Bayrou achète au prix fort la non-censure du PS : combien de milliards ?

Bayrou a réussi à reconstituer une majorité macroniste en lui arrimant PS et LR. Bien sûr, c'est un camouflet pour LR
Capture d'écran
Capture d'écran

François Bayrou triomphe : il a réussi à obtenir la non-censure du PS, cette fois, et, si l'on en croit les déclarations de son ministre de l'Économie, pour le vote du budget à venir. Obtenir ? Acheter serait plus juste. Et les Français vont progressivement découvrir que la politique du centriste négociant avec le PS a un coût. Et un sacré coût.

La résurrection du PS : un coût amer pour les finances publiques: 2, 3, 4 ou 15 milliards ?

Les négociations avaient été intenses. Le discours de politique générale assez vague. Bayrou a donc dû se fendre d'une longue lettre aux dirigeants du PS en forme de catalogue à la Prévert listant toutes les économies, prévues au départ par Barnier, auxquelles il renonçait : le Premier ministre s’engage à donner le dernier mot au Parlement sur les retraites, il abandonne la suppression des 4.000 postes d’enseignants et l’ajout de deux jours de carence pour les agents publics, il acte une importante hausse des dépenses de santé (+ un milliard), etc. Chiffrées par Le Figaro, « les concessions de Bayrou au PS effacent plus de 2 milliards d’euros d’économies ». Mais le chiffre serait, en fait, bien supérieur car il faut lui ajouter le coût du dérapage qu'induira la réforme de la réforme des retraites, les économies qu'avait déjà rayées Barnier et le coût de la censure, avec la revalorisation automatique de toutes les pensions de retraite, soit 3,6 milliards d'euros (Le Figaro). On s'approche des dix milliards d'euros ! Et même de 15, si l'on suit les calculs de l'économiste Christian Saint-Étienne interrogé par Le Figaro : « Par rapport à la trajectoire Barnier qui était prévue pour l’année 2025, la non-censure correspond à une dégradation de 15 milliards d’euros. » Voilà ce que le PS a coûté à la France, d'abord en censurant puis en monnayant sa non-censure... Un député macroniste cité par Le Monde avouait, au soir de ce jeu de dupes : « Un accord avec les socialistes, ça coûte toujours un peu d’argent. » Une litote qui vaut des milliards...

Et le coût politique, c'est pour LR ?

Mais c'est le coût politique de l'opération qui est peut-être plus lourd et, à ce stade, encore plus incalculable. À qui profite donc cet accord socialo-centriste qui revient, soit dit en passant, à l'ADN fondateur du macronisme ? Eh bien, comme dirait M. de La Palice, aux socialistes et aux centristes. Le PS, moribond, plombé par son alliance avec Mélenchon, est remis en selle ! Merci, M. Bayrou ! À vrai dire, on ne devrait pas en être étonné, de la part de celui qui appela à voter Royal puis Hollande. Bayrou a réussi à reconstituer une majorité macroniste en lui arrimant PS et LR. Bien sûr, c'est un camouflet pour LR qui, par le discours de Wauquiez, se présentait comme le garant du sérieux budgétaire. Le Figaro se fait l'écho de l'agacement des députés LR et croit savoir que « les concessions de François Bayrou à la gauche placent les ministres LR en position inconfortable ». En fait, Bayrou a coincé LR, prisonnier de son image de parti de gouvernement soucieux de ne pas censurer.

PS-LR : un grand écart intenable ?

Bayrou a préféré se tourner vers le PS que vers la droite, vers la dépense publique que vers la rigueur pour l'État, vers la facilité que vers le courage, le tout en prétendant s'affranchir du RN. C'est habile. Mais c'est un calcul à courte vue, car on voit mal un Bruno Retailleau et un Laurent Wauquiez continuer à avaler des couleuvres socialistes, sur les sujets économiques et financiers comme régaliens. Patrick Hetzel, ex-ministre de l’Enseignement supérieur, interrogé par Le Figaro, ne dit pas autre chose : « Le mandat que s’est assigné le Premier ministre est d'essayer de maintenir l’amarrage des LR en s’ouvrant vers le PS. Mais à un moment donné, ce sera un grand écart… On peut toujours essayer de jouer sur cette tension, mais aller plus loin vers la gauche conduirait, ipso facto, à ce que les choses se tendent à droite et à augmenter le degré d’inconfort de nos ministres. » La prochaine crise politique du mandat crépusculaire d'Emmanuel Macron ?

