagine qu’il s’agit de la banderole déployée le 13 février 2022 lors d’une meeting au Zénith dénonçant l’islamo-droitisme de celle qui était alors candidate LR ? Sur son site, Némésis en fait un descriptif précis : en 2010, la signature d’une « tribune pour une république multiculturelle et post-raciale » aux côtés de personnalités d’extrême gauche telles que Rockaya Diallo. En 2013, la participation à un colloque, « invitée par un réseau islamiste proche des réseaux musulmans ». La visite, à cette occasion, d’une école coranique au cours de laquelle Valérie Pécresse pose, souriante, aux côtés de fillettes voilées. En 2015, la défense du voile à l’université aux côtés de l’islamiste Mohammed Henniche, secrétaire général de l’UAM93.

Quelques questions se posent : une banderole peut-elle vraiment être qualifiée d’« attaque très brutale » à l’aune de ce que nombre de Français subissent chaque jour en matière d’insécurité ? N'est-il pas bien compréhensible que des féministes fassent grief à une femme politique, réputée de droite de surcroît, de sa complaisance envers le voile islamique ? En toute honnêteté, les yeux dans les yeux, entre Alice Cordier et Valérie Pécresse, de quelle femme Bruno Retailleau se sent-il le plus proche, s'agissant des convictions ?

On avait dit : ne pas subir et ne pas s’excuser. Le relèvement de la droite est à ce prix. Mais la route semble être encore bien longue.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

153 commentaires

  1. On parlait d’alliance des droites, et Retailleau s’est allié à Macron. Il a même soutenu des LFI au second tour. Demain, Gabrielle nous dira que les millions versés par les régions LR Hauts de France et Auvergne-Rhône-Alpes aux assos de passeurs de migrants, ça ne compte pas, que LR c’est quand même la droite ?

  2. Il faudrait que le collectif Némesis songe à intenter à B. Retailleau un proçès en diffamation pour cette affirmation mensongère :  » une association qui avait très brutalement d’ailleurs, par exemple, attaqué Valérie Pécresse  » .
    Très brutalement ?!?
    Cette allégation laisse entendre que les militantes de Némésis auraient agressé physiquement Valérie Pécresse ( le terme  » brutalement  » n’a pas d’autre signification ) , or il ne s’agissait en l’occurence que du déploiement d’une banderolle . Il y a là matière à proçès . Il faut faire tomber ce gouvernement et le chapon Retailleau avec . Qu’il comprenne que la soumission à la gauche ne paie plus .

  3. « refuser désormais que « la droite au pouvoir abdique ses convictions ». Ce ne serait pas une révolution, mais un cataclysme dantesque. A voir.

  4. Et voilà que la moraline de gauche a encore une fois été inoculée à un homme que l’on pensait incorruptible. Si vite, c’est plus que décevant. Il n’y aura donc aucun LR digne de ce combat ? Éric Zemour n’aurait pas faibli, ne reste-t-il que lui ? Bruno Retailleau m’a déçue il n’aura pas de deuxième chance, les deux chances c’est fini pour moi.

  5. Retailleau en progrès, mais peut mieux faire ! 10/10, encore des efforts pour décrocher des résultats tangibles !

    • Sous Darmanin, le taux d’exécution des OQTF était de 7%. Ce taux est passé à quel niveau depuis que Retailleau est à la Place Bauveau? Combien de narco trafiquants ont été mis sous les verrous? Ce nombre est-il en hausse par rapport à ceux su temps de Darmanin? Le nombre d’attaques au couteau était de 120 par jour du temps de Darmanin. Ce nombre est-il en baisse significative depuis que Darmanin a quitté la place Bauveau? Si les chiffres de ces 3 paramètres meilleurs depuis le départ de Darmanin, les premiers résultats tangibles seraient là! Qu’en est-il en réalité? Avez-vous des éléments de réponse?

  6. L’habitude de la droite molle de donner des gages à la gauche semble devenue atavique. Quelle déception ! Enfin Monsieur Retailleau comme plein d’autres ne fera pas tout bien mais on pense qu’il ne fera pas tout mal non plus quand on quand même sur lui pour aller dans le bon sens même 8s’il n’y va pas jusqu’au bout.

  7. Beaucoup d’effets d’annonces de la part de Retailleau et Darmanin .
    Il faut des Lois et au minimum des décrets pour que l’arsenal de la force publique s’active .

  8. Lorsque la guerre est déclarée on doit y répondre. On ne demande pas alors aux combattants qu’elles sont leur religion et leur idéologie. La gauche avec LFI veut nous anéantir, alors battons-nous sans ménagement. Et considérons que les victimes ne seront que les effets collatéraux !

  9. Dommage ce rétro pédalage de Retailleau !
    Ce n’est pas parce qu’on adhère pas à la totalité des actions d’un parti ou d’un groupuscule qu’on ne peut se sentir « être très proche d’un combat » !
    Quasiment tous les partis, même ceux qui nous hérissent peuvent se lancer dans une croisade à laquelle on adhère, pourquoi se refuser à le reconnaître, voir s’excuser d’être complaisant ?
    On touche là le problème de fond qui pourrit notre vie politique et exaspère la plupart des citoyens !
    Nos élus, privés de parole authentique par ces machines de guerre que sont les partis politiques auxquels ils adhèrent en viennent à se conduire comme des marionnettes sans idées ni pensées personnelles !
    Quand feront-ils preuve d’assez de courage pour s’afficher en personne et non comme des moutons bêlants débitant les litanies de la bien-pensance de la caste ?
    Oui Retailleau m’a déçu, c’est dommage car il avait à mes yeux le profil d’un politique ayant une certaine personnalité et des idées plus large que les pathétiques coincéS LR

    • Tout à fait d’accord. Nous avons oublié qu’il est un homme politique avant tout et je pense que nous sommes nombreux à nous retrouver, après quelque espoir, orphelins d’un responsable politique droit dans ses bottes, une fois encore…
      Qu’il était pourtant bon de se dire que le vent tournait et que nous revenions à la raison et au bon sens : las…

  10. Bruno Ratailleau se veut Mr propre, il « veut tout balayer », mais, tout ce cinéma n’est qu’une mascarade de plus des LR, ce parti en pleine déconfiture, Ratailleau c’est 2027 qui l’intéresse, même s’il s’en défend, ils vont se bouffer le foie avec Vauquiez, Philippe, et d’autres encore, tout ce cinéma est orchestré pour essayer de faire oublier le RN, souhaitons qu’une fois encore, les Français ne se laissent pas embarquer dans cette magouille, Bayrou va probablement sauter lui aussi, la gauche en rêve, ce pays est devenu ingouvernable, Macron qui est muet, c’est donc la « chienlit », comme avait dit en son temps De Gaulle!!!

    • Il veut « tout balayer », j’en connais un autre qui avait un « karcher » jamais sorti de son carton !

  11. Il veut jouer le cheval de Troie au seins de ce gouvernement dirigé par la Biroute l’inventeur du en même temps .
    Il est comme tous les politiques de ce pays fort en paroles, l’important c’est de parler et reparler , faire croire en espérant un miracle sans jamais agir .
    Retailleau , Bayrou, Macron Darmanin c’est la même piquette sortie du même tonneau seul change le flacon !!

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