Alexis Kohler, l’intouchable

La procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris vient de renvoyer dans ses buts Éric Coquerel, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Elle classe sans suite le signalement qu'il avait fait quant à la non-comparution de l'ancien secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler devant la commission chargée de rechercher les causes de la variation et des écarts des prévisions fiscales et budgétaires des administrations publiques pour les années 2023 et 2024.
Invocation de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen...
Le 4 mars dernier, Coquerel avait en effet saisi le procureur après que Kohler avait refusé, dans une belle lettre bien ficelée, de se rendre à cette convocation des députés. Argument : « Je vous confirme la position du président de la République, qui vise à faire respecter la séparation des pouvoirs, et mon impossibilité à répondre à vos questions sans risquer de porter atteinte aux principes constitutionnels qui encadrent le fonctionnement de nos institutions. » Kohler avait même brandi la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, notamment son article 16 qui précise que « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution ». Il fallait y penser. Des arguments que, curieusement, Kohler n’avait pas brandis lorsqu’il s’était rendu à la convocation de la commission du Sénat chargée d’enquêter sur l’affaire Benalla. Sans doute n'avait-il pas encore toutes les ficelles, à l'époque.
Séparation des pouvoirs
Et, donc, la semaine dernière, le parquet donne raison à Alexis Kohler. « Le principe de la séparation des pouvoirs et la combinaison des articles 20, 24 et 51-2 de la Constitution ne permettent pas en l'espèce de caractériser l’infraction prévue à l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 », explique la procureur. La séparation des pouvoirs est en effet un principe consacré par la Constitution qui pose aussi le principe du contrôle de l’action du gouvernement par le Parlement dans le cadre des articles 20 et 24 cités par la procureur. Article 20 : « Il [le gouvernement] est responsable devant le Parlement… » Article 24 : « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du gouvernement. Il évalue les politiques publiques. » L’article 51-2, quant à lui, fonde le principe des commissions d’enquête. On rétorquera à juste titre que le président de la République n’est pas le gouvernement.
Seul le Président est irresponsable
Mais l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et citée par la procureur précise bien que « toute personne dont une commission d'enquête a jugé l'audition utile est tenue de déférer à la convocation qui lui est délivrée, si besoin est, par un huissier ou un agent de la force publique, à la requête du président de la commission » « Toute personne » : c’est pourtant clair. On lit et relit cette ordonnance et l’on ne voit pas qu’il y ait des exemptions. Et le président de la République ? Il est évidemment exclu de ce type de convocation, non pas stricto sensu, au nom du principe de la séparation des pouvoirs, mais au nom de l'irresponsabilité du Président, consacrée par l’article 67 de la Constitution : « Le président de la République n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité… » En effet, comme le précise le Conseil constitutionnel, « le chef de l’État n’est responsable que devant le peuple, à la différence du gouvernement qui est responsable politiquement devant l’Assemblée nationale ». Le président de la République, et lui seul, pas la présidence de la République, pas ses collaborateurs. La procureur en a jugé autrement.
Une question, maintenant, se pose : cette décision de la procureur fera-t-elle jurisprudence, comme le pense Matthias Renault, député RN de la Somme et membre de la commission des finances ? Il en tire d'ailleurs cette conclusion : « Le poste de secrétaire général de l'Élysée intouchable… » On imagine que cela doit être le cadet des soucis d’Alexis Kohler : il ne sera pas poursuivi et peut en revanche poursuivre tranquillement sa belle carrière à la Société générale.
Pas de poursuites contre Alexis Kohler, qui a refusé de comparaître devant la commission d'enquête sur le dérapage des finances publiques.
Motif : "séparation des pouvoirs". Pratique !
Cette décision fera malheureusement jurisprudence : le poste de secrétaire général de… pic.twitter.com/OtJ0JfEWcu
— Matthias RENAULT (@MatthiasRN) May 12, 2025
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48 commentaires
Abominable
Société générale ? Combien de licenciements prevus avec un gus pareil aux commandes? Les magouilles de kholer -macron durent depuis 8 ans maintenant.
la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ne sert plus, depuis cette date, qu’à préserver les délinquants, qu’ils soient en joggings à capuches ou en cols blancs. Je ne cite personne, mais …..
N’hésitez pas à citer,mais pas plus de 100 noms , il y en a bien plus, mais il faudrait 10 pages pour tous les citer.
Pratique cette irresponsabilité !
La justice selon le capitalisme de connivence vu par La Fontaine « selon que vous serez pauvre où riche le jugement Etc etc
La loi c’est pour les autres pas pour la mafia macroniste
Il me semble que le procureur de Paris a manifestement tort dans sa réponse :une commission parlementaire dispose de droits de citation directe : les personnes dont la commission a jugé l’audition utile sont tenues de déférer à la convocation qui leur est délivrée, si besoin est, par un huissier ou un agent de la force publique, à la requête du président de la commission.
Il faut ajouter que la commission n’est pas une juridiction, de sorte que la question posée n’est pas celle de l’immunité du président, a fortiori celle du secrétaire général de l’Elysée.
Mais là où Éric Coquerel a fait preuve de coupable faiblesse, c’est qu’il aurait dû requérir directement la force publique, plutôt que de quémander l’avis (dont il savait qu’il serait négatif) du procureur par un signalement.
On aurait touché du doigt le vrai problème.
Que les lois sont bien faites ! Pour certains. Il n’y a plus rien à espérer de ce régime.
C’est à la Sté Gale de savoir ce qu’elle doit faire de cet individu.
Que cette situation est savoureuse ! J’aime votre euphémisme de » brillante carrière à la société générale « . Quand on sait que cette banque est déjà virtuellement en faillite , et que son endettement auprès des banques de re-escompte à atteint un ratio de 1 pour 28 !… Pour rappel au moment de la crise des subprimes , il n’était que de 1 pour 8 ; entendez : 28 euros empruntés pour pouvoir en prêter 1 !
Intouchables? Sommes nous en Inde?
Personne n’est intouchable ! Quant à l’irresponsabilité présidentielle , chaque jour apporte son lot d’événements et pas que sous macron !
Si vous avez un compte à la SG , fermez le . Cela pourra peut-être inciter la direction de cette banque à ne pas employer ce personnage qui se croit au dessus du peuple souverain .
La SG aurait elle remplacé comme bras armé du pouvoir feu l’ancien Crédit Lyonnais et sur un autre point qu’est devenu l’affaire Kerviel et les milliards envolés
Celà fait bien longtemps qu’à côté de la magistrature debout (le parquet) et de la magistrature « assise » (les magistrats du « siège »), il y a la magistrature couchée !
Bien résumé mais il reste encore la magistrature populaire
Ben voyons !
Tout ça est peut-être réglementaire mais néanmoins pas très propre.
Peut-être que dans certaines circonstances ,la crasse est réglementaire .