[SANTE] « Le paracétamol challenge » : stupide et potentiellement mortel

Apparue à l'été 2023 aux États-Unis, cette nouvelle tendance se propage depuis plusieurs semaines en Europe...
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Une nouvelle pratique appelée « On peut en mourir » ou le « Doliprane™ challenge » et qui consiste à consommer le plus de Doliprane™ possible pour tester sa résistance, jusqu'à l'hospitalisation, est en vogue chez les adolescents. Apparue à l'été 2023 aux États-Unis, cette nouvelle tendance se propage depuis plusieurs semaines en Europe, surtout sur le réseau TikTok, et suscite l'inquiétude. Le paracétamol est en vente libre et les adolescents qui sont tentés par ce « jeu » risquent de se retrouver rapidement à la morgue ou avec de graves séquelles.

@eylbe93 Pourquoi toujours des trucs de plus en plus debiles ? #pharmacie #pharmacienne #medicament #paracetamol #challenge #pourtoi #sante ♬ son original - Laure Bf

« Des remontées de terrain récentes, largement relayées par les médias, font état d’intoxications volontaires au paracétamol par des enfants ou adolescents. Nous alertons et appelons à la vigilance sur ces pratiques mettant gravement en péril leur santé », avertissait l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), dans une publication relayée par le site Ameli, le 24 février.

 

 

Depuis l'épidémie de Covid-19, le Doliprane™ banalisé

« Prenez du Doliprane™ et restez chez vous » : telles étaient les instructions des autorités, lors de l'épidémie de Covid-19. Démunis et ne sachant quoi faire, face à cette nouvelle épidémie, les autorités ont préféré botter en touche plutôt que de conseiller au patient d'aller voir un médecin, banalisant ainsi un peu plus l'usage du Doliprane™ auprès de la population. Le Doliprane™ est aujourd'hui ce qu’était l'Aspro™ il y a quelques dizaines d'années. Ce sont pourtant deux produits bien différents - le premier étant du paracétamol, le second de l'aspirine -, avec chacun des propriétés et des inconvénients différents. L’usage du paracétamol a largement distancé celui de l'aspirine, que les modes thérapeutiques et les impératifs du marché ont relégué au rôle d'antiagrégant plaquettaire, alors qu'il s'agit également d'un excellent antalgique et antipyrétique, avec quelques propriétés anti-inflammatoires.

Le paracétamol vendu sous différentes marques (Doliprane™, Efferalgan™, Dafalgan™, etc.) est également antalgique et antipyrétique. Il est très largement utilisé, car aux doses thérapeutiques, il n'y a que peu d'effets secondaires et il ne procure pas de gastrite, comme cela se produit parfois avec l’aspirine. Utilisé chez l'enfant comme chez l'adulte, il se présente sous forme de comprimés, comprimés effervescents, gélules ou suppositoires et il existe une forme injectable que, dans certains services d'urgence, des infirmières n'hésitent pas à utiliser, avant même tout examen médical, partant du principe que cela ne pourra que faire du bien au patient alors qu'il existe des effets secondaires. Cela témoigne d'une banalisation de son usage en milieu hospitalier comme en ville.

Un produit aux effets secondaires qui peuvent être très graves

Le Doliprane™ est devenu le leader incontesté du paracétamol vendu en officine et la population l'utilise souvent de manière irréfléchie, pensant qu'il s'agit d'un produit anodin. En réalité, les effets secondaires peuvent être très graves si on dépasse la dose thérapeutique prescrite. Chez un adulte, on considère qu'il ne faut pas dépasser 4.000 mg de paracétamol par jour, soit quatre comprimés de 1.000 mg. À dose plus élevée, le paracétamol peut provoquer des lésions hépatiques gravissimes pouvant conduire à la mort. Après ingestion, 95 % du paracétamol est métabolisé par le foie en produit inactif, mais les 5 % restants sont transformés en un produit extrêmement toxique qui va entraîner des nausées, des vomissements et des douleurs abdominales liés aux lésions hépatiques. Lésions qui vont s'aggraver et provoquer un ictère et des phénomènes hémorragiques, puis une insuffisance hépatique gravissime entraînant le coma puis la mort.

Les intoxications au paracétamol nécessitent une hospitalisation d'urgence et l'utilisation de N-acétylcystéine, substance habituellement prescrite pour fluidifier les sécrétions bronchiques mais, dans ce cas, utilisée à des doses bien supérieures. Hélas, cela ne suffit pas toujours pour sauver le patient.

Prudence, donc, le paracétamol n’est pas un produit anodin !

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Dr. Jacques Michel Lacroix
Médecin - Médecin urgentiste et généraliste

Vos commentaires

36 commentaires

  1. Décidément, une frange de notre jeunesse, de plus en plus stupide, ne sait quoi inventer et utiliser pour se détruire, c’est vrai qu’il y a le choix ! Drogues diverses et variées, capsules de gaz  » hilarant », médicaments comme le tramadol, puis maintenant le banal mais dangereux paracétamol dans des challenges débiles, sans oublier les fameux  » réseaux sociaux » ! J’avoue que cette époque est très éprouvante pour les parents
    qui ne se droguent pas !

  2. Si des ados en abusent, cela signifie que les parents ne les mettent pas en garde donc n’assument pas. Ce n’est pas une raison pour en interdire la vente

  3. Aucun médicament est anodin s’il est efficace . Pour le Doliprane , ou autres anti douleur , celui ci est dangereux pour le foie et les reins . Il faut accepter parfois la douleur ! Je prends le moins possible de médicament et j’ai travaillé 35 ans dans l’industrie pharmaceutique .

  4. Le Paracétamol, en version Dafalgan où Doliprane, sont des antis inflammatoires très efficace ! Mais il ne faut pas en abuser Par exemple quand on prend du Dafalgan où du Doliprane 1000 ! Il ne faut pas en prendre plus de 4 cachets par jours ! Il même en prendre 2 cachets maximum par jour, un cachet le main au petit déjeuner et un cachet le soir pendant le diner où le souper ! Si non ca peux provoquer une insuffisance hépatique et une insuffisance Rénal ! Mais cet anti inflammatoire est très efficace pour lutter contre les inflammations respiratoires liés aux rhume, à la grippe et aux pneumonies, ainsi qu’aux maladies lié au Covid19 ! De manière générale les médicaments doivent être utilisés et consommé, sous prescription médical et suivie médical ! Hervé de Néoules !

    • Ouh là Hervé !!! Le Paracétamol n’est pas un anti-inflammatoire mais un antalgique, à la vertu de faire baisser la fièvre entre autre.

    • Moi, en cas de gros coup de mou, je dissous 1/4 d’Aspégic 500 (acide acétyl-salycilique = écorce de saule) dans un petit verre d’eau au repas, et au dodo. J’applique le même traitement, au prorata du poids estimé, aux petits animaux blessés que je recueille dans mon jardin.

  5. J’en apprends par BV. J’ignorai ce défi ( challenge ). Très dangereux. Faut-il inscrire sur les boites la dangerosité du surdosage régulier ? Avant que quelques lanceurs d’alerte interviennent, le Doliprane se « vendait comme des petits pains ». Mais avec le Covid, la demande a explosé et s’est encore plus banalisée. On connait la suite…

  6. Excellent article médical, pour une fois!

    Oui, le protocole 3D fait lors d’un Covid ou supposé COVID, s’appelait chez nous , soignants , « Doliprane, Dodo, Décès »

    Ces effets secondaires ne sont pas nouveaux. Il y a toujours eu des problématiques (d’où certains médicaments à base de paracétamol pour bébés qui ont été retirés du marché)

    Sachant qu’en plus, il y a du doliprane (enfin du paracétamol serait plus juste) dans de nombreuses spécialités anti rhumes (ou anti états grippaux vu que nombre de gens confondent rhume et grippe) notamment, eh bien, la dose est vite dépassée.

    Et j’ai vu, sur des prescriptions : « 1 comprimé en cas de douleurs. »
    Sachant qu’il faut six heures entre chaque prise, il y a donc des gros problèmes, vu que l’effet antalgique n’est pas toujours au rendez vous suivant les douleurs!

    Sachant de plus, que le nombre d’effets secondaires à dose thérapeutique est grand =
    troubles de l’état général, troubles mentaux et du comportement, troubles du système nerveux, troubles du système immunitaire, troubles des organes des sens, troubles gastro-intestinaux (allant de la simple nausée à l’hémorragie digestive ), troubles rénaux (pouvant aller jusqu’à l’insuffisance rénale aiguë ou chronique), genito-urinaires, hépathiques (cirrhose), hypoglycémie , troubles respiratoires et j’en passe , il y en a des pages!
    Je ne sais pas ce qu’il y a sur le Vidal, dans ma profession, nous n’utilisons pas ou rarement le Vidal, mais d’autres supports plus scientifiques.

    Mais que voulez vous. Le système médical français est horrible. Enfin selon ma vision des choses.

    Mais bon, il y a de plus en plus de greffes de foies, donc, heureusement qu’il y a la guerre en Ukr , et que le traffic se porte bien, n’est ce pas. Oui, c’est une ironie morbide, mais je souhaite tellement que les gens se réveillent!

  7. Alors là on ne comprend plus rien. D’un côté on veut proposer le suicide assisté et de l’autre on veut empêcher les imbéciles de se mettre volontairement en danger. Faut’il entraver la sélection naturelle? Les parents responsables aimants et attentifs n’ont rien à craindre.

  8. À l’école, on ferait bien de faire des concours de « celui qui fera le moins de fautes d’orthographe et de français ». C’est urgent!….

  9. Une mode qui va rendre le paracétamol interdit à la vente sans ordonnance?…Un tour de vis supplémentaire à notre liberté de consommateur (raisonnable) Tout excès est dangereux.

  10. Ajoutons que le Doliprane comme la pluspart des génériques contient du lactose ce qui n’est pas très agréable pour tous ceux (nombreux) qui sont allergiques au lactose. On pourrait peut-être s’inspirer du Tylenol américain qui n’en contient pas.

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