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 21/01/2025 à 13:47.
Picture of Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

63 commentaires

  1. Je crois qu’il faudrait arrêter de positionner les LR à droite, y compris Laurent Wauquiez. Eux qui depuis des décennies sont au mieux au centre, et depuis quelques années plutôt à gauche. D’ailleurs, n’ont-ils pas appelé à voter pour le NFP aux dernières législatives ?

  2. Décidément a force de s’enfoncer la gauche vas finir par trouver du pétrole, quant on constate les scores aux élections de ces partis politiques on a pas fini de s’étonner comment peuvent ils encore avoir la parole, si les verts ne devaient plus exister les socialistes non plus, quant aux communistes, n’en parlons pas.

  3. En ce mois de janvier, période des voeux, osons souhaiter que les électeurs aient enfin le courage, à la prochaine consultation démocratique, de chasser tous ces imposteurs qui les volent et ruinent la France.

  4. Le RN a détruit la confiance qu’il aurait pu inspirer en donnant plein pouvoir à ce gouvernement . À quand son ralliement ?

  5. Ainsi, il a sacrifié des mesures participant à l’égalité privé/public, au dégraissage du mammouth, et donc à l’amélioration des comptes publics, tout en décourageant les forces les plus vives de la nation, pour un intérêt personnel, durer dans la fonction ! C’est non pas une erreur, mais une faute, qui confirme que cet homme n’a pas la stature d’un homme d’Etat. Maquignon il était, maquignon il reste !

  6. « Bayrou achète au prix fort la non-censure du PS » !!
    Question : Pourquoi Bayrou a-t-il accepté un deal avec le Ps ? Jusqu’à preuve du contraire, le NFP dans son ensemble, c’est à dire Ps compris, représente 193 sièges à l’Assemblée, loin, très loin des 289 sièges, voire 290 et donc une majorité qui fasse tomber un gouvernement !! Cela reflète bien l’ambivalence du personnage, toujours le cul entre deux chaises.

    • Tout à fait d’accord, c’est mathématique ! Pourquoi dépenser tant d’argent pour financer une non censure toute acquise ?

  7. Bravo Larcher, Retailleau, Wauquiez ! Et maintenant Lisnard… Dehors les toxiques de la droite macronienne

  8. Comme le gouvernement Algérien tire une rente de la haine contre la France, les Centristes français tire une rente de la lutte contre le RN. Ils sont prêt redonner du pouvoir aux socialistes alors qu’ils ont détruit le pays. C’est scandaleux.

  9. La « classe politique » actuelle quelle qu’elle soit, déshonore le pays depuis plusieurs décennies. Il est urgent que les Français décillent leurs yeux et la sanctionnent.

  10. Ces arrangements entre partie ne tiendront pas une fois de plus. Bonnet blanc et blanc Bonnet. Avant deux mois ce gouvernement saute. Il a placé tous ces anciens gamellards qui ne vise que leurs intérêts, la France, ils s’en foutent.

    • Qu’attendent les LR pour quitter ce gouvernement avant de plonger encore davantage vers le caniveau. Barre à droite et censure avant le chaos il n’y a pas d’autres solution pour la France . Prendre le train Trump avant le déluge qui viendra des Etats Unis.

  11. Bayrou fait du Bayrou comme il a toujours fait, il soigne d’abord ses intérêts. Enfin il faut reconnaitre que c’est un vieillard, on le voit, il est moins assuré, il a du mal à s’exprimer, ça se bouscule un peu, on ne peut être et avoir été, si toutefois il a été un jour. Quand je le vois c’est là que je réalise que j’ai bien fait de poser les gants à 65 ans, je ne me voyais pas devenir comme ça, j’en avais trop côtoyé

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Il faut faire des confettis avec le cordon sanitaire
Gabrielle Cluzel sur CNews

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois